On semble avoir résolument opté pour la solution du black out, au sujet de cette affaire qui, pourtant, concerne au plus haut point le citoyen nigérian. Car, après tout, c’est de l’état de santé de son président qu’il s’agit et il est tout simplement normal qu’on lui dise la vérité à ce sujet. Les Nigérians l’auront d’ailleurs bien compris. Sevrés d’images, de déclarations et d’informations officielles sur l’état réel de la santé de leur président, ils se confectionnent leurs propres versions des faits et s’en tiennent là. Ainsi, pour certains, le retour de Yar’Adua que le gouvernement avait annoncé en grande pompe, n’aurait été qu’une piteuse fiction qui, désormais, ne trompe plus personne, puisque démentie par les faits. Pour d’autres, les plus optimistes, Yar’Adua serait bel et bien rentré au Nigéria, mais en si mauvais état qu’il vivrait interné dans une ambulance médicalisée. Pour d’autres encore, le premier des Nigérians serait tout simplement en salle de soins intensifs au palais présidentiel d’Abuja. En tout état de cause, peu de Nigérians, à l’heure actuelle, brillent par leur optimisme lorsqu’on envisage la perspective de revoir Yar’Adua vivant.

Quelle ironie du sort que cet attachement irraisonné au flou sur l’état de santé d’un homme que tout le monde se plaisait à présenter comme le modèle de l’intégrité et de la transparence même. Mais au fait, pourquoi ? Qui s’échine à faire mystère de l’état de santé réel du président nigérian ? Et à quelle fin ? Des hommes politiques, sans doute. De ses partisans inconditionnels prêts à tout pour revoir un « ami » réinstallé au pouvoir, sans doute. Mais qui qu’ils soient, ils rendent un bien mauvais service à un Yar’Adua déjà fort épuisé par la maladie qui le ronge et qui aurait sans doute souhaité moins de chahuts autour de sa personne, ne serait-ce que pour mieux "récupérer". Mais ils rendent également le même mauvais service à un Nigéria jadis connu pour son fair-play politique et qui se trouve aujourd’hui pris en otage, voit ses institutions grippées, et son lustre d’antan s’assombrir chaque jour un peu plus.

Une éclaircie cependant entretient l’espoir. Il est prévu que mercredi, lors du conseil des ministres, la délégation qui avait été envoyée au chevet de Yar’Adua alors hospitalisé à Djeddah, présente son rapport de mission. Reste à savoir s’il sera suffisant pour calmer certaines interrogations et dissiper moult inquiétudes du reste légitimes. Mais on se demande tout de même pourquoi un tel acharnement à faire compliqué lorsqu’il est possible de faire simple. Si Yar’Adua est bel et bien présent à Abuja, une photo, une image, le son de sa voix …et toutes les supputations s’effondrent. Tant de cachotteries et de chemins détournés peuvent à vrai dire, signifier qu’il y a réellement « quelque chose ». Reste à savoir quoi.

Par Jean Claude KONGO

Le Pays