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AFRIQUE DU SUD : L’hymne de la discorde

Publié le mercredi 31 mars 2010 à 05h18min

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Le naturel du Congrès national africain (ANC) est en train de revenir au galop en Afrique du Sud. Bien qu’il soit au pouvoir, ce parti a du mal à se départir de son passé de luttes farouches contre l’odieux système de l’apartheid. La preuve, ou plutôt les preuves : l’hymne du parti que certains militants veulent remettre au goût du jour malgré le refrain appelant à « tuer l’homme blanc » ; l’opposition d’une Cour de justice qui a déclaré le chant dans son ensemble « illégal et anticonstitutionnel » et les cris d’orfraie des partis adverses et de la minorité blanche.

Cela ne semble pas refroidir l’ardeur des partisans de cet hymne qui arguent qu’il fait partie de l’histoire de l’ANC et qu’il n’est donc pas question d’interdire qu’il soit chanté. Et tout cela au mépris de la nation arc-en-ciel voulue par Nelson Mandela. C’est la dilapidation de l’héritage du héros de la lutte contre l’apartheid qui se poursuit de son vivant par ses successeurs. Le pardon accordé aux Blancs qui ont longtemps fait du mal aux Noirs, la concorde, l’unité nationale prônés par Nelson Mandela à son arrivée au pouvoir ne représentent plus aujourd’hui grand-chose pour Jacob Zuma et les nostalgiques des années de la lutte contre l’apartheid.

Les radicaux de l’ANC ont du mal à réaliser que les temps ont changé, que le parti doit faire une mue totale surtout qu’il gère le pouvoir d’Etat. Par exemple, si le parti s’est débarrassé de sa branche armée, il n’y a pas de raison qu’il garde un hymne ou un chant qui exalte des valeurs contraires à celles de l’unité, de la fraternité. On a la faiblesse de penser que l’ANC défend hélas, des valeurs qui rappellent l’apartheid. D’où ce bras de fer avec la justice à propos de cet hymne de la discorde. L’ANC doit prendre exemple sur des mouvements de libération qui, pour réussir leur adaptation, ont jeté aux orties bon nombre d’attributs ou d’idéologies qui font polémique.

C’est le cas par exemple du Fatah de Yasser Arafat qui a enlevé de sa charte la disposition appelant à jeter les Israéliens à la mer. Et cela pour être en phase avec la dynamique de paix enclenchée par les accords de paix d’Oslo. Jacob Zuma devrait s’en inspirer pour ne pas créer des tensions inutiles dans un pays qui va abriter en juin prochain la Coupe du monde de football. L’apartheid à rebours n’est pas ce qu’il faut montrer ni à cette grande occasion ni à n’importe quel moment. « Tuer l’homme blanc » n’est pas ce qui va améliorer le quotidien de la majorité des Noirs en proie à la misère, aux maladies et à l’insécurité. Le bras de fer n’a pas lieu d’être, à moins que l’objectif des dirigeants soit de détourner l’attention du peuple de ses préoccupations essentielles. Il faut "quitter dans ça", comme le diraient nos voisins Ivoiriens.

Séni DABO

Le Pays

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