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Crise ivoirienne : Gorgui est de retour

Publié le lundi 26 avril 2010 à 01h49min

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“Là ou bat le cœur du monde, le Sénégal doit être présent, là ou le Sénégal est sollicité, nous devons répondre présent”, aimait répéter Me Abdoulaye Wade, le président sénégalais, à son ex-ministre des Affaires étrangères, Cheick Tidiane Gadio,

“le meilleur ministre africain des Affaires étrangères”, selon toujours “Gorgui”, qu’il a fini par limoger en 2009 pour des divergences sur le dossier guinéen ; comme pour montrer que le patron de la diplomatie au pays de la Terranga, c’est bien lui, même si l’on sait que celui qui a succédé à Abdou Diouf ne s’embarrasse pas souvent de circonlocutions diplomatiques”.

D’où cette sortie dans le débat sur la crise ivoirienne : “Actuellement, un Burkinabè subit en Côte d’Ivoire ce qu’un Africain ne subit pas en France”. S’en suivra un froid entre Wade et son homologue ivoirien Laurent Gbagbo, qui s’estompera avec le temps. Ainsi, tout comme feu Gnassingbé Eyadéma, feu Omar Bongo Ondimba ou Thabo Mbéki, Abdoulaye Wade tente de jouer au pompier en Eburnie.

Voilà donc le premier magistrat sénégalais de nouveau sur le théâtre de la crise ivoirienne, au détour d’une visite “d’amitié et de travail”. Officiellement, comme tout chef d’Etat peut le faire, Wade a effectué du 22 au 23 avril 2010, une visite d’Etat dans ce pays. Quoi de plus normal ! Sauf qu’ici, détail de taille, ce séjour de 48 heures se fait dans un pays “crisé”, et l’illustre hôte justement a non seulement eu un long tête-à-tête avec son homologue, mais aussi rencontré tous les autres protagonistes (RDR, PDCI, CEI, Premier ministre Guillaume Soro) de la situation. Au cœur de tous ces entretiens avec ses frères Ivoiriens, “les questions de sortie de crise et les problèmes de la sous-région”, dixit Soro.

Les propos de Laurent Gbagbo sur les raisons de cette visite sont plus subliminaux, mais n’en demeurent pas moins assez clairs : “J’ai invité le président Wade à venir à Abidjan, je lui ai donc demandé de parler aux uns et aux autres... pour que la Côte d’Ivoire sorte de la situation de crise où elle se trouve. Nous avons fait 80% du chemin, il nous en reste 20%. Mais, vous savez, quand on est à la fin, c’est plus difficile. Et il nous faut appuyer sur l’accélérateur pour relancer la machine”.

L’Ivoirien a donc invité le Sénégalais à venir échanger avec tous les acteurs internes pour que la Côte d’Ivoire sorte de cet interminable bourbier. Une invite acceptée et honorée. Pourtant, Wade récuse le vocable de médiateur, qu’on tente de lui coller à la peau. Pour le principal artisan de l’alternance au Sénégal en 2000, le Burkinabè Blaise Compaoré reste et demeure le médiateur attitré dans la crise ivoirienne. D’ailleurs, c’est sous l’accord, dit de Ouagadougou, signé sous sa médiation le 4 mars 2007, que fonctionne politiquement la Côte d’Ivoire.

Tonton Wade se refuse donc à emboîter le pas au chef de l’Etat burkinabè. N’empêche, il a été, en l’espace de 2 jours, un médiateur dans ce pays. A la rescousse de Blaise, peut-être, mais il a palabré avec les frères ennemis ivoiriens pour trouver une solution.

Mieux, il s’est risqué à proposer des sillons de sortie de la crise, laquelle perdure aujourd’hui, foi de Wade, parce qu’il y a un “déficit criard de communication au sein des groupes et dans l’ensemble du groupe”. Et pour y remédier, “N’Djombor” (1) propose une “table ronde qui va regrouper tous les protagonistes”.

En un mot, il recommande la tenue d’un Cadre permanent de concertation (CPC) qui ne dit pas son nom. Est-ce donc une médiation temporaire, juste le temps d’une visite “d’amitié” au bord de la lagune Ebrié ? Inversement, les principaux acteurs politiques prendront-ils désormais la direction de Dakar ?

On n’en est pas encore là, et sans doute, saura-t-on les retombées de cette médiation-éclair d’ici quelques jours. Sans rien préjuger, on peut se poser cependant la question suivante : Blaise Compaoré étant le doyen des chefs d’Etat de l’Afrique de l’Ouest, et Wade le doyen d’âge, le second parviendra-t-il à booster la facilitation du premier ? C’est possible, à condition, qu’entre temps, le locataire de l’avenue Léopold-Sédar-Senghor ne commette pas un écart langagier, dont il devient coutumier depuis quelque temps.

La Rédaction

Note : (1) “Ndjombor” : lièvre en Wolof, sobriquet donné à Wade par Senghor, pour signifier qu’il est rusé.

L’Observateur Paalga

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