Il est 22h 15 quand le présentateur annonce Alif Naaba. La guitare bien tenue, de noir vêtu, la mine en quête de sérénité, l’artiste investit le podium du FEMUA devant près de 35 000 spectateurs. A en juger par les regards et l’air interrogateur des spectateurs, le nom Alif Naaba n’est pas ce qu’il y a de plus connu. Mais nous sommes à Abidjan, capitale du Farot, qui va se négliger ? Et certains comme pour prendre de la distance sur les autres dans le public laissaient entendre « Wè ! je le connais, c’est le chanteur burkinabè qui ne porte pas chaussures-là ! je l’ai vu à l’émission Tempo ce matin ».

Effectivement, Alif Naaba et tous les artistes internationaux invités au festival que sont Didier Awadi du Sénégal, King Mensah du Togo, Yeleen du Burkina, Leslie et Willy Demsey de la France, ont pris part à Tempo, émission de la première chaîne ivoirienne. En ce samedi 11 avril, Alif ouvre le bal des artistes internationaux, après que le public ait été tenu en haleine par des artistes locaux dont Kajeem, rappeur et reggaemaker ivoirien. Le prince de Konkistenga annonce les couleurs avec le titre Sindi qui figure sur son dernier album. Joué en acoustique, cette chanson met en évidence les qualités vocales et les talents de chanteur de l’artiste.

Au fil de la progression de la chanson, le tumulte et l’excitation qui régnaient au sein du public font place à une certaine accalmie. Comme pour saisir les moindres paroles de l’artiste, les spectateurs tendent l’oreille pour écouter ce titre chanté en grande partie dans la langue mooré.
Une fois la chanson terminée, ovation nourrie du public, visage rayonnant de l’artiste. Bon début, belle introduction quand on sait que les mélomanes ivoiriens ont la réputation d’avoir un goût prononcé pour la musique d’ambiance au détriment de la musique d’écoute et autres musiques de chambre.

L’artiste évolue dans toutes tendances musicales avec les titres comme Wend Konté, Sukiiri avant d’entonner des chansons plus rythmées et cadencées comme Coumba, Africa et Minata où crépitements de djembé et autres roulements de batterie tiennent le public dans un état d’euphorie et de quasi transe.

Se sentant désormais en terrain conquis, le prince aux pieds nus invite le public à chanter, à danser et à reprendre certains mouvements avec lui. On pouvait entendre : à la fin de chaque morceau. Les titres comme Baark Biiga, Baoba Wéogo et Daaré viennent tempérer l’effervescence du public pour le plonger dans une sorte de solennité imposée par l’allure lente de ces chansons.

L’on balance les mains de part et d’autre et l’on reprend en chœur, certains couplets à l’invite de l’artiste. Baladant le public tantôt sur des airs doux et langoureux, tantôt sur des rythmes endiablés et cadencés, Alif termine sa prestation avec « Ce soir » un titre très entraînant qui lui a permis de remporter le Kundé de la chanson francophone en 2006. Pendant qu’Alif descend les marches du podium pour rejoindre les coulisses, le public est dans une liesse totale. Bissé ! bissé ! pouvait-on entendre.
Une fois dans les coulisses, il est aussitôt rejoint par les journalistes pour les interviews. La prestation aura tellement marquée les esprits, qu’au lendemain du festival, tous s’accordaient à dire que c’était l’un des plus beaux spectacles.

D’ailleurs, la compagnie de téléphonie mobile KO’Z sponsor officiel du FEMUA, a entamé des négociations avec l’administration de l’artiste pour qu’il prenne part aux festivités de leur deuxième anniversaire. Aussi, Asalfo de Magic System, l’initiateur du FEMUA, projette non seulement de distribuer l’album Wakat à Abidjan mais aussi d’y organiser un concert Alif Naaba et Yeleen au palais de la culture. Espérons que ce soit le début d’une nouvelle ère pour la musique burkinabè en terre éburnéenne où elle n’a que trop duré dans l’ornière !

A la fin du festival, l’artiste a rejoint le Rwanda pour le stage de formation qu’il dispense à des artistes de ce pays. Il a dû l’interrompre pour prendre part au FEMUA qui a été une belle réussite.

Issouf SARE (Collaborateur)

Sidwaya