LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

<I>Le Pays</I> : Le Président du CSI impressionné

Publié le vendredi 23 juillet 2004 à 11h21min

PARTAGER :                          

Les Editions "Le Pays" ont été honorées hier, 22 juillet 2004,
par la visite du Président du Conseil supérieur de l’information
(CSI), Luc Adolphe Tiao. Ce professionnel de la communication,
très attaché aux valeurs de la profession, a tenu à venir voir les
nouvelles installations de votre organe de presse qui siège
dans ses nouveaux locaux aux 1200 Logements depuis octobre
2003.

Accueilli par le Directeur général des Editions "Le Pays",
Boureima Jérémie Sigué et la hiérarchie de la rédaction, Luc
Tiao a visité les locaux de l’entreprise et dit avoir été
impressionné par le cadre dans lequel évolue le personnel du
"Pays".

Le Directeur général des Editions "Le Pays" a tenu, après cette
visite, dans la salle de rédaction, à remercier le Président du
CSI qui visitait pour la deuxième fois le journal. La première fois,
c’était à l’ancien siège, à Koulouba. Pour Boureima Jérémie
Sigué, cette visite constitue un soutien moral et un signe
d’encouragement dont "on attend toujours du Président du CSI".
Il a requis l’indulgence de ce dernier car, dans la vie du journal, il
peut y avoir eu de petits dérapages sur le plan déontologique".

L’occasion faisant le larron, les journalistes de votre quotidien
n’ont pas voulu laisser repartir de sitôt l’hôte d’un jour. En effet,
après avoir signé le livre d’or du journal (voir encadré), Luc
Adolphe Tiao s’est prêté aux questions des journalistes. Bilan à
la tête du CSI, convention collective, journaliste sénégalais
emprisonné, solidarité dans la profession ... tels sont entre
autres les sujets abordés. Lisons !

"Le Pays" : Le CSI s’élève contre certaines images publiées par
la presse écrite, mais semble ne rien dire sur des images
choquantes diffusées par la télévision. N’y a -t-il pas une
discrimination ?

Luc Adolphe TIAO (Président CSI) : L’exploitation des images au
niveau de la télévision nationale pose quelques petits
problèmes surtout sur les images qui nous viennent de
l’extérieur. La recommandation que nous avons prise pour
restreindre la diffusion des images choquantes traduit notre
souci de protéger le citoyen burkinabè, pour ce qui est des
images nationales. C’est faire en sorte qu’un citoyen ne
découvre pas son parent décapité, à la une d’un journal. Par
rapport aux images internationales, nous avons déjà attiré
l’attention de la Télévision là-dessus. Tant que certaines
images ne nous concernent pas directement, notre souhait
aurait été que la Télévision nationale les filtre. On est
quand-même content de ne pas voir chaque fois à la Une d’un
journal, des images choquantes.

Quel bilan faites-vous de votre action à la tête du CSI quand on
sait que votre mandat tire vers sa fin.

Nous avons essayé autant que possible de remplir notre
mission conformément à la loi et nous nous réjouissons de
constater que durant les 3 ans de notre mandat, notre rôle n’a
pas été fondamentalement remis en cause. Au contraire, je me
félicite d’avoir le soutien de la plupart des confrères. On a
progressé dans le domaine de la régulation. Nous allons
continuer à le faire. Il y a quand même une préoccupation qui
est la mienne, le projet-collège. Continuer de faire en sorte
qu’on critique le professionnalisme dans les médias privés,
notamment dans les journaux. Dans ce sens, nous prévoyons
d’organiser courant septembre, une concertation avec les
différents responsables de médias (privés et publics) sur la
question du professionnalisme, de l’éthique et de la déontologie
de l’information. Au même moment que l’espace de liberté
s’élargit, il faut aussi que les journaux prennent également
conscience de l’importance de leur responsabilité. Quand on
voit ce qui se passe un peu partout en Afrique aujourd’hui,
malheureusement la liberté de la presse est plus ou moins
menacée dans certains pays. Des journalistes sont interpellés,
emprisonnés... Quelque part il y a des raisons qui peuvent
justifier cela. Nous ne souhaitons pas que cela arrive au
Burkina. C’est normal qu’on fasse des erreurs quand on pose
des actes. Et on ne peut pas s’attendre qu’un journal publie
régulièrement des informations sans en commettre ; c’est
impossible ! Mais je pense que les erreurs peuvent être évitées
si un minimum de précautions est pris. Nous devrons réfléchir
là-dessus pour que nous ayons toujours une presse très
professionnelle, une presse crédible qui respecte les principes
fondamentaux d’éthique et de déontologie. C’est notre
préoccupation. Nous croyons que sur le plan de la liberté, il y a
quand même des efforts qui sont faits et je crois qu’il faut
encourager les autorités à élargir cet espace de liberté à travers
les conditions d’évolution des médias. Il faudra que l’Etat trouve
les moyens d’alléger certaines charges qui pèsent sur les
médias privés et les empêchent de se développer. Si on doit
professionnaliser la presse, il faut lui offrir des conditions de
travail propice. Je sais que beaucoup de journaux, de radios
privées sont confrontés à d’énormes problèmes en matière
d’approvisionnement de matériel, en matière d’impôts, de taxes.
Dans ce sens, il faut qu’il y ait une politique volontariste pour
permettre aux médias de travailler dans certaines conditions.
C’est l’effort que l’Etat doit accepter se consentir.

Quel commentaire faites-vous en tant que professionnel, de
l’emprisonnement du confrère sénégalais ?

Je crois que, comme on le dit dans le domaine du droit, la
détention devrait être une exception et la liberté, la règle. En tant
que journaliste, je suis peiné lorsqu’un confrère est
emprisonné pour avoir défendu des idées. En définitive, on
peut assimiler cet emprisonnement à une punition politique. Je
suis mal placé pour donner des leçons au Sénégal, un pays qui
a montré l’exemple en matière de professionnalisme, en
matière de liberté de la presse. Je souhaite simplement que cet
incident malheureux puisse rapidement trouver une solution afin
que le Sénégal offre toujours au monde entier, à l’Afrique en
particulier l’image de ce pays respectueux de la liberté de la
presse et de la protection des journalistes. Aussi, cette situation
interpelle-t-elle les professionnels parce que les journalistes
ne sont pas au dessus de la loi. Dans ce sens, lorsque des
fautes sont commises, il faut que les journalistes se disent que
les autorités ou les citoyens sont également dans leur droit de
chercher à faire justice. Je pense que de part et d’autre, chacun
doit prendre ses responsabilités dans des situations pareilles.

Ce qu’on a vu comme mobilisation de la part des sénégalais
pour obtenir la libération de leur confrère dénote d’une certaine
solidarité malheureusement absente au Burkina. Qu’en
pensez-vous ?

Vous soulignez là l’une des faiblesses de la presse burkinabè :
c’est le manque de solidarité qui s’exprime à travers tout. Je
crois que ce métier est par nature très corporatiste, très
solidaire parce que sans cette solidarité, il est impossible de
faire avancer la liberté de la presse. Au-delà des querelles de
chapelle, de personnes, il faut qu’il y ait une solidarité agissante
à tous les niveaux. Je constate malheureusement que cette
solidarité n’est pas forte. J’espère qu’avec la mise en place de
l’ONAP -je salue au passage monsieur Sigué pour avoir eu
l’ingéniosité de jeter les fondements de cette structure - autour
de l’AJB, il est nécessaire de se réorganiser pour que cette
solidarité devienne concrète.
J’écoutais un homme politique sur une radio qui disait que
l’opposition burkinabè souffrait d’une espèce d’infantilisme
politique. Je dirais qu’au niveau de la presse, il y a
malheureusement la politique qui semble avoir pris le dessus
sur le professionnalisme. Il y a des journalistes qui réagissent
en fonction de leur obédience politique. Ce qui fait que quand
vous êtes dans un camp, quand vous jouez pratiquement le rôle
de parti de l’opposition ou de parti au pouvoir, la solidarité ne
peut pas triompher. J’appelle tous les responsables
d’associations de médias, les responsables de médias
eux-mêmes à faire en sorte que cette solidarité puisse jouer
pleinement. On constate qu’ailleurs, elle se manifeste. La jeune
génération des journalistes qui est sur le terrain devrait travailler
à ce que cette solidarité soit réellement agissante.

Où se place le CSI dans le cadre de la convention collective qui
est en gestation ?

Nous, en tant qu’instance de régulation, notre vision consiste à
nous assurer que les journalistes travaillent dans de bonnes
conditions. Lorsqu’ils travaillent dans de bonnes conditions,
cela leur évite les fautes qui peuvent survenir du fait de leur
profession. Dans ce sens, dès notre arrivée, nous avons
soutenu la rédaction de cette convention collective. Il faut qu’on
se comprenne très bien. La convention collective ne peut pas
être imposée par l’Etat. Il appartient aux professionnels
eux-mêmes et à leurs patrons de savoir, autour d’une
concertation, ce qu’ils veulent mettre dans une convention
collective et qui tienne compte des réalités du minimum de
développement des médias au Burkina Faso. C’est un
document qui me paraît important et urgent. Cela éviterait
beaucoup de problèmes que nous constatons
malheureusement aujourd’hui. Certains disent chercher leurs
intérêts et ne se sentent pas liés à un journal comme il y a des
patrons qui semblent fermer les yeux sur les conditions de vie
de leurs employés.La convention collective me parait
indispensable. Si la solidarité dont on a parlé existait, cette
question de la convention collective allait être résolue depuis
longtemps. Je souhaite vivement que ce dossier puisse
véritablement avancer. L’actuel ministre de l’Information est en
train de travailler dans ce sens, mais il revient avant tout aux
médias d’asseoir les points essentiels de cette convention.

ENCADRE

Voici ce que le Président du CSI a écrit dans le livre d’or du
journal.

"La présente visite que j’ai effectuée dans les nouveaux locaux
des Editions "Le Pays" traduit tout l’intérêt que je porte aux
conditions matérielles de travail des agents de la presse. Dans
ce sens, j’adresse toutes mes félicitations au
Président-Directeur Général de l’entreprise pour cette belle
réalisation qui fait la fierté du monde de la presse privée
burkinabè.
J’ai trouvé un siège très opérationnel, bien équipé, je souhaite
que dans ce cadre agréable de travail, les Editions "Le Pays"
continuent à jouer leur rôle dans l’information des citoyens.
Bon courage à toute l’équipe !"

Luc Adolphe TIAO,
Président du CSI

Alexandre Le Grand ROUAMBA
Le Pays

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique