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Banfora : Une ville d’inconstance électorale

Publié le jeudi 25 novembre 2010 à 01h47min

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La cité du Paysan noir, depuis déjà quelques échéances électorales, montre différentes facettes. Aux différents dépouillements au soir des scrutins, se dégagent toujours des tendances qui sont révélatrices de la non-maîtrise de l’électorat par les hommes politiques. La preuve vient d’être une fois de plus donnée lors des consultations électorales du 21 novembre dernier, avec la prouesse du candidat Hama Arba Diallo, qui a eu un taux de 24%. Ce qui ne manque pas d’instaurer une certaine polémique au sein des partis de la mouvance présidentielle.

Après les résultats provisoires, disponibles depuis le 22 novembre 2010, les commentaires vont bon train dans la ville de Banfora. La raison, la percée du candidat Arba Diallo dans certains secteurs de la ville, même si ce dernier n’a pas ravi la vedette au candidat Blaise Compaoré.

Ces secteurs, ce sont par exemple, les secteurs 2, 3 et 5. Au secteur 2, l’écart entre les partis de la coalition pour Blaise Compaoré et le candidat Arba Diallo n’était pas abyssal : 462 voix pour le premier contre 314 pour le dernier.

Au secteur 3, supposé être le secteur du maire de Banfora, le CDP obtient 610 voix contre 382 pour son suivant immédiat Arba Diallo. Au secteur 4, le candidat Blaise Compoaré obtient 412 voix conte 311 pour Arba Diallo.

Au secteur 5, Blaise Compaoré a engrangé 701 voix contre 446 pour Arba Diallo et enfin pour ne citer que ces secteurs où le candidat Arba Diallo a boosté, le secteur 8 où la coalition pour Blaise Compaoré a obtenu 914 voix contre 482 pour Arba Diallo.

C’est donc dire que les partis de la mouvance présidentielle, malgré certaines tentatives, n’ont pu véritablement contre-carrer la machine électorale de Arba Diallo, qui avait déjà étendu ses tentacules dans bien des secteurs. A la veille du meeting de ce dernier, c’est à un meeting spécifiquement peul que l’on a assisté, dirigé par le ministre Sékou Bâ. En somme, en faveur de Blaise Compaoré, la ville de Banfora a obtenu le score le plus faible parmi les 9 départements de la Comoé, soit 59,97%.

Sur la question, « le directeur communal de la campagne va nous faire son rapport et on verra », dira Benoît Ouattara, coordonnateur régional de la campagne de Blaise Compaoré. En attendant, ce dernier estime qu’il y a quelques difficultés « que nous n’avons peut-être pas connues ou que nous n’avons pas pu identifier, nous attendons de faire le bilan ». Il fait remarquer que Banfora reste une ville avec une grande concentration et que de coutume, les villes sont des lieux où les suffrages sont partagés entre toutes sortes de candidats.

Pour le directeur communal, Souleymane Soulama, maire de Banfora, « les problèmes, nous en avons eu énormément, parce qu’il faut dire que le démarrage de la campagne n’a pas été facile ». Il précise qu’au préalable, il n’y a eu aucune réunion avec les responsables de la campagne, cela jusqu ‘au lancement même de la campagne. Pour lui, les finances ont été reçues en retard, de même que les gadgets. « Et pour une ville qui a 29 000 inscrits sur les listes, nous n’avons reçu que 1000 tee-shirts et 40 pagnes pour toute la campagne ; donc vous voyez ce que c’est ».

Pour Souleymane Soulama, l’accent a été toutefois mis pour que beaucoup de gens puissent voter. Il apprécie le taux de participation, qui est honorable. Et à l’entendre, il y a eu par ailleurs beaucoup de difficultés entre eux, les dirigeants, par exemple, dans la confection des listes où il y a eu beaucoup de frustrations. Ce qui, de son avis, a démotivé certaines personnes. « Mais je suis très fier de ces résultats », précise-t-il.

Outre ces difficultés internes, la cité du Paysan noir demeure une ville où il y a beaucoup de problèmes en ce sens que « il y a des usines qui sont fermées en l’occurrence les GMB, la SOSUCO qui a des difficultés, les gens ne sont pas rassurés et ils le disent, il y a beaucoup de chômage dans la ville et c’est ce que l’adversaire utilisait pendant la campagne », poursuit le directeur communal de campagne.

Et de s’expliquer en disant qu’il faillait mener le combat sur plusieurs fronts : « Convaincre les gens que notre candidat a promis l’ouverture des GMB et qu’on va revitaliser la SOSUCO, que les paysans auront tout ce qu’il y a comme charrues. On a mis l’accent sur ça, mais quelqu’un qui n’a pas mangé aujourd’hui, on lui promet qu’il va manger demain, c’est pas la même chose, c’est du concret que les gens veulent ».

Pendant cette campagne, les partis de la mouvance ne parlaient pas le même langage. Il y a eu des problèmes entre le CDP et RDB à Bérégadougou, de même qu’à Sidéradougou. Ce qui a amené le premier responsable du CDP de Bérégadougou à dénoncer publiquement les responsables locaux du RDB.

Ces derniers, qui ne prenaient plus part aux réunions, prétextaient qu’ils n’étaient pas associés comme il se devait d’où leur frustration. Des lettres de plainte ont même été écrites par le responsable CDP de Bérégadougou. « Je lui ai dis que c’est pas un comportement normal parce que tu ne vote pas le maire de Bérégadougou, mais tu travailles pour notre candidat commun », fulmine le premier responsable du RDB, Souleymane Soulama, qui dit avoir eu vent de ces difficultés vers la fin de la campagne. « Je suis resté dans mon champ pour cultiver, j’étais resté dans ma ville où il y avait beaucoup du travail à faire », précise-t-il.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le mécontentement semble grandissant dans la cité du Paysan noir. En 2006, à la faveur des élections municipales, sous la houlette du défunt Mamadou Koné, qui avait rejoint le RDB, la ville échappait au contrôle du parti majoritaire.

En 2007, au regard du score engrangé dans la ville lors des législatives, même si ce n’était pas des élections à la base, le CDP se repositionnait implicitement comme première force politique, suivi du RDB. La grande question qui titille les esprits, c’est celle de savoir comment, malgré ces deux forces, le candidat Arba Diallo a pu faire une entrée aussi fulgurante.

Les jours à venir nous situerons davantage. Mais d’ores et déjà, cette situation doit permettre à chacune des forces politiques présentes de connaître ses forces réelles sur le terrain, estime-t-on dans certains milieux.

Luc Ouattara

L’Observateur Paalga

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