Chose quelque peu curieuse, puisque tous les observateurs de la scène politique s’accordent à dire que l’éléphant-emblème de l’ADF/RDA- continuera de miser sur son étalon favori, Blaise Compaoré, il est actuellement difficile, même aux bonzes du parti, de dire avec certitude la personne qui défendra les couleurs de l’ADF/RDA. C’est en substance le contenu de l’entretien que le député Sidiki Bélèm, président du comité d’organisation de ce congrès, a bien voulu accorder à Fasozine.com, le lundi 9 août 2010 à Ouagadougou.

Fasozine.com : Quel bilan faites-vous des préparatifs du congrès de l’ADF/RDA qui aura lieu les 14 et 15 août 2010 à Ouahigouya ?

Sidiki Bélèm : Je peux vous rassurer que les préparatifs vont bon train et que le comité local d’organisation met les petits plats dans les grands afin que le congrès soit un succès. Nous avons, pour cela, rencontré les représentants des secteurs, des villages et des départements, réunion au cours de laquelle nous avons reçu la visite surprise du président du parti, Me Gilbert Ouédraogo. Nous avons pu visiter les lieux d’hébergement, la salle Mahamadou Ouédraogo où se tiendra la cérémonie d’ouverture. En cas de pluie, la clôture va également se dérouler là bas, mais au cas où le ciel est clément, nous allons clore nos travaux au stade municipal de Ouahigouya. Nous attendons au moins 19 000 participants. Certains nous ont même signifié qu’ils n’ont pas besoin de notre prise en charge mais seront bel et bien présents.

Pourquoi avez-vous choisi de tenir le congrès à Ouahigouya ?

L’ADF/RDA tient de façon rotative ses activités. Nous avons des militants dans toutes les 45 provinces, et pour cela, nous faisons tourner nos activités dans les différentes localités. Le président du parti, en plus de Ouahigouya, avait proposé Koudougou, Fada ou Bobo-Dioulasso à cause du cinquantenaire des indépendances. Mais c’est finalement la ville de Ouahigouya qui a été retenu, pour un certain nombre de critères.

Les congressistes auront à désigner le candidat qui défendra les couleurs du parti à la présidentielle du 21 novembre 2010. Y a-t-il lieu de maintenir encore le suspense quand on sait que l’ADF/RDA est membre de la majorité présidentielle et que par conséquent vous aller, sans doute, renouveler votre soutien au président Blaise Compaoré ?

Ce que vous dites relève de la logique. Mais en politique tout n’est jamais droit. Et comme aime à le répéter Gérard Kango Ouédraogo, la politique est une question de moment. C’est-à-dire qu’à une situation correspond une position donnée. Et si la situation change, la position change avec elle. Il faut aussi retenir que nous avons fait une analyse critique de notre participation au gouvernement et il n’y a pas de raisons objectives que nous le quittions. Mais il appartiendra aux militants de décider de la position du parti lors du scrutin présidentiel à venir. Etant un parti de masse, la décision de la majorité prime sur la volonté de n’importe quel responsable. Et si les militants décident qu’on continue à soutenir le président Blaise Compaoré, la direction respectera leur volonté. Et s’ils veulent que l’ADF/RDA présente son candidat, nous le ferons aussi. Au cas où les militants vont demander que nous quittions le gouvernement, nous allons remercier le président du Faso pour tout ce qu’il a fait pour nous. L’ADF/RDA n’est pas ingrate, mais nous suivons la voix de la majorité. Chaque province sera représentée par sept militants. Les provinces auront, chacune, une voix. Et ce sont ces militants qui vont décider de ce que nous allons faire.

Au cas où vos militants décideront que l’ADF/RDA propose un candidat, quel sera le poids de ce dernier, face à Blaise Compaoré ?

La politique, c’est comme le sport. Si dans un tournoi, le tirage au sort décide que votre équipe doit jouer contre le Brésil, vous allez le faire même si vous serez battus par 10 buts à 0. Donc, si les militants décident que l’ADF/RDA présente un candidat, il va devoir affronter Blaise Compaoré. C’est cela aussi la politique.

Quel sera l’ordre du jour du congrès ?

Au cours de nos assises, nous allons faire le bilan du quinquennat et dégager des perspectives pour un Burkina émergent. Nous dresserons le bilan du quinquennat parce qu’en 2005, le président du Faso a bien voulu accepter incorporer une partie de notre programme politique dans le sien. Il nous a également associés à sa campagne. Après sa réélection, le président Blaise Compaoré a estimé qu’il fallait nous associer à la gestion du pouvoir parce que nous avions une partie de notre programme politique qui rejoignait le sien. A la fin du quinquennat, il est donc normal que nous fassions le bilan du mandat afin d’en tirer les conclusions nécessaires parce que l’ADF/RDA est aussi comptable des résultats. Déjà, nous avons relu notre programme politique que nous allons proposer à l’approbation des militants. Nous avons formulé des propositions pour la construction d’un Burkina émergent et nous sommes prêts à les reverser pour la réalisation de cet objectif.

Donc si Blaise Compaoré accepte encore d’intégrer une partie de votre programme au sien, vous allez, de nouveau, lui renouveler votre soutien ?
La décision de soutenir ou pas Blaise Compaoré dépendra du congrès. En 2005, l’action de l’ADF/RDA avait été décidée par les congressistes. Nous n’anticipons pas. Au cas où les participants aux assises décideront de renouveler notre soutien à Blaise Compaoré, nous irons, sans état d’âme, le voir. Ce que les gens diront nous importera peu. Ceux qui seront d’accord avec notre démarche pourront nous rejoindre.

Le 3e congrès extraordinaire du CDP (Congrès pour la démocratie et le progrès, pouvoir) a proposé de créer un sénat au Burkina Faso. Quel est votre avis sur cette question ?

Attendez que le congrès se réunisse et se prononce sur les différentes questions qui concernent la vie politique au Burkina. D’ores et déjà, je puis vous affirmer que je défends une position commune au parti. Si, après analyse, le congrès pense que le développement du Burkina passe par ces réformes, je ne verrai pas d’inconvénients. Nous sommes membres du gouvernement et il n’y a pas lieu de créer des fissures inutiles. Pour cela, nous attendons la décision du congrès.

Les congressistes vont se pencher aussi sur des réformes politiques et institutionnelles. Quelles sont déjà les propositions que vous comptez soumettre à l’approbation des militants ?

Dans certains domaines, nous sommes toujours en réflexion. Par exemple, pour préparer le congrès, nous avons mis en place des commissions pour réfléchir sur les différents sujets. Les commissions qui se sont penchées sur les réformes dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’emploi et sur le renforcement de certaines institutions comme le Conseil constitutionnel sont prêtes. Mais nous voulons plus de temps pour peaufiner la réflexion. La révision de l’article 37 préoccupe actuellement les gens. Mais cet article n’est pas la fin du monde. Que cet article soit révisé sous le président Blaise Compaoré ou pas, il le sera pendant le mandat de quelqu’un d’autre. Il ne restera pas tel et éternellement. C’est cela aussi l’avancée des hommes, des nations.

Jacques Théodore Balima

Fasozine