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PRESIDENTIELLE IVOIRIENNE : Octobre, la nouvelle utopie

Publié le vendredi 6 août 2010 à 00h07min

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Selon certaines sources, la date du 31 octobre prochain serait retenue pour le premier tour de l’élection présidentielle ivoirienne. Faut-il y croire ? Serait-on réellement parvenu à un accord ? Si cela se confirme, élections présidentielles ivoirienne et burkinabè interviendront presque dans la même période.

On se souvient que Guillaume Soro, Premier ministre de Côte d’Ivoire, avait confié au journal « Notre Afrik », que ce serait une « catastrophe » s’il n’y avait pas d’élections en Côte d’Ivoire durant l’année 2010. De leur côté, les Houphouëtistes s’étaient également montrés confiants et optimistes ces derniers temps. On attend surtout de savoir si le clan présidentiel adhère vraiment au nouveau projet. A moins d’avoir lui-même fait cette nouvelle offre, il faudra encore s’attendre à ce que le camp des partisans du président Gbagbo use de tous les artifices pour rejeter cette dernière. Mais alors pourquoi fin octobre ?

Voudrait-on se donner bonne conscience et prendre le temps de bien fêter en décembre les 50 ans de la République ? Le chef de l’Etat ivoirien chercherait-il à ménager le médiateur Blaise Compaoré, également candidat à sa propre succession le 21 novembre prochain au Burkina ? Ou bien au contraire, envisagerait-il de lui compliquer les choses, sachant qu’il serait bien occupé par sa propre campagne électorale ?

En tout cas, les reports incessants de la tenue de l’élection présidentielle ont fini par exaspérer. Le ras-le-bol a même gagné les rangs des organisations de la société civile (OSC) dont la Ligue ivoirienne de défense des droits de l’homme (LIDHO). Ces derniers temps, des dirigeants sont montés au créneau pour demander que le 7 août, date du cinquantième anniversaire de l’indépendance, soit considéré comme date butoire pour fixer la date de l’élection présidentielle. Serions-nous encore dans les symboles en Côte d’Ivoire ? L’évolution du contexte ouest- africain ne serait peut-être pas si étrangère à cette évolution des mentalités au bord de la Lagune Ebrié. On le sait, la Mauritanie et le Togo sont parvenus à l’essentiel et sont aujourd’hui en train de travailler à la consolidation progressive de leurs expériences démocratiques. La Guinée est dans l’attente du second tour de l’élection présidentielle et le Niger promet.

Tout n’est sans doute pas parfait ici et là ; mais le processus républicain se met quotidiennement en place et les peuples commencent sérieusement à respirer et à espérer. Pourtant, ces pays ont vécu des moments bien pénibles et ont parfois même frisé la catastrophe. En dépit des reproches qu’on peut faire à la classe politique africaine, les dirigeants de ces pays cités précédemment, ont fait violence sur eux-mêmes pour enfin parvenir à sortir tant bien que mal de la crise. Depuis qu’elle s’est trouvée soudainement en panne, la Côte d’Ivoire qui a un long parcours en matière de luttes démocratiques, continue quant à elle de "piétiner", incapable de relever la tête pour faire face aux défis nouveaux. A notre sens, ce contexte ouest-africain peut avoir fouetté un peu l’ego des Ivoiriens.

Le clan présidentiel, on le sait, a toujours fait preuve d’un manque réel de volonté politique. Jusque-là, le président Gbagbo a su manager pour être aux premières loges. C’était devenu manifeste qu’il entendait demeurer à son poste afin de conduire lui-même les festivités commémorant le cinquantième anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire.

L’homme s’était certainement juré de laisser sa marque à l’occasion de ces 50 ans d’anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Qu’importe que son mandat émane ou pas du peuple ivoirien ! L’Afrique et le monde entier devront en prendre acte. Mais que retiendra l’histoire de la gestion de cet homme qui, somme toute, aura laissé dans son sillage de nombreux morts dont des anonymes, des compagnons de lutte et des journalistes ? En tout cas, de toutes les commémorations ayant cours à travers l’Afrique, ce cinquantenaire demeurera dans les esprits comme étant le plus triste et le plus pitoyable.

Et pour cause : sur presque tous les plans, la Côte d’Ivoire se trouve dans l’impasse. Vraiment, le peuple ivoirien ne mérite pas un tel bilan ! De quoi en arriver à regretter le premier anniversaire fêté sous le règne du Vieux Houphouët Boigny. Les faits le montrent : Laurent Gbagbo n’a d’yeux que pour lui-même. Le peuple ivoirien et son destin lui importent peu. Sinon, il aurait relevé le défi de l’organisation rapide des élections. La chose dure en effet depuis plusieurs années. Les Ivoiriens et la communauté internationale se seront donc démenés pour rien. L’homme en fait toujours à sa tête. Et il ne faut pas s’attendre à le voir enfin se décider s’il n’est pas certain de remporter ces élections.

Gbagbo l’a suffisamment montré : il ne reculera devant rien pour se succéder à lui-même. Dommage pour ce socialiste qui se prétend démocrate et proche du peuple, lequel souffre depuis belle lurette de l’incapacité de ses dirigeants à sortir de la crise, et à résoudre les problèmes qui s’amoncellent jour après jour. Sans avoir été élu, il continue de gouverner sans gêne et sans scrupules depuis cinq ans un pays qui se désagrège.

Comment donc se fier au clan Gbagbo ? Que trouvera-t-il de nouveau comme artifice pour rejeter la nouvelle offre ? Le contentieux électoral ? Des diatribes avec les forces nouvelles qui ont récemment enregistré le retrait officiel de Guillaume Soro de la tête de l’organisation ? Le ramadan et ses suites ? Que peuvent les OSC face à des gouvernants qui se sont jusque-là montrés indifférents au sort de leur peuple, et sourds aux nombreux appels de la communauté internationale ? Maintes fois, nous l’avons souligné dans ces colonnes : le peuple ivoirien et les Africains dans leur ensemble sont fatigués des atermoiements d’un clan présidentiel qui a montré ses limites tant en matière de démocratie que des libertés en particulier.

Ce n’est vraiment pas pour rien que le président américain Barack Obama, pourtant nouveau venu sur la scène diplomatique internationale, s’évertue à interpeller la conscience des dirigeants africains. Il faut mettre fin à ces incessants retours en arrière qui ridiculisent tout un continent, et hypothèquent l’avenir des générations montantes. Laurent Gbagbo et ses partisans oseront-ils s’assumer ? Prendront-ils enfin le risque de se soumettre au diktat de l’urne ? En respecteront-ils le verdict ? Quel poids réel l’élection présidentielle burkinabè de novembre 2010 a-t-elle sur la date du scrutin en Côte d’Ivoire ? Le 31 octobre 2010 : miracle ou utopie ? C’est le wait and see.

"Le Pays"

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