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Culture et création : Une certaine vision du développement

Publié le jeudi 5 mars 2009 à 09h42min

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Stefano Manservisi

Je suis toujours frappé lors de mes déplacements en Afrique, aux Caraïbes et au Pacifique par la richesse des cultures, l’énergie créative de la jeunesse, la mode, la musique… J’en ressors souvent avec la conviction que ces pays et notamment en Afrique représentent un gisement d’innovation et de créativité dont le monde pourrait s’inspirer davantage.

Que reste-t-il quand un monde s’écroule ? Sur quelle base reconstruire ? Sur quoi s’appuyer ? Que reste-t-il des civilisations du passé ? De qui se souvient-on ? Des artistes, de l’art des civilisations antiques, de leurs monuments, bientôt du cinéma… Voilà ce qui nous fascine à travers les âges depuis les peintures rupestres jusqu’aux sculptures de Jeff Koons, voilà des langages qui expriment le génie humain. Que l’on pense à l’architecture, à la peinture, à la mode, à la musique, jusqu’au cinéma, on touche des dimensions qui racontent l’homme et ses grandes questions.
Mais au-delà, la culture parle à l’imaginaire. Et ce besoin d’imagination n’est pas l’apanage des plus riches, il touche chaque être humain dans son quotidien. Du griot africain jusqu’à l’industrie cinématographique d’Hollywood, la culture touche l’humain dès lors qu’il a subvenu à ses besoins essentiels. Le rêve reste essentiel à l’homme. De quoi a-t-on besoin alors ? De création donc, aujourd’hui et demain. C’est là une évidence.

A quoi servent culture et création ?
En période de crise, investir dans la culture et la création c’est donc élever nos sociétés, mais c’est aussi produire des richesses. Une richesse intellectuelle, mais aussi une richesse économique car culture et création nécessitent une main d’œuvre. Construire des édifices, tourner des films, jouer de la musique, produire des livres, autant d’activités qui vont au-delà de l’artiste et touchent la société dans son entier.

La culture, c’est le savoir fondé sur des siècles d’expérience, mais la culture c’est aussi le futur, l’ambition de se cultiver, d’apprendre, de connaître, d’évoluer. La culture, c’est un mouvement de soi vers les autres, une dynamique de partage, un ensemble qui s’accroît en permanence et s’enrichit des différences. Elle est antinomique du repli sur soi et de l’enfermement. Une culture repliée sur elle-même n’aurait pas de sens, elle serait vouée à l’oubli et à la disparition par manque d’oxygénation. Oublier la culture, c’est oublier l’humanité, son histoire et le sens même que porte la vie éphémère que nous traversons.

La création quant à elle est la vision d’une génération sur le monde, un mouvement pour imaginer demain. L’innovation créative est d’ailleurs la seule issue d’un monde aux ressources limitées.

Au moment où le monde traverse probablement une des crises économiques les plus graves depuis 80 ans, où des crises alimentaires, climatiques et énergétiques nous rappellent la fragilité de nos modèles de développement, il nous faut reconstruire l’avenir sur quelques idées simples et culture et création en seront le socle et la dynamique à mon sens.

Alors que faire pour avancer ?
S’ouvrir davantage aux idées, coopérer davantage, être plus solidaire, protéger les plus précaires...
L’Union européenne est déjà aujourd’hui le premier donateur mondial en aide au développement au monde avec 48 milliards d’euros en 2006. L’Europe est l’espace le plus solidaire au monde, loin devant les Etats-Unis ou le Japon... Cette aide est apportée sous forme de dons, avec la réalisation notamment de milliers de projets en Afrique, aux Caraïbes et au Pacifique.

On évoque souvent la construction de routes, d’écoles, d’hôpitaux, l’accès à l’eau, les démarches pour la paix et la sécurité qui sont autant de sujets sur lesquels l’Europe vient en aide aux populations les plus pauvres. Mais au-delà de cette aide "classique", l’Union européenne soutient également la culture et la création. J’y veille d’ailleurs personnellement dans mes fonctions.

Nous soutenons notamment financièrement le Fespaco qui montre l’Afrique qui bouge, plus réelle que l’Afrique des vieux stéréotypes. Mais la Commission finance également des projets de formation des acteurs culturels, la production de films en Afrique pour permettre à ses talents de s’exprimer (163 films de 1992 à 2004) et des appuis aux initiatives culturelles. Et ces programmes vont se poursuivre d’ici 2013 que l’on évoque la promotion du patrimoine culturel, des films, des festivals, l’édition, la musique… Au Printemps 2009 (du 1er au 3 avril), la Commission organisera à Bruxelles un colloque international "Culture et création, facteurs de développement " pour identifier de nouvelles idées et échanger avec les professionnels d’Afrique, des Caraïbes, du Pacifique et d’Europe sur ces questions (http://culture-dev.eu). Ce sera aussi l’occasion de faire la promotion d’artistes des Pays ACP qui seront présentés au grand public européen (concerts, festival de cinéma, défilé de mode).

Aujourd’hui il faut réinventer demain, nous aurons besoin de toutes les cultures et de la force créative de tous pour réussir le développement. Tous ensembles, nous devons porter une nouvelle culture du développement pour un meilleur avenir. L’Europe veut porter cette ambition avec ses valeurs de partage, de démocratie et de liberté ; l’Europe restera en tout cas solidaire de ce mouvement pour le développement.

M. Stefano Manservisi
Directeur Général Développement
et Relations avec les Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique
Commission européenne

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