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« Bonne chance » Jonathan !

Publié le mercredi 12 mai 2010 à 02h16min

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Les réponses apportées par Umaru Musa Yar’Adua aux maux du Nigeria ont suscité un début d’espoir et de soulagement tant au sein de ses compatriotes que de la communauté internationale, avant que celles-ci ne piétinent à cause de ses nombreuses hospitalisations.

Sous le poids de la maladie, l’enfant de Katsina n’a pas pu entretenir convenablement le fil du dialogue qu’il a renoué difficilement avec les rebelles du Delta du Niger et user de son bâton contre les intégristes, les gourous des sectes, ces troubleurs de l’ordre public. « Le président Yar’Adua a travaillé en faveur de la paix et de la stabilité en Afrique, en soutenant les efforts de maintien de la paix et en critiquant vigoureusement, les actions non démocratiques dans la région.

Il s’était engagé à instaurer la paix et la prospérité au Nigeria et perpétuer cet engagement permettra d’honorer sa mémoire », a rappelé le président américain Barack Obama dans son hommage. L’héritier du fauteuil présidentiel, Goodluck Ebelé Jonathan, doit maintenir le cap et relever impérativement ces défis non seulement en pansant les cœurs blessés et meurtris par les nombreuses injustices, mais aussi en forgeant une culture de paix sociale au sein de toutes les couches de la population nigeriane.

C’est à ce prix que la confiance va renaître et avec elle, le décollage unanime de tout un peuple et de tout un pays. Heureuse coïncidence, le successeur de Yar’Adua porte en ses prénoms, les gages d’une réussite de cette mission difficile : « Goodluck » ou « Bonne chance » en anglais et « Jonathan » ou « Yehonathan » signifiant « Dieu a donné » en hébreu.

L’astrologue vietnamien Nguyen Ngoc-Rao dont le site « Asiaflash.com » donne la signification des prénoms : « Apollon du Belvedère (dieu romain) représente bien Jonathan. La tête haute, tout accuse une vitalité extraordinaire.

On dirait qu’il est toujours prêt à bondir. Lorsqu’il marche, il allonge bien le pas. On ne peut s’empêcher d’admirer sa prestance. Ses gestes, lents et précis, dénotent une volonté et une assurance sans bornes ». Puisse donc cette description correspondre réellement au caractère naturel du nouveau président du Nigeria et lui permettre de mettre sur les rails un pays en déliquescence.

L’ascension politique de Jonathan enseigne mieux sur sa baraka et son aventure providentielle. Né en 1957 dans la région pétrolifère du Delta du Niger, Goodluck Jonathan, de l’ethnie Iiaw, est issu d’une famille vivant de la fabrication de pirogues. Zoologiste de formation, il effectue une carrière d’inspecteur au ministère de l’Education avant d’être professeur d’université et d’œuvrer à la défense de l’environnement. Le nouveau président n’entre à visage découvert en politique qu’en 1998.

Vite, il accède à de hautes fonctions au sein du gouvernement fédéral et au plan national. Elu vice-gouverneur de l’Etat de Bayelsa, en 1999, il en devient le premier magistrat après que son chef eut été démis de ses fonctions pour corruption. Concomitamment, il est choisi par l’ancien président Olusegun Obasanjo pour briguer le poste de vice-président du PDP en 2007. En si peu de temps, « Bonne chance Dieu donné » a joué, réussi et les seconds et les premiers rôles.

Il lui revient maintenant de puiser dans ses tréfonds pour construire la paix et ramener cette sérénité enclenchant tous les espoirs dans son pays. Surtout que les épines ont pris racine dans son Etat d’origine. Un grand challenge que Gooluck Jonathan doit gagner d’ici à 2011. Soit le nouveau locataire du palais d’Abuja perd la face et le pays est précipité dans le gouffre, soit il s’anime de sagesse et triomphe de toutes les chaînes liant une nation pouvant prospérer à tout point de vue.

Le président Umaru Musa Yar’Adua est certes décédé, mercredi 5 mai dernier d’une péricardite, mais il est indéniable que sa disparition a été précipitée, d’une façon ou d’une autre par les nombreux troubles dans son pays. Le conflit ouvert par le Mouvement pour l’émancipation du Delta du Niger (MEND), les affrontements sans cesse entre chrétiens et musulmans à Jos ont porté un grand coup au cœur déjà fragile du troisième chef d’Etat civil du Nigeria. Le souci permanent de voir son pays sortir de l’ornière l’a profondément rongé que la maladie elle-même.

Le géant de l’Afrique, de par sa population (150 millions d’habitants) et ses immenses richesses naturelles (le pétrole notamment), n’a pas su taire ses vieilles contradictions pour se construire durablement une stabilité. Ni la fin de la guerre de sécession du Biafra (du 6 juillet 1967 au 15 janvier 1970) avec son souvenir douloureux d’un million de morts ni celle des coups d’Etat militaires qui ont longtemps caractérisé ce pays, n’ont pu définitivement enterrer les vieux démons.

Le retour à la vie constitutionnelle avec l’élection du revenant politique Olusegun Obasanjo en 1999 n’a pas aussi totalement aplani les divergences politiques, communautaires, régionales, religieuses et ethniques.

Ces plaies que la terre de Nnamdi Azikiwé (premier président d’origine Ibo renversé en 1966) et du prix Nobel de littérature Wolé Soyinka a trainées tout au long de son histoire moderne, à tel point que leur puanteur infeste sa quiétude, son rayonnement et son ambition de leadership continental. Celles-ci subsistent et empêchent le Nigeria de prendre son envol dans le concert des pays riches.

Son rang de premier producteur de l’or noir est même menacé par l’Angola. Or, ce territoire d’environ un million (1 000 000) de kilomètres carrés (km2) possède tout, sous et sur son sol, pour démontrer à la face du monde, une force économique et diplomatique que l’Afrique peut se fabriquer.

Le Nigeria s’est paradoxalement dessiné un portrait de géant aux pieds d’argile en concentrant tous les maux dont tous les pays africains se délectent avec amertume : pauvreté, corruption, gabegie, insécurité. Le désordre qui y règne et la défiance perpétuelle de l’autorité de l’Etat sont corollaires de son sous-développement. L’enlisement des populations dans la misère résulte en grande partie, de la mauvaise répartition des richesses obligeant certains habitants des zones productrices à prendre des armes pour réclamer la justice sociale.

A cela, s’ajoutent la survivance des problèmes de cohabitation entre chrétiens et musulmans, ainsi que la montée inquiétante de l’intégrisme religieux. Ce sont autant de griefs qui ont grippé la machine socioéconomicopolitique du Nigeria. Ils constituent des exemples confortant les détracteurs du continent dans leur thèse pour justifier son incapacité à trouver une solution à ses contradictions et à se développer par lui-même.

Jolivet Emmaüs (Joliv_et@yahoo.fr)

Sidwaya

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