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Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

Publié le lundi 16 février 2009 à 18h09min

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Jeanne Traoré, présidente du PAREN

Il y a tout juste 4 mois, le 5 octobre 2008, que Jeanne Traoré a été portée à la tête du Parti de la Renaissance Nationale (PAREN) pour un mandat de trois ans. L’une des rares femmes présidentes d’un parti politique au Burkina Faso est enseignante de formation, inspectrice de l’enseignement secondaire et officie actuellement au Centre International pour l’Education des Femmes et des Filles en Afrique (CIEFFA).

Une forte personnalité, de la sincérité, de l’humilité et même du perfectionnisme, voici quelques trait qui caractérisent cette femme déterminée. Depuis une dizaine d’années qu’elle milite au sein du PAREN, Jeanne TRAORE s’est forgée une expérience qui l’a conduite en octobre dernier à la tête du Parti de la Renaissance Nationale, ce parti qui propose une troisième voie, le "grégarisme africain", un cocktail de libéralisme et de cette solidarité si chère à l’Afrique. Elle est devenue ainsi l’une des très rares femmes présidentes d’un parti politique dans notre pays.

Pourtant, rien ne présageait Jeanne Traoré à une carrière politique si prometteuse. En effet à presque 50 ans, cette native de Dinkiena, un village situé dans la province des Banwa, n’avait jamais rêvé un seul jour militer dans un parti politique, encore moins être la présidente. Elle a eu un cursus scolaire normal marqué par des passages brillants dans des établissements religieux de filles : le Collège de Tounouma et le Collège Notre Dame de Kolog-Naaba où elle s’impliquait déjà dans certaines associations scolaires.

Après l’obtention de son baccalauréat, et malgré sa bourse, elle eu des difficultés à effectuer ses études en économie sociale et familiale. Finalement, elle se retrouve au Benin où la révolution entamée par Mathieu Kérékou suivait son cours. « A l’université nationale du Benin, je ne pouvais plus faire de l’économie sociale et familiale. J’ai donc décidé de m’inscrire en lettres modernes avec l’intention, ma licence en poche, de m’engager dans le journalisme » raconte-t-elle.

Malheureusement pour elle, cette ambition tourne court. En effet lorsque ses camarades béninois lui racontent l’expérience de la révolution béninoise, cela lui enlève toute envie d’être un gratte-papier. Elle se réoriente alors en maîtrise de lettres modernes et revint au pays. « Je suis revenue au pays pendant la révolution et j’ai effectué le service nationale populaire (SNP). Je me suis ensuite présentée au concours d’entrée à la fonction publique où j’ai été admise. » poursuit Mme Traoré. C’est ainsi que débute sa carrière d’enseignante à Ouahigouya.

L’enseignement, le déclic qui l’a menée à la politique

Elle se rappelle de cette période pour laquelle elle a gardé de bons souvenirs même si elle avait quelques appréhensions dues à son manque de formation :« Je n’ai pas été formée à l’époque et j’avais peur de ce qui m’attendait. Finalement, je pense m’en être tirée à bon compte. Souvent je croise certains de mes anciens élèves. La plupart du temps, c’est eux qui me reconnaissent et m’interpellent. Ils me remercient de ce que j’ai fait pour eux. Mais moi je ne pense pas avoir fait grand-chose. Je faisais juste mon job. »

C’est au cours de discussions avec ces élèves qu’elle a fait le constat douloureux du manque de repères solides des jeunes. En effet, explique-t-elle « lors d’une discussion qui tournait autour de la problématique de la corruption, mes élèves m’ont convaincu en m’affirmant que l’honnêteté ne payait pas en ce bas-monde. J’étais dévastée car c’était des élèves de terminale à l’orée de leur engagement professionnel qui tenaient ce langage, l’espoir de demain ».

Face à cette amère réalité, Jeanne Traoré s’est dite qu’il fallait faire quelque chose : « Je me suis dit en tant que formatrice que je devais tout faire pour essayer de changer les choses quel que soit le terrain où j’aurais à mener le combat ».
A partir de cet instant, elle va s’engager dans le mouvement syndical convaincue que c’était le terrain propice pour faire entendre sa voix.

N’étant pas satisfaite de ce moyen de lutte, elle commence dans les années 1998 à s’intéresser aux conférences du professeur Laurent Bado, alors enseignant-chercheur à l’Université de Ouagadougou. A travers les débats, elle sentait que d’autres personnes partageaient ses idées et sa vision. Par la suite et par le biais d’amis, elle apprend que le professeur a fondé un parti, le PAREN. Dès qu’elle fût invitée à venir partager ses idées de façon plus concrète elle n’hésite pas un seul instant. Elle fait alors son entrée dans le milieu politique burkinabè.

Mais pourquoi particulièrement le PAREN ? A la question elle répond sans ambages : « J’ai un profond respect pour les traditions de chez moi. Cela me fend le cœur de savoir que des générations entières sont en train de naître en perdant toute cette culture traditionnelle. Un parti qui met au centre de ses combats la sauvegarde des valeurs traditionnelles et culturelles, j’estime que ce parti rencontre toute mon approbation et je m’y engage sans hésiter. Le PAREN propose un juste-milieu. Le capitalisme est venu saper la solidarité naturelle des africains. Le socialisme tel qu’il a été pratiqué chez les précurseurs a été un échec de même que chez les africains qui l’on adopté à l’exception d’une timide réussite avec Kwamé N’Nkrumah. Pourquoi ne pas adapter ce juste-milieu à ce qui constitue nos valeurs personnelles ? Le PAREN propose alors la troisième voie, c’est- à- dire la priorité à nos valeurs originales essentielles. »

Bref, cette militante engagée et chevronnée en 10 ans de participation à la vie de son parti a naturellement connu une ascension fulgurante.

La politique au féminin

Dès la naissance du PAREN, elle a fait parti des structures du parti en étant membre du bureau politique. Elle a été trésorière du parti durant un bout de temps. « Je n’aimais pas tellement ce poste et je me plaignais tout le temps car je trouvais que ce n’était pas mon domaine. Je préférais de loin les débats d’idées » confie-t-elle. Après cette petite expérience comptable, elle occupe le poste de secrétaire à la solidarité nationale. « J’y étais à l’aise car c’était en phase avec ma conception de la solidarité, de la culture traditionnelle et des valeurs fondamentales de notre culture. » Voici ce qui explique pourquoi elle est restée fidèle à ce poste au fil de ses mandats.

En tant que femme, elle dit n’avoir pas rencontré de grandes difficultés au sein de son parti politique. Car avoue t- elle « les membres du PAREN se comportent comme des membres d’une même famille. Au sein du parti nous essayons de mettre en pratique nos idéaux et il n’y a pas de luttes intestines au PAREN. »

Depuis qu’elle tient les rennes du parti, elle trouve néanmoins que ce n’est pas facile au niveau de la vie de famille et de la gestion de son service. Cette dame, mère d’un unique enfant dit avoir l’appui de son époux même si quelques fois celui-ci plaisante en lui disant : « J’espère que d’ici la je n’aurai pas à demander une audience pour te voir ? »

Ses relations avec le fondateur de PAREN

Concernant ses relations avec Laurent Bado, elle dit qu’elles se placent sous le signe de la continuité car « la vie n’est qu’une continuité. Le père forme le fils afin qu’il se prenne en charge et soit indépendant. Je prends conseil auprès de lui puisque de par l’âge, il a une expérience que je n’ai pas, de même dans le domaine politique, il jouit d’une grande expérience que des politiciens plus aguerris que moi exploitent ». Selon Jeanne Traoré cette continuité traduit à elle seule la philosophie de son parti qui est l’alternance dans tous les domaines. Elle dirige une équipe jeune de 23 membres tout en s’inspirant de son mentor Laurent Bado. Au PAREN, dit-elle, tout le monde est consulté sans distinction d’âge, de niveau, etc.

Ses ambitions

Convaincue que le Burkina a besoin d’une alternance, Jeanne Traoré, à la suite du PAREN, veut que ce message pénètre la conscience de chaque burkinabè. C’est pourquoi au cours de son mandat de trois ans, son objectif principal sera la réorganisation du PAREN, de travailler à l’implantation des structures du parti sur tout le territoire et d’avoir une large concertation avec les militantes.

« Les femmes sont au centre de notre projet de société qui est basé sur nos valeurs ancestrales » affirme-t-elle. Aussi sa stratégie d’approche sera axée sur plusieurs types d’acteurs. Les intellectuels et la grande masse de ceux qui ne sont pas allés à l’école afin d’effectuer un changement de mentalité en profondeur et les amener « à voir et vivre autrement ».

Pour Jeanne Traoré, la façon la plus sûre d’appliquer ses idées, c’est d’accéder à la magistrature suprême. Et cela passe impérativement par la compétition électorale. Mais pour le moment, la présidente du PAREN est réaliste, l’échéance de 2010 c’est encore trop tôt pour elle !

Chantal BOUDA
Lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 16 février 2009 à 20:30, par L’étudiant En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    je souhaite beaucoup de courage à madame Traoré.Notre pays à l’heure actuelle,a besoin d’un changement radical.

  • Le 17 février 2009 à 11:57, par JFK En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Bravo Jeanne ça fait plaisir de voir qu’une femme dirige un parti politique au burkina,j’espère que tout se passera bien pour vous, durant votre mandat. Un ancien éléve
    Bon courage et bravo

  • Le 17 février 2009 à 19:26, par neurone12000 En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Dieu accompagne toujours ceux qui se batte sincèrement pour les causes justes.

  • Le 20 février 2009 à 17:34, par wend waoga En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Voilà une raison noble de se lancer dans la politique !Ca ne pouvait pas etre par l’effet du hasard qu’une femme soit hissée à la tete d’un parti politique dans ce pays.Seul le retour à la source peut sortir l’Afrique de son impasse.Balancer nos valeurs traditionelles n’est rien d’autre qu’injure à l’égard de nos ancetres, qui avaient pourtant si bien ficelé les choses,et aide à ceux qui ne revent que de voir cette culture disparaitre afin de mieux nous cerner.Depuis son existence,je ne vote que le Paren,et je serai encore partant lors des prochaines élections.
    Bon vent au PAREN et à madame Traoré !Vive l’Afrique !

    • Le 20 février 2009 à 17:44 En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

      Comment concretement vous allez operez ce retour aux sources ? Les sources sont-elles elles- memes restees intactes ? Voulez vous reifier la culture qui est aussi mouvement ? C’est bien beau de parler de retour aux sources mais vous ne dites pas comment vous allez faire en verite. C’est la le fond du probleme de tous ceux qui pronent le retour aux sources, si louable cela fut- il.

      • Le 21 février 2009 à 16:36, par wend waoga En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

        Le fait de ne pas savoir concrètement comment le faire ne doit pas etre synonyme d’abandon !La preuve en ai que j’y pense,et vous,vous le trouvez louable.Maintenant,il s’agit de réfléchir,aussi bien vous que moi,au comment,car le comment existe bien quelque part !Si nous allons passer tout le temps à nous dire "on ne sait pas comment faire",alors qu’on ne se donne pas le temps d’y réfléchir,évidemment,rien ne sera fait ! Comment pouvons-nous prétendre à une indépendance,si nous sommes convaincus que c’est la civilisation de l’autre qui est un model à suivre,et traiter la notre comme si elle était le fruit des leurres de nos ancetres ? Autant dire à ceux qui nous traitent comme leurs propriétés "prenez-nous entièrement,nous vous devons et attendons tout de vous !",plutot que de crier à qui veut nous entendre "les pays africains sont souverains !".Car,étant donné l’impossibilité de construire notre société sur ses bases traditionnelles,nous seront obligés de poursuivre les autres pour qu’ils nous apprennent selon les leurs et,croyez-moi,nous devrons en payer le prix,et ce ne sera pas pendant seulement cent ans ! Nous avons des intellectuels pour ca,ils ont juste besoin de sortir de leurs calculs politiques politiciennes,et vous verrez que les choses se réaliseront !

      • Le 22 mars 2009 à 17:08, par koni En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

        Retourner aux sources est d’abord un état d’esprit qu’on met au service de l’action et/ou des symboles. L’état d’esprit est ce qui vous fait dire que c’est imposible de retourner aux sources. Pour peu que vous ayez un autre état d’esprit, vous vous rendrez compte que vos faits et gestes peuvent bien etre modulées en fonction de cet etat d’esprit. Le marxisme était d’abord un état d’esprit....Alors, je ne trouve pas impossible la mise en oeuvre de l’at d’esprit de Jeanne, surtout qu’il y est question de bonne gouvernance en fait...

  • Le 21 février 2009 à 20:10, par newyorkais@zamana.bf En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Ce qui est bien c’est de savoir que a l’epoque de cette dame on pouvait faire l’universite et venir a l’enseignement par vocation. bravo madame et surtout essayer de finir votre mandat en ayant apporte quelque chose pour la posteriorite

  • Le 23 février 2009 à 02:02, par un ancien élève En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Bravo Mme Traore.
    Vous etes une dame sur qui le parti peut compter . Les eleves que vous avez tenus à Ouahigouya ont toujours admiré votre forte personnalité et votre sens responsabilité

  • Le 14 juillet 2009 à 12:40, par GOUMBANE HAMIDOU En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Tout d’abord mes salutations les plus sinceres(en un mot mes felicitations).Moi je m’appel GOUMBANE HAMIDOU,resident en ITALIE et compte m’adherer a votre parti qui est le PAREN,donc je voudrais savoir qu’est ce que je dois faire pour etre un adherant ?Je ne serai pas le seul car pour beaucoup d’entre nous ici notre PATRI est l’un de nos priorites absolus,j’aurais besoin de vous dire beaucoup des choses mais je me limiterais ici pour le moment.

  • Le 25 août 2009 à 12:51, par Delta Oscar En réponse à : Jeanne Traoré, présidente du Parti pour la Renaissance Nationale

    Merci Jeanne, cela fait plaisir de voir qu’une femme dirige un parti politique au burkina,j’espère que tout se passera bien pour vous, durant votre mandat. Une admiratrice du Mali.

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