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PROCES DE ABBA ABACHA : Tel père, tel fils

Publié le mardi 11 mai 2010 à 01h48min

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Qui ne se souvient de Sani Abacha, ce général qui a mis le Nigeria sous coupe réglée pendant son règne de 1993 à 1998 ? Pas en tout cas le peuple nigérian dont il a spolié les fonds publics à hauteur de 2,2milliards de dollars, encore moins le peuple ogoni dont il a fait pendre haut et court un des dignes fils, Ken Saro Wiwa. C’est cet homme qui, 11 ans après sa mort, continue de faire parler de lui. En mal bien sûr.

En bon dictateur, il a su placer dans divers paradis fiscaux, le pactole qu’il a détourné des caisses de l’Etat, en prenant le soin d’y mettre le nom de ses proches, dont ses enfants. L’un d’entre eux, Abba, a maille à partir avec la justice suisse ces jours-ci. On pourrait même parler de folie de la part du fils de ce dictateur qui fait appel à une décision le condamnant à une peine de prison avec sursis et à la confiscation de 350 millions de dollars planqués au Luxembourg et aux Bahamas.

Car quelle preuve d’honnêteté Abba peut faire prévaloir alors qu’il est de notoriété publique que Abacha a utilisé ses enfants comme prête-noms pour faire disparaître toute trace de détournement. Tous les dictateurs africains ont utilisé ce stratagème aujourd’hui éculé, mais qui, il y a 20 ans, était très efficace. Les Mobutu, Bongo, Bokassa, Eyadéma et autres Déby sont connus pour avoir impliqué étroitement leur fratrie à la vaste œuvre de spoliation de l’Etat. En général, ces enfants impliqués très tôt dans le vice de la corruption, se réfugient en Europe où ils roulent carrosse et veillent sur les biens de leur père. C’est une constante dans les dictatures africaines. Sani Abacha n’y a pas échappé.

On comprend d’ailleurs pourquoi au Nigeria, le MEND en est arrivé à des positions extrêmes comme la guérilla, pour exprimer certaines revendications. Il y a de quoi être révolté face aux prédateurs qui ne cessent de piller les caisses de l’Etat dont on sait qu’elles sont alimentées en grande partie par l’argent du pétrole. Cet or noir extrait dans le Delta et dont les populations ne jouissent pas de l’usufruit. Tout ce qu’elles reçoivent, c’est les balles meurtrières et dans le meilleur des cas, la pollution.Le président Jonathan Goodluck, en faisant de la lutte contre la corruption son cheval de bataille, veut montrer que le Nigeria ne veut plus traîner cette image de pays aux mœurs politiques décadentes. Le pays détient le triste record des détournements les plus massifs, à l’instar de ces 2,2milliards de dollars dissipés par Abacha.

Certes, comme dans la plupart des pays africains, la pression des bailleurs de fonds et de certaines ONG a conduit les dirigeants à être moins boulimiques. A cela, il faut ajouter l’obligation de transparence imposée aux pays destinataires de fonds détournés comme la Suisse par les Etats-Unis, depuis la dernière crise financière. La Suisse ne peut plus laver aussi blanc qu’elle le faisait, l’argent sale venu d’Afrique. Mais il ne faut pas se faire d’illusions : le phénomène de la corruption et du détournement des deniers publics demeure tenace, même s’il a pris une forme plus sophistiquée. En tout état de cause, il faut espérer, pour le Nigeria, que le procès Abba Abacha sera pédagogique et que surtout, il sonnera le glas du pillage à grande échelle et par familles interposées, des ressources du pays.

Mahourou KANAZOE

Le Pays

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