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Gare ferroviaire de Bobo : Un marché florissant

Publié le jeudi 15 juillet 2004 à 08h20min

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Cela fait plus de quatre mois que le trafic ferroviaire a repris entre la Cote d’ivoire et le Burkina.

Trois fois par semaine, le train Express ou train voyageurs assure la liaison entre les deux pays avec à son bord des passagers, mais aussi d’énormes quantités de marchandises convoyées par des commerçants.

Et à chaque arrivée du train en provenance de Treichville, la place Tiéfo-Amoro ou place de la gare se transforme en un gigantesque marché qui ne dure que quelques heures, mais qui constitue désormais l’un des principaux centres d’affaires de la ville de Sya.

Ce dimanche 11 juillet, il avait plu durant toute la matinée, et l’atmosphère était presque glaciale en ce début d’après-midi lorsque la pluie venait à peine de s’estomper.

Tout le monde, ou presque, supportait difficilement cette baisse vertigineuse de température, qui contribuera à instaurer un climat de morosité dans la ville, où les rues sont longtemps restées désertes et la plupart des commerces, fermés. Paradoxalement, l’ambiance était électrique à la place de la gare, qui grouillait de monde.

Et comme tous les dimanches depuis la reprise du trafic ferroviaire, ils sont toujours nombreux à attendre avec beaucoup d’impatience le train Express, dont l’arrivée en gare de Bobo mobilise régulièrement les taximen, les charretiers, les commerçants et autres acheteurs, qui espèrent à chaque fois réaliser de bonnes affaires.

Au nombre des passagers qui embarquent dans le train depuis Abidjan, beaucoup de commerçants burkinabè et ivoiriens qui importent vers notre pays des produits tels que l’attiéké, les pommes, les avocats, les noix de palme, les ananas, la cola etc.

Ces marchandises, qui sont très prisées au Burkina, s’écoulent facilement sur le marché et beaucoup de ces importateurs, essentiellement constitués de femmes, n’hésitent pas à en transporter d’importantes quantités. Oumar Kébé, l’un des rares hommes dans le circuit, s’intéresse particulièrement au commerce de l’attiéké.

Il dit avoir des fournisseurs en Côte d’ivoire, qui lui expédient plus d’une vingtaine de sacs par voyage. Ce qui représente environ deux cent cinquante mille francs CFA (250 000) qu’il se doit de reverser avant la prochaine livraison.

Comme lui, bien d’autres commerçants qu’on peut qualifier de grossistes utilisent le même procédé pour ravitailler leurs clients en attiéké. Et le plus intéressant dans cette activité est qu’on est toujours sûr de revendre sur le marché toute la quantité importée si ce n’est déjà fait avant le départ du train d’Abidjan.

Et pour s’en convaincre, ces ruées des femmes autour de ces charrettes remplies de marchandises ; à peine ces chargements ont franchi le quai de la gare, qu’ils font subitement l’objet de toutes sortes de convoitises.

Ce qui est sûr, beaucoup de gens réalisent de très bonnes affaires à la place de la gare, qui est devenue depuis quelque temps un important marché dans la ville, et où la demande semble dépasser l’offre. A preuve il faut souvent batailler ferme pour s’approvisionner selon que l’on soit demi-grossiste, revendeur ou simple consommateur.

Des marchandises de divers horizons

Batogoma Traoré est l’une de ces braves dames qui font régulièrement le trajet Abidjan-Bobo. Pour elle, les activités marchent assez bien avec surtout la complicité de ces revendeurs qui s’installent sur la place Tiéfo-Amoro.

Ainsi, à chaque arrivée du train, il se crée, et de façon spontanée, un marché temporaire qui ne cesse d’attirer du monde. « Nous leur livrons des produits tels que la cola, l’ananas, l’attiéké, l’aloko etc. et à un très bon prix puisque nous les achetons en campagne. Ils se chargent de les revendre sur place avant de nous reverser notre argent après qu’ils ont réalisé de gros bénéfices. Ils ont eux aussi leurs clients constitués de détaillants et de plus en plus des femmes de ménage qui viennent pour faire des provisions », nous a-t-elle confié.

Combien gagnent-ils, ces commerçants voyageurs après un aller-retour entre Abidjan et Bobo ? A cette question, beaucoup d’entre eux sont demeurés perplexes, estimant néanmoins pour la plupart qu’ils ne sont pas mécontents de ce que leur rapporte leur activité.

Cela suppose que les activités commerciales sur l’axe ferroviaire entre la Côte d’Ivoire et le Burkina restent profitables à bien de gens, et principalement à cette cinquantaine de commerçants voyageurs dont les chiffres d’affaires, selon toute vraisemblance, varient entre deux cent cinquante mille CFA (250 000) et dix millions de francs cfa (10 000 000).

Le volume des importations, souvent si important, nécessite de ces commerçants des actions collectives pour la location des wagons. Outre les produits d’origine ivoirienne, certains voyageurs acheminent depuis les bords de la lagune Ebrié vers notre pays des marchandises en provenance de la France, du Magrheb ou d’Afrique du Sud.

Sur le quai de la gare, nous avons pu constater, en effet, des emballages et des cartons avec la mention South Africa, ou encore fruits du Maroc. Ils sont encore très peu à exercer dans ce domaine, où les partenaires se comptent sur les bouts des doigts.

Sanata Zouré, qui dit n’avoir que les Siro-Libanais comme principaux clients, importe des oranges marocaines, des carottes, des raisins, des pommes de France et bien d’autres choses encore destinées à l’approvisionnement des supermarchés à Ouaga et Bobo.

Le moins que l’on puisse dire est que l’axe ferroviaire Abidjan - Bobo ressemble actuellement à une mine d’or qu’exploitent judicieusement ces nombreux commerçants voyageurs qui font le plein de marchandises vers le Burkina et repartent allègrement de Bobo avec des produits tels que les tissus, les bogolans, du bissap des légumes etc. Et tout cela sans la moindre tracasserie policière selon des passagers qui disent aujourd’hui voyager en toute quiétude.

Vivement, la paix en Côte d’Ivoire

Cette grande affluence que l’on constate à la place Tiéfo-Amoro, et le volume des échanges qui s’y déroulent en l’espace de quelques heures témoignent de la nécessité du trafic commercial entre les deux pays. Ce marché temporaire et florissant auquel l’on assiste à chaque arrivée du train Express à Bobo-Dioulasso constitue à coup sûr le symbole de l’interdépendance entre Ivoiriens et Burkinabè, qui condamnés aussi bien par l’histoire et la géographie à vivre en symbiose.

Dans tous les cas, de nombreux commerçants voyageurs fondent beaucoup d’espoirs sur cet axe, et cette reprise des activités ferroviaires entre les deux pays reste à tout point de vue salutaire pour les populations. Et le souhait des uns et des autres est que la paix s’installe définitivement en Cote d’Ivoire où l’incertitude qui règne depuis longtemps oblige certains convoyeurs à prendre les dispositions pour parer à toute éventualité.

"C’est toujours la peur au ventre que nous quittons la Côte d’Ivoire, parce qu’avec le climat qui prévaut là-bas, les choses peuvent dégénérer à tout moment. Ce qui fait que nous prenons toujours le soin de prodiguer des conseils à nos familles respectives, qui peuvent nous joindre au Burkina au cas où... Mais nous espérons qu’il y aura plus de peur que de mal", nous ont confié de jeunes commerçants.

Et à les entendre parler, Il y aurait toujours des potentialités à exploiter sur ce tronçon, mais en l’état actuel des choses, il serait hasardeux de prendre des risques, disent ils. Alors vivement, que la paix revienne en Côte d’Ivoire !

Jonas Appolinaire Kaboré ,
L’Observateur Paalga

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