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Engins frauduleux : Garez ici s’il vous plaît !

Publié le jeudi 16 octobre 2008 à 00h41min

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La brigade mobile de la douane de Ouagadougou entreprend, depuis la semaine dernière, une opération de contrôle et de saisie des motos non immatriculées ou sans documents attestant de leur régularité. Postés à des points stratégiques dans la capitale, les douaniers interceptent des usagers de la route pour procéder aux vérifications......Ils doivent souvent faire face à la collaboration des motocyclistes en situation irrégulière. Arrêt sur ce coup de filet d’engins provenant de la fraude.

Mercredi 15 octobre 2008, 8h, pendant qu’il rallie la rédaction, un de nos confrères assiste à un spectacle quelque peu cocasse au feu tricolore du rond-point de la place de la femme pour la paix. Un usager de la route sur une moto non immatriculée fait brusquement demi-tour pour échapper au douanier qui s’apprête à l’alpaguer. Il entreprend alors un slalom en sens interdit entre les véhicules et les motos sous les regards intrigués des autres usagers.

Au cours d’une de ses manœuvres dangereuses et désespérées, son portable tombe de sa poche et s’éparpille sur le bitume. Juste un regard sur son bien perdu et l’indélicat continue son chemin. Le douanier qui a suivi toute la scène, circonspect, observe maintenant le téléphone mobile, visiblement face à un dilemme : se saisir ou non de cette "pièce à conviction". Il finit par rejoindre son poste, laissant l’appareil sur le goudron.

Sacrifier son portable pour son engin certainement frauduleux, c’est donc la résolution qu’a prise ce motocycliste indélicat. Depuis la semaine passée, la brigade mobile de la douane de Ouagadougou a initié une opération de contrôle des engins dans les artères de la capitale. A des points stratégiques, les douaniers font des sorties régulières pour procéder au contrôle et à la saisie des motos non immatriculées ou dont les propriétaires n’ont pas de documents attestant qu’elles ont été achetées dans des circuits réguliers.

10h, avenue du Burkina Faso, un homme explique, véhément, au douanier qui lui délivre un papillon pour la saisie de sa moto que les papiers qu’il tient sont ceux qui lui ont été remis par le vendeur. Point de gain de cause. "On fait tout pour éviter les problèmes et on tombe pile dedans", lâche l’infortuné du nom de Marou Bara.

"On m’a parlé de coins où on vend les Crypton à moins de 500 000 F CFA. J’ai préféré aller acheter la mienne à 550 000 FCFA dans une grande maison pour éviter ce genre de problèmes. Mais ceux qui sont censés s’y connaître m’ont remis des papiers qui ne sont pas valables, selon les douaniers" , nous explique-t-il.

Selon lui, les vendeurs de motos doivent s’organiser pour fournir des documents en règle à leurs clients afin de leur éviter des désagréments. "Je ne suis coupable de rien et je suis obligé de souffrir parce que j’ai besoin de mon engin pour mon travail et en plus j’ai mal au pied", souligne Marou Bara, contrarié.

Même infortune pour Edwige Ada, élève-forestière, qui téléphone à plusieurs reprises pour qu’on vienne la chercher. Elle tient en main le reçu de la plaque de sa moto qu’elle dit devoir récupérer le soir. Ce reçu n’est pas valable pour les douaniers qui réclament les papiers de l’engin pour vérification. "J’ai dû les laisser à une agence pour qu’on confectionne la plaque", affirme-t-elle.

Finalement, elle se résout à aller récupérer les papiers de sa moto. Ils sont donc nombreux, ce mercredi matin, les motocyclistes comme, Jean Philippe Bonané, qui n’a acquis son engin que depuis vendredi dernier, à avoir fait les frais de l’absence ou de la non-conformité des pièces de leurs motos.

La dizaine d’agents de douane présents interceptent les usagers aux feux tricolores et ramènent les engins sur le côté pour procéder au contrôle. Au dire du chef adjoint de la brigade mobile de la douane de Ouagadougou, Jonas Yaméogo, qui la dirige lui-même sur le terrain, l’initiation de cette opération vient du constat que beaucoup de motos sans plaque, et donc supposées non dédouanées, circulent dans la capitale. Les sorties des douaniers consistent, selon lui, en la saisie et le contrôle des pièces des engins, des Ouagalais, s’ils ne sont pas en règle ou ne sont pas disponibles sur place, les motocyclistes se voient délivrer un papillon pour venir récupérer leur "char" à la brigade, après vérification.

A en croire Jonas Yaméogo, une série de plaques d’immatriculation frauduleusement fabriquées et des cartes grises falsifiées ont été découvertes. Plus de 200 engins ont été ainsi saisis en une semaine d’opération. De ce lot saisi, une trentaine, dont les propriétaires sont venus attester de la régularité, a été libérée.

"J’invite tous ceux qui possèdent des motos non dédouanées et qui le savent à venir se mettre en règle pour éviter tout désagrément", lance le chef adjoint de la brigade mobile. Il est assailli aussitôt par les motocyclistes "saisis" qui débitent chacun des explications qui pour dire pourquoi ils n’ont pas sur eux les papiers de leur "char", qui pour se laver de la non-conformité des pièces.

Issa Nébié, lui, énervé, poursuit tout simplement son chemin à pied. "Ce n’est vraiment pas ma journée. Mon véhicule est tombé en panne. J’ai emprunté la moto de mon voisin pour joindre rapidement mon service et voilà qu’on me retire ça aussi. Je vais louper un rendez-vous et je ne sais même pas comment annoncer la nouvelle à mon voisin", nous lâche-t-il avant de traverser l’avenue du Burkina Faso à la recherche sans doute d’un raccourci.

"Ouaga sans char, c’est la galère !" comme dirait l’autre. Les douaniers se sont postés dans plusieurs artères stratégiques de la capitale. Au niveau du croisement entre l’avenue Babanguida et le boulevard Charles-de-Gaulle pourtant, l’opération de contrôle est plus "relaxe".

Les agents, dont la première saisie d’engins a été enlevée et ramenée à la brigade contrôlent des usagers qui arrivent au compte-gouttes. La circulation y est nettement plus fluide sans doute du fait de l’heure, 11h, ou peut-être parce que les motocyclistes en situation irrégulière se sont donné le mot et ont préféré garer leur monture.

Quoi qu’il en soit, le filet tendu par la brigade mobile de Ouagadougou continue de faire de bonnes prises. Et à la direction, les douaniers sont à pied d’œuvre avec les motocyclistes venus se régulariser.

Selon les agents, depuis la parution de l’article sur le sujet dans notre édition du mardi 14 octobre 2008, plusieurs motocyclistes sont venus d’eux-mêmes. La sensibilisation passe donc. Le chef de la brigade, Abass Sawadogo, promet que ceux qui suivront cet exemple en faisant preuve de bonne volonté bénéficieront d’un traitement de faveur.

"L’opération en cours a révélé deux cas de figure de fraude, ajoute-t-il ; soit les papiers et la carte grise sont en règle et dûment acquis à la DGTTM, mais les documents douaniers fournis pour les établir sont faux, soit les pièces de l’engin et notamment les cachets sont falsifiés en ville et n’émanent pas de la Direction générale des transports terrestres et maritime (DGTTM)".

Pour lui, il arrive que les motocyclistes ignorent que les papiers qu’ils possèdent ne sont pas bons. "Il faut sensibiliser tous les détenteurs d’engins à vérifier et à immatriculer leurs motos dès l’achat ou dans les délais et ceux qui les possèdent déjà à venir se mettre en règle".

Au regard de l’ampleur et de l’efficacité de l’opération de la brigade mobile de la douane, les fraudeurs ont du mauvais sang à se faire.

Hyacinthe Sanou Stagiaire

L’Observateur Paalga

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