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17 Mai 1983 : Le prélude d’une revolution

Publié le jeudi 19 août 2010 à 01h53min

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Medecin-commandant Jean -Baptiste Ouedraogo, Président du CSP de Novembre 82 à Août 83

Le 17 Mai 1983 a-t-il été déterminant dans l’avènement de la révolution du 4 août ? Les acteurs de la révolution l’ont longtemps admis, au point d’en baptiser une des rues de la capitale. Mais depuis le 15 octobre, Blaise et ses partisans ne le croient plus. En réalité le 17 mai rappelle trop Sankara et n’incline pas l’histoire en faveur du 15 octobre. Si le 17 mai est le déclencheur de la marche vers le 4 août, il amoindrit le mérite de Blaise Compaoré dans la révolution et conséquemment accentue le caractère usurpateur du rectificateur.

A l’aube du 17 Mai 1983, le capitaine Thomas Sankara, alors Premier ministre et le commandant Jean Baptiste Lingani, Secrétaire permanent du Conseil de salut du peuple (CSP) sont mis aux arrêts. Sankara est envoyé à Ouahigouya et Lingani à Dori. Le Président Jean Baptiste Ouédraogo impute cette situation fâcheuse : " à la fougue de la jeunesse. L’inexpérience, les pressions et les erreurs imputables à l’une ou l’autre tendance du Conseil de salut du peuple ont contribué à conforter les thèses de divergences nuisibles à l’unité et à l’harmonie du mouvement. Etaient de ceux- là l’outrance verbale provocatrice de Sankara, ses improvisations et ses précipitations dans les déclarations à l’emporte- pièces et surtout à son sens cultivé de la politique spectacle ". Le capitaine Boukari Kaboré reconnaît que les premiers acteurs n’avaient pas le même tempérament. Sankara était un tribun et était convaincu de son choix idéologique. Il était par ailleurs sincère dans ses propos.

Il ne pouvait qu’avoir le verbe haut, affirme Boukari le lion. Alors que Jean Baptiste Ouédraogo, explique toujours, l’ex-commandant du Bataillon d’intervention aéroporté (BIA) de Koudougou était un patriote nationaliste certes, mais du fait de son passé de séminariste, il ne pouvait haranguer les foules. Le Président du CSP explique : " Immédiatement après ma nomination à la tête du Conseil de salut du peuple, le mouvement semblait avoir repris sa cohésion qui avait été ébranlée par le refus de Thomas d’assumer les responsabilités du pouvoir. Ce répit sera, malheureusement de courte durée. En effet, dès mi-décembre 1982, Thomas nous proposera de faire nommer un Premier ministre afin, disait-il, d’épauler le Président trop isolé, à son goût, au gouvernement.

Cette proposition a été débattue par le noyau originel du mouvement aux alentours du 15 décembre 1982 dans le bureau du capitaine Jean Claude Kamboulé. Deux tendances se dégageaient : celle de Thomas qui soutenait sa proposition et celle que j’incarnais qui trouvait que une telle nomination risquait plutôt de nuire à l’harmonie et à la cohésion du mouvement. Mis en minorité par Sankara et Kamboulé, je me conformerai à la décision de la majorité. Les tractations aboutiront à la nomination de Sankara le 10 janvier 1983. Dès lors, surgiront les conflits de compétence, les divergences politiques et idéologiques, des querelles de personnes, des luttes de clans au sein de l’Armée. " C’est le point culminant de ces positions diamétralement opposées qui aboutiront aux événements du 17 Mai 1983. Sankara et Lingani sont écroués et une dizaine de militaires font la résistance au camp Guillaume Ouédraogo. Ils ont à leur tête le capitaine Henri Zongo. Les éléments connus sont Gilbert Diendéré, Boukari Kaboré et le colonel Didier Tiendrébeogo.

Les points de revendications des éléments fidèles à Sankara et Lingani sont : La libération de Sankara et de Lingani, la convocation d’une assemblée générale dans 48 heures pour résoudre la crise et lever le siège du camp. Boukari le Lion demeure convaincu qu’ils pouvaient séjourner pendant plusieurs jours sans que le groupe ne subisse des conséquences dommageables parce que l’essentiel était à leur disposition. A l’extérieur du camp, les chars avaient pris position et la rumeur à Ouagadougou allait bon train. La Ligue patriotique pour le développement (LIPAD), organisation de la société civile proche du PAI, jette son va-tout dans ce qu’elle considère comme " une gifle de l’impérialisme contre le peuple voltaïque ". A partir du 20 mai, il sonne la mobilisation à travers l’Association des scolaires de Ouagadougou (ASO). Ils agitent également l’Université de Ouagadougou. La jeunesse scolaire et estudiantine descend dans les rues pour exiger la libération du Premier ministre et du secrétaire permanent du CSP.

La mobilisation monte crescendo. Des militants de la LIPAD-PAI, notamment Adama Touré, Ibrahima Koné, Sambo Bâ… sont arrêtés et internés au Nouveau Camp, l’actuel camp Sangoulé Lamizana. D’autres arrestations des militants de la gauche voltaïque sont opérées à l’intérieur du pays. Sous la pression, Sankara et Lingani sont libérés une première fois. Ils seront repris et internés cette fois au Nouveau Camp. Boukari Kaboré indique qu’une tentative d’assassinat avait été simulée pour tuer les deux. Mis au courant, le capitaine Henri Zongo en informe Jean Baptiste Ouédraogo. Boukari Kaboré se rend au camp pour alerter les deux prisonniers. Il trouve Sankara en tenue de sport, la guitare à l’épaule. L’heure est grave, lance-t-il, à Sankara. Il lui fait part du projet de conspiration et lui communique la parade qu’il a prévue : Dès qu’ils entendent une rafale, la consigne, c’est d’enjamber le mur qui donne sur la route. Il sera là au moment indiqué pour les exfiltrer.

Mais la conspiration ébruitée échouera. Les célèbres détenus seront une fois encore libérés, mais le pays continue de vivre une situation trouble. Pendant ce temps, le 4 Août se prépare à Pô. Certains jeunes militants ou sympathisants s’enrôlent dans l’Armée rebelle. Un agent de VOLTELEC, ex- appellation de la SONABEL, Adama Touré, homonyme parfait de Lénine ( professeur au PMK), membre de la LIPAD, entretenait une boîte. Moumouni Ouédraogo, un ancien collègue de bureau d’Adama Touré raconte : des élèves passaient prendre des consignes dans cette boite avant de rejoindre les éléments de Pô. Des officiers y venaient laisser des consignes codées. Exemple ; "Dites lui qu’on se retrouve ce soir au point 0 ". " La première fois que j’ai vu des kalachnikov pliables, c’était dans cette fameuse boîte où des gens sont venus récupérer un lot dans un sac ", nous confie Moumouni Ouedraogo. La situation de tension va durer jusqu’au 4 août 1983 avec le renversement de JBO et son remplacement par son ex-Premier ministre Thomas Sankara n

Merneptah Noufou Zougmoré

L’Evènement

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Vos commentaires

  • Le 19 août 2010 à 07:43, par warba En réponse à : 17 Mai 1983 : Le prélude d’une revolution

    C’était tout simplement un coup d’état qui a permit à la tendance progressiste de gauche incarnée par Sankara,la LIPAD/PAI et les étudiants de Dakar et de la FEANF de renverser la tendance droitière incarnée par JBO,les debris du RDA,somé et son neveu Kamboulé.C’était un coup d’état militaire maquillée en revolution venu brusquement et qui a echoué brusquement.Les conditions d’une vraie révolution sont en train de se reunir petit à petit.

  • Le 19 août 2010 à 15:09 En réponse à : 17 Mai 1983 : Le prélude d’une revolution

    Dommage que la fiction et le mensonge depassent la realité. Aux journalistes et historiens de reconstituer le puzzle de cette histoire en interrogeant à froid et à fond les differents acteurs encore presents. Le Faso serait ahuri de la lecture des évenements. C’est bien sûr une question de perspective mais les faits objectifs ne mentent pas et donnent des indications.

  • Le 19 août 2010 à 19:29, par joel En réponse à : 17 Mai 1983 : Le prélude d’une revolution

    Sankara sincère dans ses propos ! quelle affirmation péremptoire ; Est-ce que boukary était dans le coeur de cet homme ? Moi je crois plutôt que sankara était un illuminé et il a fait perdre au pays des années. il n’y avait pas avant lui l’autosuffisance alimentaire mais elle n’est pas venue avec lui, et pendant ces 4 ans, que de sang, que de larmes !!!

    • Le 26 août 2010 à 11:22 En réponse à : 17 Mai 1983 : Le prélude d’une revolution

      Mon cher Joel,
      Es-ce que le sang était fini après son horrible assassinat ? Rappelez vous 1989, puis 1990, puis 1998. Peut-être que sous Sakara, c’était les mêmes qui tuaient ? ’hitoire ledira prochainement

  • Le 1er octobre 2010 à 14:54, par lefeu En réponse à : 17 Mai 1983 : Le prélude d’une revolution

    Vous n’etes qu’un lot d’illetres. C’est pour ca que nous allons jamais avancer dans ce pays la. Le pays est pleins d’incompetents, d’egoistes et d’ingrats ! Dommage.

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