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Campagne cotonnière 2004-2005 : 25 milliards pour régler les fournisseurs d’intrants

Publié le mardi 13 juillet 2004 à 08h18min

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La Société des fibres textiles du Burkina (SOFITEX) a signé le mercredi 7 juillet 2004 à Paris une convention de financement avec un pool bancaire international conduit par le franco-anglais HSBC-CCF.

D’un montant de 38 millions d’euros, soit la contre valeur de 25 milliards de francs CFA, cette enveloppe servira à régler les fournisseurs en intrants utilisés pour les récoltes à venir.

Il y avait foule en cette matinée du mercredi 7 juillet 2004 au 159 boulevard Hansmann où l’ambassade du Burkina à Paris a établi ses pénates.

Au 7e étage de l’immeuble, le directeur général de la SOFITEX, Tiendrébéogo Tiraogo Célestin, affectueusement appelé TTC, et ses banquiers amenés par Jean-François Lambert, responsable du service des financements internationaux au groupe HSBC-CCF, dès 10 heures 30, ont commencé à parapher les documents qui passent de main à main sous le regard de l’ambassadeur Filippe Sawadogo et d’Oumar Sonny, le directeur des finances, de la comptabilité et du budget de la SOFITEX, le DFCB comme ils l’appellent à Bobo.

La cérémonie officielle, elle, est prévue pour 11 heures 5 étages en-dessous et la salle des fêtes, au 2e, commençait à se remplir au rythme du balafon, c’est-à-dire soutenu. Le ministre Benoît Ouattara du Commerce est là.

Il est venu participer, les 5 et 6 juillet, au forum Union européenne/Afrique sur la problématique du coton africain, organisé sur l’initiative du commissaire européen Pascal Lamy, pour essayer d’aider les Africains à mieux écouler vers le Nord leur production d’or blanc, confronté, comme on le sait, aux subventions iniques qu’accordent des pays comme les Etats-Unis ou la Chine à leurs cotonculteurs.

Les ministres Boureima Badini (Justice) et Toundoun Sessouma (Sports et Loisirs), de passage dans la capitale française, ont aussi répondu présent. Et l’entregent du chef de la maison diplomatique burkinabè aidant, quelques-uns de ses collègues ambassadeurs en poste à Paris sont également de la partie. Ainsi des ambassadeurs d’Angola, du Rwanda, du Bénin, du Niger, du Mali, etc.

5 ans d’une confiance réciproque

Rien que du beau monde donc auquel il faut ajouter les banquiers et ceux qui gravitent dans la sphère cotonnière internationale (négociants, fabricants et vendeurs de pesticides, etc.). L’exiguïté de la salle rend l’ambiance encore plus chaleureuse alors que dehors il tombe des hallebardes, une chose qui n’était pas arrivée depuis longtemps à Paris. "C’est vous qui nous avez amené la pluie", disent les parigauds à notre endroit.

Heureux présage donc puisque, dit-on, mariage pluvieux mariage heureux. Cela fait d’ailleurs cinq ans maintenant que le couple SOFITEX-HSBC-CCF et compagnie regarde dans la même direction, comme tous les couples qui veulent aller loin.

C’est en effet la onzième fois depuis 1999 que ladite banque arrange un financement de la compagne cotonnière au Burkina, accompagnant ainsi le plan de relance de la filière, engagé en 1996, et qui a fait passer la production de coton graine de 150 000 tonnes en 1995/1996 à 500 000 tonnes aujourd’hui. Mais en même temps que la production prenait du poids, les besoins de financement, eux aussi, augmentaient.

A côté du pool bancaire national dont le chef de file est BIB du PDG Gaspard Ouédraogo (qui a effectué aussi le déplacement de Paris), la SOFITEX a désormais recours à des établissements financiers internationaux. Pour la présente convention, le crédit est ainsi syndiqué, outre HSBC-CCF, auprès de ING BHF-Bank (germano-hollandaise), KBC Bank N.V (belge), Natexis-Banques(française) et la Société générale (française).

A l’issue du tour de table qui a permis à la SOFITEX de boucler la première partie du financement de sa campagne 2004/2005, c’est une facilité d’un montant global de 38 millions d’euros, soit 25 milliards de nos francs, qui a été arrangé au taux de 5,10% l’an.

Cette enveloppe porte le concours cumulé du pool bancaire international à plus de 350 milliards de francs CFA. Elle est destinée au financement de la campagne coton 2004/2005 en son volet règlement des fournisseurs des intrants (engrais et pesticides) utilisés pour la récolte à venir et pour laquelle on escompte, rappelons-le, 600 000 tonnes. C’est, de l’avis de TTC, qui a tenu à rendre un hommage aux cinq banques, "tous des partenaires fidèles de la première heure", le résultat d’une confiance réciproque et toujours renouvelée.

"Nous sommes désireux de resserrer davantage nos liens", renchérit Jean-François Lambert pour qui "La SOFITEX a atteint un stade de développement conséquent et elle est la société cotonnière africaine la mieux préparée pour affronter les défis à venir". Cette signature de convention intervient d’ailleurs, a-t-il fait remarquer, au moment où la graine de Cancun commence à porter des fruits "même si ça peut paraître très lent".

L’embellie du dernier trimestre 2003

SOFITEX 11, qui vient d’être signé, l’est également après une campagne (2003-2004) marquée par une envolée des cours à la fin du dernier trimestre de 2003, du fait de la forte demande chinoise. Toute chose qui a amélioré la santé financière de la boîte à TTC. De plus, au 30 juin 2004, 82% de la production de fibre avaient été embarqués des différents ports vers les clients consommateurs.

Une vitesse de rotation qui va se traduire par des gains de productivité de 20 francs CFA/kg de fibre sur les frais financiers et les frais de magasinage. "Cette cérémonie nous permet de résorber le surcoût du transport de la fibre vers les ports de Lomé et de Tèma, dû à la crise ivoirienne", confie Célestin Tiendrébéogo, qui a de quoi être satisfait.

Cela d’autant plus que les cotonculteurs auront du beurre sur leurs épinards dans la mesure où le résultat financier de la campagne 2003-2004 autorise la distribution d’une ristourne aux producteurs de 35 francs par kilogramme pour la campagne 2004-2005, ce qui, ajouté au prix plancher de 175 francs, porte le prix d’achat du kilogramme de coton graine à 210 francs.

Du coup, il y a un engouement supplémentaire des producteurs, qui s’est manifesté par les besoins en intrants estimés à plus de 25% par rapport à la précédente campagne. C’est pourquoi la SOFITEX a placé la barre cette année à 600 000 tonnes de coton graine, un objectif qui, s’il était atteint, permettrait de distribuer aux cotonculteurs 120 milliards pour de revenus contre 100 milliards pour la campagne 2003-2004. En 93/94, seulement 13 milliards, si on ose dire, avaient été distribués, soit en une décennie un taux d’accroissement de 750%.

Qui dit mieux pour lutter contre la pauvreté ? un combat mené de front par la SOFITEX ces dix dernières années. On comprend dès lors que le coton n’est pas une simple spéculation pour un pays comme le Burkina, c’est avant tout un problème de développement socio-économique et un puissant moyen de lutte contre la misère, des études menées dans de nombreux pays africains ayant montré que la pauvreté recule plus vite dans les régions cotonnières.

Hélas, prévient le DG de la SOFITEX, l’embellie des cours observée fin 2003 sera de courte durée et les projections pour 2004-2005 ne sont guère réjouissantes sur un marché qui évolue en dents de scie et qu’il faut sans cesse surveiller comme du lait sur le feu.

"Si la tendance actuelle devait se confirmer, c’est la survie de nos filières, déjà fragilisées par les bas cours de la période de 1999-2002, qui est menacée", lâche TTC. Touchons du bois qu’il n’en sera rien, même si ces appréhensions relancent le débat sur les subventions, qui n’est pas près de trouver une issue heureuse pour les pays africains après l’échec de Cancun et les difficultés que rencontrent l’Organisation mondiale du commerce pour remettre en marche la machine de Doha.

Pour certains spécialistes de la question cotonnière, la suppression des subventions est inéluctable, mais cela prendra... 20 ans. Autant dire une éternité si, très rapidement, des mesures conservatoires ne sont pas prises pour combler les pertes de recettes d’exportation qui frappent les pays africains producteurs d’or blanc.

Ousséni Ilboudo(Paris/Ouaga)
L’Observateur

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