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AFFAIRE HISSEN HABRE : Le Sénégal attend, la Belgique s’impatiente

Publié le lundi 23 février 2009 à 02h13min

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Dans l’affaire Hissen Habré, la compétence universelle finira bien par l’emporter sur les sempiternelles solutions africaines qui versent dans le dilatoire. Lasses d’attendre, les victimes du dictateur ont, en effet, sollicité la Belgique qui est résolue à prendre le relais du Sénégal qui traîne à juger l’ancien chef de l’État tchadien.

En dépit des engagements et du soutien maintes fois affirmés de l’Union africaine (U.A.), rares sont les Africains qui sont convaincus que leurs chefs d’Etat veulent de ce procès. Celui-ci, pour nombre d’entre eux en effet, risque fort d’être un précédent fâcheux. La pression belge se justifie pleinement. Les victimes sont excédées par la tiédeur des tribunaux africains. Plusieurs se lassent des turpitudes de l’UA et des autorités sénégalaises.

Ces dernières, en dépit des multiples professions de foi, semblent privilégier l’appât du gain facile. En s’adressant aux autorités belges, les familles éprouvées usent de leurs droits démocratiques. Et le gouvernement devrait s’exécuter. Mais il exploitera sans doute ses prérogatives internationales. Pas sûr qu’à Bruxelles, on se laissera divertir. En effet, nul ne peut objecter, le principe du jugement étant acquis. Officiellement, tout le monde est favorable à l’idée de juger le dictateur tchadien. L’U.A. a donné son accord, et ne cesse de rappeler qu’il revient au Sénégal d’assurer la tenue du procès. Aux Sénégalais de passer aux actes. Ces derniers posent comme préalable le paiement intégral d’une somme de plusieurs milliards de F CFA pour la tenue de ce procès attendu de tous. Une lutte intense a pourtant été menée jusque-là pour éviter le transfert du procès hors du continent. Aujourd’hui, ce sont les dirigeants africains eux-mêmes qui prêtent le flanc.

Tous ces faits mettent en exergue l’infantilisation de l’Afrique par…les dirigeants du continent eux-mêmes. Ils s’échinent, chaque jour que Dieu fait, à montrer le mépris qu’ils ont à l’égard de leurs propres peuples. Sinon, pourquoi tant de difficultés à juger les actes d’un des fils les plus indignes du continent ? Tout tend à démontrer que l’on ne veut point d’un procès de dirigeant africain. Que de louvoiements et d’atermoiements pour ne pas tenir ce procès qui, assurément, crée un certain malaise. On fait perdre patience aux victimes et aux peuples africains qui font de moins en moins confiance à la justice africaine. D’autant que les exemples abondent quant à la multiplication de procès bâclés ou arrangés au profit des plus riches ou des plus puissants. Dans l’affaire Habré, la politique semble avoir irrémédiablement pris le pas sur le judiciaire. Certes, Abdou Diouf a hébergé Hissen Habré. Mais Wade lui, ne tient sans doute pas à ce qu’il soit jugé sous son mandat.

Ce procès dérange le sommeil des gouvernants du continent. Aussi, chacun y va-t-il de son orgueil blessé. Fort heureusement, les crimes commis sont imprescriptibles. Les chefs d’Etat africains se sont toujours crus au-dessus de la loi. Aujourd’hui, le réveil est brutal : ils réalisent qu’ils sont vulnérables devant les tribunaux à compétence universelle. De peur de s’exposer eux-mêmes, ils ne font pas d’effort véritable pour accélérer le jugement de leur ancien pair. C’est à se demander si ce procès tiendra sa promesse. Parviendra-t-on un jour à rendre justice aux victimes ? Quel sera l’impact réel sur les mœurs politiques ? La catharsis politique est-elle possible ? Quel bénéfice pour le peuple ? En effet, la même logique du pouvoir fondée sur la guerre et ses nombreuses victimes prévaut toujours au Tchad de Déby.

La justice sénégalaise, naguère si réputée, perd de plus en plus de sa crédibilité. Du fait des reports incessants de l’affaire Hissen Habré sur des bases peu convaincantes, l’opinion africaine commence sérieusement à douter de sa réelle indépendance et surtout de sa compétence. Finalement, il apparaît qu’autant les chefs d’Etat du continent maîtrisent le système judiciaire africain, autant ils redoutent la justice internationale dont le contrôle leur échappe. Ce qu’il faut en déduire ? La justice africaine reste tributaire du pouvoir politique et des puissances d’argent qui la manipulent au gré de leurs intérêts. La preuve, les opposants sont jugés promptement, sans aucun respect des règles de l’art, et régulièrement embastillés. Il en est de même des chapardeurs et autres voleurs de poules et de cabris qui croupissent dans les prisons des années durant, dans l’attente d’un jugement hypothétique. Jamais il ne vient à l’esprit de quiconque d’exiger de la communauté internationale le moindre sou pour la tenue de tels procès.

La justice africaine fait ainsi la preuve qu’elle est aux ordres et qu’elle est incapable de venir en aide aux justiciables. Que l’on ne s’étonne guère de voir les Africains se tourner de plus en plus vers l’extérieur pour solliciter de l’aide. Les premiers responsables de nos institutions montrent de plus en plus ouvertement qu’ils ne leur accordent aucun crédit. Qu’adviendra-t-il du dossier de l’ex-chef d’Etat tchadien ? Hissen Habré, aujourd’hui personnage religieux hors du commun au Sénégal, quel rôle véritable joue sa personnalité dans l’évolution du dossier ? De tous les dictateurs vivants, les Africains ne voudront pourtant pas oublier qu’il demeure celui ayant horriblement marqué l’histoire de son pays et du continent : des milliards de F CFA détournés, des dizaines de milliers de morts par suite d’assassinats et de tortures, entre autres.

A-t-on vraiment besoin de tout un cirque pour traduire Hissen Habré devant les tribunaux ? La conscience des pouvoirs africains se trouve aujourd’hui interpellée. Ne pas juger Hissen Habré, c’est faire preuve d’une grave complicité, d’inconséquence, d’immoralité et d’impunité. Le juger, c’est marquer un minimum de respect envers les peuples africains, les victimes en particulier. C’est aussi et surtout admettre qu’un chef d’État, c’est aussi un justiciable. Et si aux termes de la Constitution il est le chef suprême de la magistrature, en aucun cas, il ne doit planer au-dessus de la loi, encore moins disposer du droit de vie et de mort sur la personne du contribuable-électeur.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 23 février 2009 à 17:38, par no one but ourselve can free our mind En réponse à : AFFAIRE HISSEN HABRE : Le Sénégal attend, la Belgique s’impatiente

    Je suis d’accord qu’on juge les dictateurs mais il ne faut pas que ce soit l’occident qui nous dicte encore la conduite a tenir.Je suis desole que jusqu’a present il ya des Africains qui croient toujours que l’occident est le seul recours pour la justice.Depuis quand avez vous deja entendu un ancien president de l’occident traduit en justice pour des crimes commis sous son mendat ? c’est toujours dans les pays les moins developpes qu’on trouve toujours des inconscient qui y prennent l’occident comme model oubliant de ce fait la source meme de leur pauvrete et malheurs sociaux.Ce president Africain qu’on juge aujourd’hui etait une fois l’ami et le protege d’un pays de l’occident.Ouvrons nos yeux et arretons d’etre manipule.Aussi il faudrait que les journalistes commencent vraiment a faire recours a ’histoire pour expliquer et justifier certains conduite en Afrique et dans le monde.Vous Journaliste ne faites pas de comparaisons abusives car meme en Belgique ce ne pas sure que la justice est neutre. Saviez vous combien de gens ont ete victim de la belgique au moment et apres la colonisation (congo).est ce que ces victimes ont eu la justice ;Non.Donc arretons de repeter les memes erreurs qui nous ont divisees.Prenons conscience. On peut bien juger nos dictateurs a notre facons sans faire recours a ceux la meme qui nous ont entraine dans la misere sociale.

    • Le 24 février 2009 à 01:14 En réponse à : AFFAIRE HISSEN HABRE : Le Sénégal attend, la Belgique s’impatiente

      En fin de compte, a force de jouer au "nationaliste", qui est-ce que tu defends ? les dictateurs ou bien les victimes ? Tu es bien du cote des oppresseurs malgre ta tentative de remuer l’ epouvantail colonial. Tout le monde est d’ accord que la plupart de nos dirigeants sont la ou ils sont grace aux puissances coloniales. S’ ils ont tue leur compatriotes, et ils l’ ont fait le plus souvent, meme si leurs gurus decident de les juger, ou est le mal ? Ca se voit que tu es du bon cote, cad, loin de la famille des victimes. Meme si c’est le diable qui doit nous aider a juger ces affreux qui nous dirigent, il faut y aller. Les faux etats d’ame ne marcheront pas.

  • Le 24 février 2009 à 13:07, par franck dit aspirant Barde En réponse à : AFFAIRE HISSEN HABRE : Le Sénégal est unétat souverain et indépandent

    Si le Sénégal abandonne Hissen Habre a la Belgique,qu’il est le courage de remettre leurs indépandence a la France,Que hissen est tué d’autre homme pour son pouvoir c’est hunumain ,et sadique mais que la Belgique se croit plus juste que le Sénégal pour juger Habré c’est ce foutre de l’indépendance des pays d’Afrique ,aprés le Sénégal le Congo etj’en passe.Qui a tuer lummuba ,la prison de Watanamo,le président Habia Rihmana,le défèrlement des armes dans des mains de toute les rebelles d’Afrique ,monsieur de l’Europe regardez vous dans une glassse vous aurez honte ,si vous l’aviez pas pour votre cruoté nogéabon ,laissez a l’Afrique au moins sa dignité.

  • Le 26 février 2009 à 12:33, par fleufleu En réponse à : AFFAIRE HISSEN HABRE : Le Sénégal attend, la Belgique s’impatiente

    Il serait grand temps que l’Afrique noire assume ses responsabilités face à un dictateur criminel qui vit sans difficulté à Dakar, en jugeant H.A.pour ses crimes abominables perpetrés au Tchad.
    C’est honteux pour un pays comme le Sénégal qui a, faut-il le rappeler, ratifier les droits de l’homme et fait fi de sa signature. Comment peut-on accorder de crédibilité à ce pays.

    C’est navrant surtout pour les victimes d’Hissène Habrè et le peuple tchadien dont les maigres économies ont été volées par ce dictateur qui vit depuis 18 ans dans l’aisance à Dakar.

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