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Exploitation minière en Afrique : Sur les traces de l’argent de l’uranium nigérien

Publié le lundi 31 août 2009 à 03h14min

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Un voyage de presse organisé du 1er au 5 juillet 2009 par le groupe AREVA au nord du Niger (Agadez, Imouraren et Arlit), au cœur de l’uranium nigérien a permis de découvrir les activités des compagnies minières et leurs impacts sur les populations des communes voisines. Une lueur d’espoir se lève quelque part dans le Sahara.

Imouraren, à environ 1000 km au nord de Niamey, pourrait devenir le futur Eldorado du Niger. Ils ne sont pas nombreux pour l’instant, les Nigériens à même de situer cette région sur une carte. C’est là pourtant que se joue l’avenir de leur développement à travers l’uranium, l’un des plus importants gisements du monde.

Le site minier d’Imouraren situé en plein désert n’est actuellement qu’une étendue de sable blanc à perte de vue d’où se dégage une forte chaleur. Seule la présence de quelques arbustes et de quelques foreurs à la recherche d’eau rappelle qu’il y a vie dans cette partie du pays du président Tanja. Mais, même si le sol semble austère, le sous-sol quant à lui, regorge d’un minerai précieux : l’uranium. Le gisement d’Imouraren occupe un espace de 8 km de longueur sur 2 km de largeur. La matière précieuse se trouve à 150 m de profondeur. L’exploitation de la future mine va durer 40 ans. La production est estimée à un peu moins de 5000 tonnes (t) par an. Avec Imouraren, la production d’uranium du Niger sera multipliée par deux et atteindra 8000 t par an. Le Niger devient ainsi le deuxième producteur d’uranium au monde. Le projet nécessite un investissement de plus d’un milliard d’euro, (soit plus de 655 milliards de FCFA) dès les premières années d’exploitation. Selon le directeur du développement durable et de la communication du groupe AREVA-Niger, Moussa Souley : “Il s’agit du plus grand projet industriel minier jamais envisagé au Niger et en Afrique de l’Ouest”.

La pose de la première pierre du complexe industriel et minier d’Imouraren par le président Mamadou Tanja, a eu lieu le 4 mai 2009. Cette première pierre, un très gros bloc de granite lisse et luisant est à l’image de ce projet pharaonique. Dans cet endroit désertique seront construits d’ici à 2011 les infrastructures suivantes : une usine de traitement du minerai, une unité de production d’acide sulfurique, diverses installations industrielles, une base vie, des routes, une piste d’atterrissage,…Il est également prévu un lotissement pour les familles. Depuis 2006, environ 200 personnes (militaires y compris) vivent sur le site. L’extraction du minerai est prévue vers la fin 2010, début 2011. En attendant, les deux autres sociétés d’exploitation d’uranium du groupe français AREVA au Niger tournent en plein régime. La première unité d’extraction, la Société des mines de l’Aïr (SOMAÏR) est entrée en production depuis 1971.

Elle exploite plusieurs gisements à proximité d’Arlit. Elle a produit depuis sa création plus de 40 000 t d’uranium à partir de mines exploitées à ciel ouvert. Sa production actuelle est de 1750 t par an. La deuxième société, la Compagnie minière d’Akouta (COMINAK), existe depuis 1978. Elle a produit à ce jour, 48.000 t d’uranium. Les gisements sont exploités en souterrain. La production actuelle de la COMINAK est de 2 000t par an… Le groupe AREVA attend l’octroi de cinq nouveaux permis d’exploration pour des sites promoteurs. La bordure ouest du massif de l’Aïr est l’une des plus importantes provinces uranifères du monde.
Outre l’exploitation du minerai, le groupe Areva Niger, entreprend des actions de développement et de solidarité, dans le cadre d’un partenariat avec les autorités nationales, régionales, locales et les populations.

Un souci du bien-être humain

Depuis l’année 2006, le groupe intensifie sa politique en faveur du bien-être des populations vivant dans les zones proches des mines. Cette option de la compagnie minière est saluée par les autorités locales. En 2008, les compagnies minières du groupe AREVA ont donné 500 millions à l’ensemble des localités relevant du département d’Arlit. Pour le préfet d’Arlit, “cet argent est utilisé avec l’accord d’AREVA”. Aussi, ajoute-t-il, “les domaines d’intervention de Areva cadrent avec les attentes des populations”. Le préfet d’Arlit regrette cependant une chose : “le décaissement de l’argent se fait selon les procédures d’AREVA. Et ça traîne”. La manne financière destinée au bien-être des populations est gérée par un comité regroupant les maires et les représentants du groupe AREVA. Dans le département d’Arlit, l’argent que le groupe français met à la disposition des communes a servi entre autres à la réhabilitation et la construction de salles de classes pour écoles et collèges, la construction et l’équipement d’une bibliothèque communale, la construction de la mairie, l’agrandissement de la maison des jeunes, la construction d’un stade, un parc pour les gros porteurs, etc.

Le groupe a également signé une convention avec le ministère en charge de l’Enseignement et celui chargé des Mines pour l’octroi de bourses d’excellence aux étudiants nigériens. Ainsi, soixante-cinq ingénieurs et techniciens de niveau Bac + 5 et Bac + 3 bénéficient d’un programme de formation dans les domaines des mines, de la géologie, du traitement de minerai, de l’environnement, et du génie civil. Aussi, les filiales du groupe (COMINAK et SOMAÏR), ont mis en place depuis plusieurs années un programme de santé, de distribution d’eau potable et d’électricité. L’hôpital de COMINAK visité le 2 juillet dernier est un ouvrage moderne doté de matériel de pointe. A en croire le personnel de santé, le plateau technique pour le service de traitement des pathologies dentaires est “unique dans la sous-région”. L’hôpital compte plusieurs services : médecine, maternité, pédiatrie, laboratoire, pharmacie, radiologie, chirurgie, ORL, etc. Toutes les salles sont climatisées.

L’hôpital est ouvert à tout le monde : le personnel de la compagnie minière et les populations des communes environnantes. Les consultations et les soins sont gratuits pour tous sans distinction aucune. Par ailleurs, le groupe envisage la construction de petits barrages dans les cours d’eau asséchés de la bordure ouest de l’Aïr.
Ces retenues d’eau vont contenir les eaux de pluie et permettre une meilleure recharge des nappes sous terraines. Afin de lutter contre l’insécurité alimentaire, il est prévu pour les années à venir, l’extension des surfaces cultivables par l’irrigation. La contribution attendue du groupe est de 11,4 milliard F CFA. Bien que déterminé à œuvrer à l’amélioration des conditions de vie des populations, AREVA veut cependant éviter “l’assistanat systématique”. La philosophie du groupe selon M. Moussa Souley s’est d’aider les populations à se prendre en charge.

La société civile maintient son courroux

Les réalisations du groupe français au profit des populations du Niger sont jugés “très insuffisantes” par certaines associations de la société civile. Les acteurs ayant pris part à la tournée ne décolèrent pas. Pour eux, après plus de 40 ans de présence au Niger, le groupe AREVA n’a rien réalisé pour le bonheur des populations. Sont de ceux là, Mahanane Goungun, de la radio FM Ikokane d’Arlit. Pour lui, “après 40 ans d’exploitation, il, est difficile d’admettre qu’une ville comme Arlit n’a pas de routes bitumées, que les populations ne bénéficient toujours pas d’électricité et en sont à la lampe tempête…” Et M. Mahamane d’ajouter : “C’est vraiment choquant”. En dehors de l’électricité, la ville d’Arlit est également confrontée à un manque crucial d’eau. Selon un habitant de la localité, “les femmes passent des nuits blanches dans l’espoir de recueillir quelques gouttes d’eau au niveau des bornes fontaines”.

En attendant le bitumage des voies, la société minière procède à l’arrosage des voies régulièrement empruntées par les véhicules afin d’éviter la poussière. Mais cette solution est jugée “inefficace” par un habitant de la ville. Pour lui, “vu la très forte chaleur, l’eau versée sur les routes s’assèche très vite”. Pendant que la société civile se plaint, les premiers responsables du groupe AREVA affirment vouloir travailler pour le bien-être des populations du Niger. Le directeur de l’intégration dans les territoires, Ahjira Salifou souligne que l’action du groupe ne consiste pas à exploiter les richesses du pays au détriment des populations : “la compagnie œuvre à s’intégrer dans le territoire sur lequel elle mène ses activités. De ce fait, réaliser des actions sociétales au profit des populations fait partie de la responsabilité du groupe”. Pour lui, de nombreuses actions sont menées dans des secteurs tels que l’éducation, la santé, l’eau potable, les activités génératrices de revenues pour les femmes… En deux ans, révèle-t-il, la compagnie a injecté 334 millions FCFA dans l’éducation, 50 millions dans l’eau potable... “Les populations définissent leurs priorités et nous apportons le financement”.

Mais sur le terrain, AREVA se trouve confronté à une difficulté majeure : “Les communes sont très jeunes et manquent de capacités d’absorption des fonds que nous mettons à leur disposition…Jusqu’à présent le budget de 2007 que nous avons alloué aux communes n’a pas encore été dépensé” souligne Ahjira Salifou. De l’avis du directeur de l’intégration dans les territoires, le groupe à l’heure actuelle envisage des voies et moyens pour renforcer les capacités des communes. Revenant sur les critiques de la société civile, il a répondu que “la critique est facile”. Et d’ajouter : “si la capacité d’absorption des fonds par les communes s’accroît, notre apport va également s’accroître”.
En attendant le groupe annonce qu’il est le partenaire financier d’un ambitieux projet d’électrification de la ville d’Arlit dont bénéficieront près de 50000 personnes. L’exploitation de l’uranium représente un tiers des exportations du Niger (plus de 190 millions d’euros en 2007), 5% du Produit intérieur brut (PIB) du pays et 5% des recettes fiscales nigériennes.

Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA : (rabankhi@yahoo.fr)
Envoyé spécial au Niger

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 31 août 2009 à 09:57 En réponse à : Exploitation minière en Afrique : Sur les traces de l’argent de l’uranium nigérien

    La capacit d’absorption des communes restera toujours faible si les procédures sont complexes.On justifiera toujours la bonne gouvernance pour justifier ces procédures.
    Toutefois, je voudrais dire que cela est très insuffisant compte tenu de la présence depuis 40 ans de AREVA ; elle pourrait au moins dire ce que cela lui apporte en bénéfice car si les réalisations se chiffrent en millions de francs CFA, il va s’en dire que les commissions elle s’évaluent en milliards de FCFA sinon comment comprendre le silence des gouvernants qui n’ont pour seules ambition de finir leurs chantiers propres.Vivement que la désobéissance civile...

  • Le 31 août 2009 à 12:03, par TK En réponse à : Exploitation minière en Afrique : Sur les traces de l’argent de l’uranium nigérien

    Je ne connais pas les details du contrat qui lie AREVA au Niger mais ne serait ce pas illusoire de penser que c’est a AAREVA une societe qui fait du business de developper les regions dans lesquelles elle intervient. Que Fait L’Etat nigerien de l’argent qu’il recoit de AREVA que ce soit sous forme d’impot direct ou de royalties.
    Je trouve quand meme exagere que l’on s’attende que AREVA, bitume les routes, construise, les ecoles, les centres de sante, hopitaux, fasse des lotissements, construise des retenues d’eau et de forages etc. AREVA se substituera a ce rythme la au gouvernement.
    Merci de me rassurer si quelqun d’autre a de meilleures informations

  • Le 31 août 2009 à 13:55 En réponse à : Exploitation minière en Afrique : Sur les traces de l’argent de l’uranium nigérien

    Que dit notre frere Zephirin Diabré, lui qui fut le "Monsieur Afrique" de Areva et a mis en place si efficacement la politique de Areva en Afrique ?
    Mahdou

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