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Bouaké : Pas de résultats, pas de cars

Publié le jeudi 4 novembre 2010 à 02h30min

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En raison de la fermeture des frontières terrestres pendant l’élection présidentielle ivoirienne, les sociétés de transport qui font la liaison Bouaké-Ouaga ont interrompu le trafic sur cet axe. Cependant, même avec l’ouverture officielle des frontières le mardi 2 novembre dernier, les gares de ces compagnies dans le chef-lieu de la région du Bandama sont restées vides, les premiers responsables attendant d’abord la proclamation des résultats du scrutin avant la reprise de leurs activités.

Une situation qui bloque des centaines de passagers, au nombre desquels l’envoyé spécial de l’Observateur Paalga, dans la ville, qui n’est pourtant qu’à 300 km de la frontière du Burkina. Si près, si loin, comme dirait l’autre.

« La direction de TCV vous informe que suite à la fermeture des frontières en vue des élections, elle fermera du 30 au 02. A bientôt ». Ecrit à la craie sur un petit tableau posé contre le portail de la gare de la compagnie dans le quartier "Dar-Es-Salam" de Bouaké, ce message qui porte l’en-tête « Avis à la clientèle » est la seule réponse cohérente que l’on peut avoir ce mercredi 03 novembre 2010.

La cour vide et les bureaux fermés ne pouvant répondre aux questions que se posent les voyageurs de même que les vigiles qui, eux, suggèrent de repasser voir le week-end. Au nombre des personnes qui se retrouvent ainsi bloquées sans car pour faire le voyage du Burkina, l’envoyé spécial de L’Obs., parti couvrir le scrutin du 31 octobre à Bouaké et dont le retour, initialement prévu pour le mardi dernier et reporté au mercredi en raison de la fermeture des frontières, est maintenant repoussé au week-end prochain, puisque le chef de gare de Bobo, joint au téléphone, a annoncé la reprise du trafic pour « vendredi ou samedi ».

S’il est plus facile pour un journaliste de tirer profit d’un si fâcheux contretemps en continuant de faire ce qu’il fait le mieux, ce n’est pas le cas pour le voyageur lambda qui veut retrouver sa famille. A l’exemple d’Ismaël Diabaté qui a fait le déplacement dans le chef-lieu de la région du Bandama où il s’est fait enrôler pour accomplir son devoir civique en votant pour « son candidat » et qui se voit maintenant « fermer la route du retour » à Bobo-Dioulasso.

Même s’il n’a pas d’inquiétude pour son pressing, dont vont prendre soin ses frères pendant son absence, ce chef de famille est tout de même contrarié de ne pas pouvoir retrouver sa femme et ses 3 enfants à la date prévue initialement, c’est-à-dire ce mercredi : « J’ai laissé ma famille durant une semaine et maintenant je ne sais pas quand je vais rentrer chez moi. Je ne suis pas seul puisque les cars prennent au moins 70 personnes par jour. Alors, vous imaginez combien de gens attendent ! »

Comme si elles s’étaient donné le mot, les gares de toutes les compagnies de transport situées à Dar-Es-Salam restent vides, les portails fermés. « Ils ont dû avoir des informations et puis ils ont peur qu’on casse les cars », nous explique un vigile, qui, lui non plus, n’a aucune idée du moment de la reprise des activités dans la station dont il a en charge la surveillance : « Je me dis que dès qu’on va dire les résultats, ils (NDLR : les patrons) vont observer la situation une journée et si y a pas de gbangban (manifestations), le lendemain seulement les cars vont recommencer à circuler comme avant ».

Il faut dire que la psychose d’une escalade de la violence est perceptible dans la ville. Les sociétés financières travaillent en journée continue et les ménagères font des provisions pour pouvoir tenir deux jours sans sortir le cas échéant. Dès 18 heures, les rues se vident et bon nombre de maquis et de points chauds de la ville restent clos.

Avec la proclamation des résultats partiels dans la nuit du mardi 2 novembre, la tension est générale. En témoigne cette anecdote dans un cybercafé du quartier « commerce ». En répondant à un coup de fil, un jeune homme lâche à son interlocuteur : « Mon frère, il paraît que y aura troisième tour ».

« Quoi ? » demandent en chœur plusieurs clients en levant la tête pour fixer le garçon, qui se rend aussitôt compte de sa méprise. « Pardon, je voulais dire deuxième tour », se reprend-t-il. Eclats de rires et ouf de soulagement dans toute la salle. Ambiance.

De notre envoyé spécial à Bouaké : Hyacinthe Sanou

L’Observateur Paalga

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