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Tertius Zongo, Premier ministre : « La vie chère n’est pas l’effet d’un gouvernement qui dort »

Publié le dimanche 28 décembre 2008 à 23h16min

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Un an et demi après sa prise de fonction, le Premier ministre, Tertius Zongo est au four et au moulin, pour redorer le blason du Burkina Faso, sur le plan de la bonne gouvernance tant économique que politique. A travers cet entretien réalisé par Africa N°1, JJ, Canal Arc-en-ciel et Sidwaya, Tertius Zongo parle de son bilan, de la vie chère, des marchés publics, de la réduction du train de vie de l’Etat, de la lutte contre la
corruption, de la crise des enseignants-chercheurs à l’Université de Ouagadougou… Comme à son habitude, dans un langage de vérité.

Sidwaya (S) : Excellence M. le Premier ministre, lors de votre prise de fonction, vous avez placé votre mission sous le signe de la moralisation de la vie publique. Un an et demi après, quel bilan faites-vous de cet objectif que vous vous étiez assigné ?

Tertius Zongo : (T.Z) Le point le plus important dans toute action que l’on mène est la pertinence de l’action. Il faut d’abord se poser la question de la pertinence de l’action pour le gouvernement, en tant qu’exemple que l’on veut donner. Ensuite, la pertinence de l’action en termes d’impact sur la vie des populations. Aujourd’hui, les questions de gouvernance sont des questions centrales et prioritaires. Tant que l’environnement de la gouvernance n’est pas mieux assaini, quelles que soient les autres actions que vous allez mener, vous ne pourrez pas avoir de résultats efficaces.

La bonne gouvernance est une aspiration profonde de tout le peuple. Il n’y a personne qui veut vivre dans un environnement de mauvaise gouvernance. Les populations veulent que chaque fois qu’elles ont besoin d’un service ou d’une action, que cela se passe dans un environnement de transparence. Par conséquent, en premier lieu, la moralisation de la vie publique est un besoin élémentaire. En second, il s’agit d’aller avec tout le monde. Et cela passe par la communication, la sensibilisation. On ne peut mobiliser des gens que sur la base de leurs intérêts, dit-on. Il faut que les gens sachent les objectifs que vous poursuivez. Il faut qu’ils puissent faire la différence entre ce que l’on doit faire et, ce que l’on ne doit pas faire. C’est une marche de longue haleine et, je puis avouer que la maillonnaise est en train de prendre. Nous restons confiants.

S : La reconversion des mentalités suppose une démarche pédagogique de votre part. Quelle est la vôtre ?

T.Z : La démarche pédagogique consiste d’abord, à orienter tout le monde vers le même objectif. Il faut changer les mentalités. Il faut montrer qu’on peut faire autrement. Et, faire autrement, c’est emmener d’abord les gens à se convaincre que, ce qui parait être devenu la norme, n’est qu’une déviation et non la normale. Aujourd’hui, sur le plan institutionnel, l’Etat s’organise pour mettre en place des structures qui veillent à la sensibilisation mais aussi, sanctionnent lorsqu’il y a des déviations.

Il s’agit de faire en sorte que les gens sachent que ce qui est dit est fait. Si cela n’est pas fait, l’on doit savoir pourquoi cela n’a pas été fait. Naturellement, il est évident que tout le monde ne va pas au même rythme. Certains sentiront que les choses avancent. D’autres, hésitants, pessimistes, diront « attendons de voir car, on est sûr que cela n’ira pas plus loin que ce que nous avons vu ». Mais l’essentiel est que, de plus en plus, de nombreuses voix s’élèvent pour dire qu’on y croit, que cela est possible et que nous pouvons le faire.

S : La réduction du train de vie de l’Etat est pour vous une priorité. Cette diminution a -t-elle été bien accueillie par les ministres ?

T.Z : Ce sont des questions que nous discutons entre nous. La vérité est que chacun peut se plaindre dans son for intérieur. Mais, il est toujours bon de faire bien avec peu. L’évolution du monde commande de faire ainsi. Au niveau des pays africains, nous devons comprendre que lorsque nous voulons des résultats, le seul indicateur de mesure du résultat, est de faire la part des choses entre ce qui a été injecté comme moyens et, ce qui a été gagné en retour comme bénéfices. Faire mieux avec peu, crée plus de richesse et de facto, l’on peut partager cette richesse. Un gouvernement est chargé de conduire un programme politique. Il est le bras armé de la mise en œuvre du programme politique du chef de l’Etat. Le gouvernement, étant conscient que celui qui l’a formé, a promis un meilleur avenir aux populations, doit montrer le bon exemple.

S : Concrètement, quels sont les domaines dans lesquels ont été constatés la diminution du train de vie de l’Etat ?

T.Z : les aspects sont multiples. Les véhicules de l’Etat étaient utilisés à tort et à travers. Aujourd’hui, je pense qu’aucun ministre, aucun fonctionnaire de l’Etat, personne ne peut s’amuser à utiliser les véhicules de l’Etat, en dehors des heures de service. En outre, les gens distribuaient les bons de carburant à tour de bras. Ils vont même dans les stations-services pour monnayer les bons d’essence contre de l’argent. Cela n’est plus possible. Les cartes magnétiques ont été établies à la place des bons d’essence. En un trimestre, les bénéfices engrangés par rapport à l’utilisation rationnelle du carburant sont énormes. Prenons l’exemple du premier ministère. Au mois de novembre de l’année dernière, j’ai dû voir le ministre des Finances pour réclamer une rallonge de carburant.

Cette année, avec la même dotation, et après 6 mois d’application de la mesure, en fin décembre, après avoir fait le point, j’ai une économie de 26 millions de F CFA de carburant. Donc, le point sera fait au niveau des différents ministères et, nous allons publier les économies réalisées sur le carburant. Cela suscite des grincements de dents mais, il faut qu’on le fasse. Dans cette lancée, les domaines du téléphone, de l’électricité et de l’eau ont été touchés.

Nous avons des factures de téléphone de 500 000 F CFA et même de plus d’un million sur certains postes de téléphone. Nous avons d’abord résilié les lignes de téléphone de tous ceux qui sont à des postes qui n’en ont pas besoin. En lieu et place, il faut mettre un montant de crédit en prépayé. Cette année, nous avons résilié des centaines de lignes cellulaires.
Au niveau de l’électricité, nous avons changé les climatiseurs et les lampes en les remplaçant par ceux qui sont plus économiques. Nous avons fait des sensibilisations afin que petit à petit, les uns et les autres soient plus économes dans l’utilisation de l’électricité dans les administrations publiques.

Au 31 décembre 2008, je demanderai au ministre des Finances de faire le point sur les économies réalisées. D’autre part, à travers le budget de l’Etat qui vient d’être adopté par l’Assemblée nationale, beaucoup de choses ont été faites. Pour preuve, en 2008, les dépenses de fonctionnement de l’Etat (eau, électricité, téléphone, carburant sans les salaires), s’élèvent à 100 milliards 700 millions de F CFA. En 2009, nous avons prévu 100 milliards 400 millions, moins que 2008 et nous savons que nous allons terminer 2008 avec des économies.

S : Dans cette quête d’une bonne moralité pour l’administration publique, il y a la lutte contre la corruption et depuis peu, il a été institué l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat (ASCE). Face aux lobbyings économique et politique qui se confondent souvent, cette structure a-t-elle les moyens de réussir sa mission ?

T.Z : Sur le plan institutionnel, lorsqu’on veut avoir un environnement de bonne gouvernance, il faut mettre en place des structures auxquelles on donne les moyens de réussir leurs missions. Lorsqu’on a fait le point sur les aspects liés à la corruption, les entraves ont été perçues. Les rapports tournaient entre les ministères et il n’y avait pas de suite. Il fallait donner un signal fort. Par conséquent, nous avons dit à la haute autorité que lorsqu’elle opère un contrôle, elle est maître de la procédure jusqu’au bout. Elle n’a pas besoin d’envoyer le rapport à qui que ce soit pour demander son avis. Elle a le droit d’envoyer directement ses rapports à la justice et de les publier. Elle est indépendante et on lui donne les moyens de travailler. Naturellement, l’Autorité supérieure ne peut pas faire le travail à elle seule.

Il faut, déjà au niveau des ministères, trouver le chaînon manquant. C’est-à-dire, faire le contrôle dans les ministères. Car, c’est souvent l’absence de contrôle qui est la porte ouverte aux dérives. Aujourd’hui, nous avons des inspections techniques dans les ministères. Mais, leur fonctionnement est problématique. Alors, suite aux conseils de l’Autorité, nous avons essayé d’étoffer les inspections techniques au niveau des ministères. Deuxièmement, dans le décret qui porte conditions de service des agents de l’Autorité, nous les avons mis dans des catégories qui leur permettent d’avoir des traitements conséquents.

De la même manière, nous avons changé les conditions de service des inspecteurs des services. Ils ont plus de moyens pour mener à bien leur mission. Sur le plan hiérarchique, quand bien même ces inspections sont logées dans les ministères, leurs rapports sont transmis directement à l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat. Lorsque les rapports sont faits par les inspections techniques au niveau des ministères et que ceux-ci échouent sur les tables des ministres, on va se retrouver dans les mêmes jeux de ping-pong. Pour l’instant, l’Autorité a entrepris d’asseoir ses structures. Elle a commencé à faire le travail et, déjà, il y a une appréciation positive. En 2009, on va sentir sur le terrain, le travail fait par l’Autorité de contrôle de l’Etat.

S : Doit-on s’entendre à des actions d’éclat puisqu’on a toujours l’impression que ce sont les petites gens qui seront inquiétés…

T.Z : L’Autorité supérieure a un numéro vert. Les questions de bonne gouvernance, de corruption, ne peuvent pas être résolues que par le gouvernement. Les structures mises en place sont un cadre auquel on peut se référer. Mais, c’est un travail de tous les citoyens. Si quelqu’un aperçoit un ministre faisant quelque chose que l’on ne doit pas faire, que l’on appelle l’Autorité afin qu’elle y jette un coup d’œil. Et, on verra si le ministre ne sera pas poursuivi ! En revanche, lorsqu’on constate les manquements du ministre et qu’on n’avise pas l’Autorité, ce ministre continuera à faire ce qu’il veut. Donc, nous comptons sur tout le monde pour la réussite des missions de l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat. Par-dessus tout, je souhaite que nous inscrivions la démarche dans la durée. Cette démarche permettra à chacun de savoir qu’un jour ou l’autre, ce que vous faites en cachette et qui n’est pas admis, sera découvert.

S : Le fameux délit d’apparence…

T.Z : Nous avons fait un rapport sur la corruption dans l’administration. Je ne pense pas que beaucoup de pays le font. Et, cette étude a été menée, non pas par l’administration mais, par des consultants indépendants. En vue d’assurer une indépendance totale, nous avons fait financer cette étude par la BAD pour que l’Etat ne soit pas impliqué dans les procédures budgétaires. L’atelier de restitution a été fait en présence de la société civile. Des recommandations ont été faites. Nous sommes à présent, en train de voir avec la société civile comment mettre en œuvre ces recommandations. Le délit d’apparence constitue l’une des pistes à explorer. Lorsqu’on voit un fonctionnaire construire subitement des étages, alors qu’il a été engagé à la fonction publique il n’y a pas longtemps, cela doit nous interpeller. Nous devons y travailler mais, sans tomber dans la délation. Il faut trouver le juste milieu. Mais, si ces genres de choses sont dénoncés, soyez convaincus, que les gens vont justifier l’origine de leur richesse.

S : L’année 2008 a été celle de tous les dangers, pour tous les pays africains, avec ses crises à répétition, la vie chère, la grogne sociale…Cette situation n’a-t-elle pas ébranlé le gouvernement burkinabè dans sa sérénité ?

T.Z : Elle ne nous a pas ébranlé mais, nous a permis un questionnement. Aujourd’hui, avec le recul, tous ceux qui sont honnêtes, reconnaissent que ce n’est pas un phénomène propre au Burkina. Ce n’est pas l’effet d’un gouvernement qui dort, qui ne prévoit rien... J’aurai voulu et aimé, que tous ceux qui ont proféré des insultes grossières, des diffamations adressées au gouvernement, s’excusent. Il ne faut pas toujours vouloir que le gouvernement soit comptable. Les citoyens doivent aussi être comptables. Tous ceux qui ont marché, insulté, reconnaissent que la vie chère n’est pas la faute du gouvernement. C’est un phénomène mondial. En clair, le gouvernement n’a pas été ébranlé mais, a dû mesurer le fossé qu’il y a entre ce que nous avons comme analyse et, ce que le reste de la population a, comme analyse de la situation.

Il faut souvent avoir la même information lorsqu’on veut regarder dans le même sens. Naturellement, le gouvernement a pris un certain nombre de mesures. Lorsque vous avez une analyse objective d’une situation, il faut éviter d’être démagogue. Il faut éviter le populisme qui ne mène nulle part. Les gens auraient voulu qu’on prenne des décisions, qui leur permettent de continuer à manger le riz, au prix qu’ils l’achetaient auparavant. De même pour le carburant. Mais, on ne peut pas le faire. La solution était d’aller dans le sens de ce que nos moyens nous permettaient de faire. D’où la détaxe des produits de première nécessité. Il est vrai que cette détaxe s’est avérée insuffisante comme mesure à faire baisser les prix étant donné que, sur le marché international les prix n’ont cessé de monter. Toutefois, la vraie solution se trouve à nos portes. Elle est dans le comportement de chacun de nous. Nous devons nous poser la question de savoir si nous, Burkinabé, dans notre dignité, sommes incapables de nous nourrir.

C’est pourquoi le gouvernement, en lieu et en place des subventions importantes pour importer du riz, du lait, a décidé de donner les moyens aux producteurs afin qu’ils produisent. Au cours de cette campagne, nous avons distribué 20 000 t d’engrais à un prix subventionné à 50 %. Sur ces 20 000 t d’engrais, 10 000 ont été mis à la disposition des producteurs de riz. Pour les semences améliorées, nous avons distribué 6 000 t dans toutes les 302 communes du Burkina Faso. Sur ces 6 000 t de semences, 2 700 t étaient des semences en riz. En outre, nous avons mis des tracteurs à la disposition des producteurs. Et, les agents de l’Agriculture, chargés d’encadrer les paysans ont été invités à aller sur le terrain.

S : Les résultats ont-ils suivi ?

T.Z : Nous avons eu une production record. Plus de 4 millions 300 milles tonnes de céréales ont été récoltées. Pour le riz, nous sommes à une augmentation de plus de 250% de la production du riz de l’année dernière. En réalité, la production de riz de cette campagne agricole est plus que cela, puisque la base de l’année dernière incluait la production sèche. Mais pour cette année, nous n’avons pas encore intégré la production de contre-saison qui commence bientôt. Cela montre que nous sommes capables de produire. Nous sommes d’autant plus fiers d’avoir injecté de l’argent pour booster la production. A présent, il faut s’assurer que cette production sera écoulée à des prix rémunérateurs et, sensibiliser les consommateurs sur l’opportunité et la nécessité de consommer ce qu’ils ont produit.

S : Abordons les questions sociales, notamment les négociations gouvernements-Syndicats. La dernière en date a accouché de la décision d’augmenter de 4% les salaires à partir de janvier 2009. Par rapport au 25 % réclamé par les syndicats, cette augmentation n’est-elle pas une goutte d’eau dans la mer ?

T.Z : Il faut tout d’abord salué l’esprit de dialogue qui existe entre les syndicats et le gouvernement. Lorsqu’on dit syndicat, l’on voit un antagonisme entre le gouvernement et ce dernier. Nous sommes arrivés à mettre en place un cadre de dialogue et cela est à l’honneur des syndicats. Il faut le leur rendre cet hommage. Ce cadre de dialogue est un espace où le dialogue doit se faire dans la transparence. Par nature, je sais que les syndicats veulent la transparence. Ils pensent, que quelque fois, le gouvernement cache quelque chose. Et, comme on veut que les choses soient transparentes, il faut qu’on aille jusqu’au bout. Prenons l’exemple du budget de l’Etat : les recettes fiscales, (ce que fait rentrer la douane, les impôts, etc) ce sont les recettes les plus sûres à côté des recettes non fiscales qui sont aléatoires.

Dans le budget 2008, il est prévu 475 milliards de F CFA au titre des recettes fiscales. Les salaires, payés aux fonctionnaires coûtent à l’Etat 199 milliards. Or, les recettes fiscales n’atteindront pas les 475 milliards, on tournera autour de 450 milliards. Et, ce n’est pas tout. L’Etat subventionne les Etablissements publics de l’Etat (EPE). Pour les agents des EPE, les appuis divers de l’Etat ne proviennent pas de la masse salariale globale des agents publics de l’Etat. Ils relèvent des transferts courants qui s’élèvent à 170 milliards de F CFA. Alors, si on prend les salaires « purs » de l’Etat (199 milliards), les transferts courants (170 milliards), nous sommes autour de 370 milliards de F CFA.

Et, ce n’est pas tout car, nous venons de faire cas du train de vie de l’Etat. Même lorsqu’on corse, nous sommes à 100 milliards qui s’ajoutent au 370 milliards. Autre aspect, la dette. Le service de la dette pour l’année 2008 est de 53 milliards 500 millions. Au final, lorsqu’on additionne tous ces éléments, on voit bien que nos 475 milliards ne peuvent pas faire grande chose. Donc, franchise pour franchise, on veut satisfaire les syndicats mais, la réalité est là. Je sais honnêtement que pour les 4%, les syndicats voudraient plus mais, nous avons fait un effort extraordinaire.

S : Excellence, on remarque que le Burkina Faso est un pays en chantier. Cependant, l’Etat tarde souvent à payer les entrepreneurs. Quelles mesures comptez-vous prendre pour que l’Etat devienne un « bon payeur » ?

T.Z : Avant que l’Etat soit un bon payeur, nous devons prendre des mesures pour que les entrepreneurs farfelus, les « apprentis-sorciers », qui ne savent pas faire le travail et qui se retrouvent avec des marchés, ne soient pas là où ils sont. En outre, il faut chercher à savoir ce qu’il faut faire, pour que les fonctionnaires qui examinent les dossiers d’appels d’offres, au lieu de mettre l’accent sur celui qui peut exécuter correctement le marché, ne jette leur dévolu que sur celui qui peut lui donner de l’argent. Les marchés doivent revenir à ceux qui ont les capacités de les exécuter.

A cet effet, une nouvelle réglementation des marchés publics a été adoptée. Nous sommes en train de mettre en place l’autorité de régulation. Un tiers des gendarmes des marchés publics provient de la société civile. Un autre tiers est du secteur privé et le dernier tiers provient de l’Etat. Je peux vous garantir qu’en 2009, tous les points de la nouvelle réglementation seront appliqués. Des gens vont se retrouver en prison et des entrepreneurs vont être radiés.

Une fois que cela est fait, nous aurons sous la main des professionnels. Les professionnels savent que toute profession à des risques. Payer tard n’est pas un problème. Mais, payer tard des gens qui ne sont pas là pour faire le travail pose problème. Lors de la dernière réunion du conseil des ministres des pays membres de l’UEMOA, tenue à Niamey, ils ont fait le point. En ce qui concerne les finances publiques dans les pays membres, le Burkina Faso (et, nous sommes très transparents puisque, nous avons publié un rapport pour dire exactement combien l’Etat burkinabé doit aux gens) en 2008 a fait un dégonflement des arriérés de l’Etat, comme nous ne l’avons jamais fait.

Il est bien vrai que quelquefois, les paiements prennent du temps. Nous travaillons à trouver le juste niveau. Il faut que nous arrivions à maîtriser d’abord les acteurs pour éviter les complaisances à tous les niveaux. Il y va même de l’intérêt de l’Etat car, travailler avec de vrais professionnels permettra à l’Etat de mieux gérer sa trésorerie. Le dialogue est fait avec nos opérateurs. Je puis vous assurer, comparaison n’est pas raison, qu’aujourd’hui dans l’espace UEMOA, le Burkina Faso est le pays qui exécute le plus vite, non seulement les travaux mais aussi, paye vite ceux qui ont des arriérés.

S : Parlant d’arriérés, les enseignants-chercheurs de l’Université de Ouagadougou, réclament toujours des arriérés par rapport à leurs différentes prestations. Cette situation ne rajoute-elle pas aux soubresauts de l’année académique à venir ?

T.Z : Il faut tout de même relativiser car, nous avons trois grandes universités (Bobo-Dioulasso, Koudougou et Ouagadougou). Sur les trois, Bobo-Dioulasso et Koudougou ont entamé leur année académique sans problème. Sur trois universités, deux ont fait une rentrée normale. L’Université de Ouagadougou, par rapport au décalage opéré suite à sa fermeture, a connu un nouveau calendrier.

A la demande des étudiants, les enseignants ont opté pour deux sessions. Ils sont au terme des deux sessions et la rentrée académique a été fixée au début janvier 2009. En ce qui concerne les arriérés, je souhaite que l’on aborde les questions de façon objective. Chacun de nous est conscient qu’il y a un certain nombre de difficultés qui datent de plusieurs années dans nos universités. J’ai personnellement rendu visite aux 3 universités. J’y ai rencontré le personnel enseignant et les étudiants. A l’issue des visites et des discussions, je me suis aperçu de la nature des problèmes posés. Il y a un problème de gestion dans nos universités.

Cela veut dire que les techniciens que nous détachons auprès des universités, pour s’occuper de la gestion financière et administrative, quelque fois, profite du fait que, les enseignants prépare leur tasse de café pour ne pas être souvent de bon gestionnaire. Je le dit et je sais de quoi je parle. Dans ce cas, il y a beaucoup de problème dont on n’est pas au courant. J’ai demandé alors, que l’on me fasse un audit de la gestion financière dans les universités. Une équipe du ministère des Finances a fait le tour des universités. Elle a passé en revue la gestion sur des années. Ce rapport a été déposé en fin octobre-début novembre. Il est clair qu’on ne peut régler des problèmes pour le futur, lorsqu’on ne sait pas sur quoi nous sommes assis. Pour moi, le gentleman agreement était clair. A travers ce rapport, je vois les problèmes qui se posent, je vois comment les assainir et, nous lançons la réflexion supplémentaire.

Dans la comptabilité des universités, ce que l’Etat doit aux enseignants et, ce que le rapport a fait ressortir concernant ce que l’Etat doit à ces mêmes enseignants, c’est la nuit et le jour. Aujourd’hui, nous avons une situation claire de ce que l’Etat doit aux enseignants. Et, il n’y a pas une dette sociale urgente à payer et qu’on ne l’a pas fait. Tout ce qu’on doit, a été pointé et payé. Il est vrai qu’il existe d’autres problèmes. Notamment, les infrastructures à construire. Des marchés ont été lancés sans budget et, les travaux ont été arrêtés. Il faut bien qu’on trouve de l’argent pour le faire. Il y a en outre, un certain nombre d’engagement qui ont été pris sans ligne budgétaire.

Lorsqu’on évalue tout ceci pour se donner un ordre de grandeur, dans les trois universités, y compris le CNRST et l’IDS, cela fait 6 milliards 500 millions de F CFA en termes d’investissement engagé sans ressources et qu’il faut achever. A l’intérieur de ces universités, le fonctionnement coûte environs 2 milliards 500 millions de F CFA. Il faut qu’on revoie notre approche globale. Au niveau des universités, les heures supplémentaires des enseignants, sont souvent volumineuses. Si vous calculez le temps d’heures supplémentaires d’un enseignant et que vous les comparer à ces heures de cours du mois,

cela équivaut à dire que l’enseignant dort à l’université en enseignant. Cela signifie que la gouvernance dans nos universités pose problème. Les heures supplémentaires sont toujours fonction du volume horaire de cours à dispenser. Il n’y a pas de raison qu’à la fin de l’année, l’enseignant vienne signer des horaires de cours supplémentaires qui dépassent ses heures de cours habituelles. Il faut revoir cela. Nous devons aller vers des méthodes qui permettent de résoudre des problèmes réels et objectifs. Chaque année, nous augmentons le budget du ministère de l’Enseignement supérieur. Ce ministère, après avoir discuté avec les universités, leur alloue leur budget.

S : Quelles mesures comptez-vous prendre pour lutter contre le grand banditisme en 2009 et par la même occasion, quels sont vos vœux ?

T.Z : L’insécurité est un domaine où on pointe du doigt le gouvernement. La sécurité relève de nous tous. Il faut que l’on se convainque d’une chose : la sécurité est l’œuvre de tous. On ne peut mettre des agents de forces de l’ordre devant chaque concession, à tous les carrefours. Cela n’est pas possible. Il faut la participation de chaque citoyen et, cela est en train de faire ces effets. Et, mon souhait est qu’en 2009, les Burkinabé comprennent que personne ne peut assurer leur sécurité à leur place. Chaque Burkinabé doit comprendre que sa propre sécurité commence par celle des autres. Mon vœu, et cela n’est pas pour les Burkinabé seulement, est que chacun puisse croire en ce qu’il fait. Si vous ne croyiez pas en ce que vous faites, vous avez signé votre défaite par avance.

Malheureusement, nous avons tous ce défaut, qui nous fait croire que quelqu’un viendra régler nos problèmes à notre place. L’homme est le premier remède de ses problèmes. Tant chacun de nous ne vas pas intérioriser cela, tout ce qu’on lui donne comme élément pour lui permettre de réussir, ne lui permettra pas de réussir puisqu’il ne sera pas convaincu de réussir. Donc, je souhaite que nous ayons la santé, la foi en l’avenir et que nous nous disions toujours que demain sera meilleur à aujourd’hui.

Entretien réalisé par Daouda Emile OUEDRAOGO
(Sidwaya)
Yanick Laurent BAYALA
(Africa N°1)
Koffi Félix AMETEPE
(JJ)
Simplice BARRO
(Canal Arc-en-ciel)

Sidwaya

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