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Madagascar : A chacun ses assises

Publié le vendredi 3 avril 2009 à 02h00min

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Le 30 mars dernier à Mbabane au Swaziland, lors du sommet de la SADC, les chefs d’Etat ont assis Marc Ravalomanana, le président déchu, dans le fauteuil réservé au chef de l’Etat malgache. « Le pied de nez de Marc », tel était le titre de notre Grille de lecture du 31 mars 2009.

Pour signifier que le syndicat des chefs d’Etat n’avalisait pas le coup de force qui a eu lieu sur la Grande Ile. Emboîtant le pas à l’UA et à toute la communauté internationale, les premiers dirigeants de la SADC considèrent toujours celui qui a battu Didier Ratsiraka en 2001 comme le président légitime de Madagascar.

Mais c’est évident qu’une chose est de se carrer dans un fauteuil lors d’une réunion au sommet en tant que premier magistrat même quand on a perdu le pouvoir, et une autre est de détenir la réalité de la chefferie.

Le précédant d’Ange Félix Patassé est là pour nous le rappeler, l’intéressé, chassé du pouvoir par son chef d’état-major, se considérait toujours depuis son exil togolais comme le président de la Centrafrique ; pure absurdité, puisque Bozizé est là et bien scotché à son fauteuil quand bien même ses adversaires armés font, de temps en temps, le coup de feu contre lui.

A Madagascar, on n’est pas loin de cette réalité : tandis que Ravalomanana, depuis Mbabane, incite ses partisans à occuper les rues et artères de Tana pour maintenir la pression sur les nouveaux dirigeants du pays, le patron de la Haute autorité de transition (HAT) a convoqué des assises nationales pour définir les modalités de la tenue d’élections.

Ouvertes hier par TGV en personne en présence de responsables militaires et religieux, de même que de l’envoyé spécial de l’UA, Ablassé Ouedraogo, et des ambassadeurs du Sénégal, du Maroc et de l’Egypte, ces assises sont censées regrouper tous les protagonistes de la crise. Fausse note, les représentants de l’UE, de la France et des USA étaient aux abonnés absents. Pire, l’un des premiers concernés par ce dialogue intermalgache a boudé la réunion : le parti TIM du président tombé, Marc Ravalomanana.

D’où cette question fondamentale : à quoi serviront ces assises, qui se terminent en principe aujourd’hui 3 avril 2009 ? La réponse ne souffre d’aucune ambigüité : à rien ! En effet, ce dialogue intermalgache, qu’on peut qualifier d’exclusif, a été réalisé pour entériner le pouvoir d’Andry Rajoelina, car de quelle élection peut-on parler lorsqu’on met fin par la force au mandat d’un président démocratiquement élu ?

Quel « processus de démocratisation et de profonds changements », évoque-t-on lorsque, par la rue, un jeune en complicité avec l’armée s’autoproclame chef de l’Etat ? Enfin de qui se moque TGV lorsqu’il clame urbi et orbi qu’il « va bâtir un ordre constitutionnel nouveau » ?

Le patron de la HAT semble frappé de cécité, car c’est le même, avant sa prise du pouvoir, qui a rejeté et ce dialogue et le référendum que proposait Ravalomanana. A présent qu’il tient les rênes du pouvoir, il veut une telle tribune pour se donner un semblant de légitimité.

C’est trop facile, et l’attitude de Marc et de la communauté internationale est à saluer, car, en dépit des subterfuges, l’ex-DJ désormais célèbre de la Grande Ile ne trompe personne : ayant arraché le pouvoir par la force, il est en quête de tous les moyens pour le saupoudrer d’un vernis démocratique en attendant une pantalonnade de la Loi fondamentale pour mieux se carrer dans le fauteuil présidentiel.

Beaucoup le voient donc venir, c’est pourquoi les présentes assises ne serviront à rien, car tout est déjà calé et ceux qui y ont assisté donneront leur quitus à une mascarade concoctée par TGV et ses alliés de circonstance. Et ce sera à chacun ses assises d’autant plus que les partisans de Ravalomanana vont organiser aussi les leurs.

Par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 3 avril 2009 à 13:00, par Olivier RANDRIA En réponse à : Madagascar : A chacun ses assises

    Bonjour,
    Suite à la lecture de votre article que je trouve intéressant concernant la situation à Madagascar, je tiens à apporter quelques explications sur la réalité terrain qui n’est pas forcément connu de tous.
    1 - Ordre constitutionnel :
    Le schéma de la prise de pouvoir d’Andry Rajoelina s’est déjà produit à Madagascar en 1972 lorsque le Président Tsiranana a quitté le pouvoir et nomme un directoire militaire dirigé par le général Ramanantsoa.
    Ce passage de pouvoir a été entériné par la haute cours constitutionnelle.
    Assise nationale :
    L’assise nationale, qui se déroule actuellement est représentée par toutes les forces vives de la nation, y compris le TIM, parti du président déchu. Le président du TIM, Jacques Sylla, ancien premier ministre du président déchu et ancien président de l’assemblée nationale et actuel président du TIM participe à cette assise nationale, ainsi que nombreux députés élus au nom de TIM et nombreux ministres du gouvernement de Ravalomanana.
    Marc Ravalomanana :
    Marc Ravalomanana a été porté au pouvoir par le même procédé, mais aussi par le même peuple. Il a par la suite instauré une dictature, et développe son affaire personnelle. Ainsi, il a déçu le peuple qu’il a porté au pouvoir. Son élection en 2006 est plus que douteuse. Plusieurs prisonniers politiques, l’opposition n’a plus le droit de s’exprimer librement, fermeture de chaine de télévision…. C’est tout cela qui a justement ravivé l’indignation populaire. Le peuple malgache, avec une sagesse exceptionnelle, sait pertinemment que si on attend l’éléction présidentielle en 2012, le pouvoir en place fera beaucoup de dégâts, et avec sa pratique discriminatoire et autoritaire, il sera réélu quitte à faire encore plus de prisonniers politiques, voire des morts. Il est prêt à tout.
    Le peuple Malgache a décidé de mettre fin à son périple. Il a été lâche, non seulement par l’armée, mais aussi par son propre camp.
    Conclusion :
    Le peuple Malgache souhaite maintenant instaurer la démocratie dans son pays qui est choses impossible sans la liberté d’expression. Ainsi, il et mettent en garde les différents prétendants au pouvoir, que l’exercice de cette fonction suprême n’est pas une affaire familiale, et doit respecter la constitution, ainsi que la règle de bonne gouvernance dans le respect de la sagesse Malgache.
    L’Afrique est actuellement bourrée de dictateurs, c’est normale que ses dirigeants ne souhaitent pas que le schéma Malgache ne se reproduise pas dans le continent. Mais je pense très sincèrement que si le peuple d’Afrique peut s’exprimer librement, sur les médias mais aussi dans les urnes, L’Afrique serait différente.

    Olivier RANDRIA

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