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Procès filière café-cacao : La grande opération mains propres de Gbagbo

Publié le mercredi 22 octobre 2008 à 01h04min

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« Le succès de ce pays repose sur l’agriculture ». Une célèbre phrase de feu le président Félix Houphouët Boigny du temps où il présidait aux destinées de la Côte d’Ivoire ce pays qui a amorcé son ascension grâce à l’agriculture.

Le Bélier de Yamoussoukro avait compris très tôt que pour développer son pays, qui était béni par Dame Nature, il lui fallait avoir pour socle l’agriculture. Et en la matière, il avait vu juste, puisque les matières premières lui ont permis de faire de grandes réalisations, aujourd’hui la fierté des Ivoiriens.

Avec la Caisse de stabilisation et de soutien des prix des productions agricoles (CSSPPA), plus connue sous le diminutif de Caistab, le pays tirait profit de la vente de ses produits.

Cet organisme, étatique, était chargé de gérer les filières coton, cacao et café à l’échelle nationale depuis sa création en 1960 par Houphouët jusqu’à son démantèlement en août 1999. Son rôle était de constituer un intermédiaire de poids entre les producteurs et les négociants en vue de stabiliser les cours. La Caistab achetait la production de cacao aux producteurs à un cours, fixé à l’avance et le stockait. Elle était ensuite chargée de le vendre.

Cela permettait de lisser les cours, puisque la vente intervenait toute l’année contrairement aux récoltes, qui sont saisonnières. Pour les paysans, le fait de savoir à quel prix ils allaient vendre leur production leur a permis de s’enrichir et de faire croître leur exploitation.

La Côte d’Ivoire est ainsi devenue le premier producteur mondial de cacao (40% de la production mondiale) et la Caistab, le principal organe d’Etat du pays. C’est sous la pression des bailleurs de fonds que ce secteur a été libéralisé.

Un nouveau dispositif de contrôle, plus conforme à leur souhait, a été mis en place, mais des malversations en tout genre ont fini par s’installer au « pays des cabosses », à tel point que le président Laurent Gbagbo a décidé de mettre de l’ordre dans le milieu. Ouverte en juin 2008, l’information sur les malversations dans la filière café-cacao a conduit, on se souvient, plusieurs responsables de la filière en prison.

Mais le gouvernement, qui n’entend pas en rester là, avait, le 14 août dernier, autorisé l’audition de tous les membres du gouvernement qui s’étaient succédé à la tête des départements ministériels de l’Agriculture ainsi que de l’Economie et des Finances depuis la réforme de cette filière, d’autant plus que les éclairages qu’ils apporteront lors de leurs auditions sont nécessaires pour l’instruction des dossiers.

Ainsi, depuis le 20 octobre dernier, des personnalités ivoiriennes défilent devant le juge d’instruction du tribunal d’Abidjan. Parmi elles, les plus connues sont Paul Antoine Bohoun Bouabré, ministre d’Etat à la Planification et actuel ministre de l’Agriculture, proche du président Gbagbo, et Amadou Gon Coulibaly, le directeur de campagne d’Alassane.

Mais quand on sait qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’auditions en qualité de témoins, il ne faut vraiment pas s’attendre à ce qu’ils rejoignent les autres à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA). Chacun a dû ficeler un dossier en béton et il serait étonnant que ces auditions dites du « siècle » aillent loin. En cette période de campagne présidentielle, Gbagbo, à travers cette grande opération mains propres et en fin stratège, a trouvé l’occasion idoine de se faire un coup de « pub ».

Et pourtant, il aurait pu, dès le départ, prendre cette affaire au sérieux quand le journaliste franco-canadien Guy André Kieffer, disparu en 2004 en Côte d’Ivoire, s’échinait à démêler l’échevau des malversations dans la filière cacao. Avec ce qui se passe aujourd’hui, on peut dire que le milieu était vraiment en état de putréfaction avancée. Kieffer, qui ne faisait que son travail, a payé cash de sa vie ce qu’il voulait savoir. La grande opération mains propres de Gbagbo est en marche et Dieu seul sait si demain on inculpera un ministre dans cette affaire.

Si donc, nous devons nous féliciter que cette opération mains propres ait connu un début d’exécution, il faut prier tous les dieux de la lagune Ebrié qu’elle arrive à terme et surtout que ce ne soit pas seulement les petits "rongeurs de cacao" sans défense qui paient les pots cassés.

Justin Daboné

L’Observateur Paalga

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