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RD CONGO : Le syndrome NKunda

Publié le jeudi 25 septembre 2008 à 00h44min

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Laurent NKunda

La République démocratique du Congo est malade de sa dernière poche de rébellion, celle d’un général déchu que l’armée régulière a du mal à dompter.

Grâce à un vaste courant de solidarité africaine et internationale, la RDC a pu organiser en 2006 des élections démocratiques, les premières de son histoire, censées la mettre définitivement sur les rails de la paix et du développement. Mais c’était sans compter avec le général Laurent Nkunda dont l’action de guérilla empêche la RDC de recouvrer toute son intégrité territoriale. Le chef du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) est l’incarnation de la survivance d’un passé récent. Car, au-delà de ce général félon, il faut voir les enjeux de la région concernée par le conflit, à savoir le Nord-Kivu. C’est l’une des régions les plus riches en minérais de la RDC et donc, la plus convoitée.

Depuis la chute du régime Mobutu et l’implosion de ce qui était le Zaïre, des prédateurs s’étaient jetés sur les richesses de la région, dont ils se sont goulûment servis. Ce pillage organisé était surtout entretenu par les Etats voisins, le Rwanda et l’Ouganda, qui avaient trouvé là une source de revenus pour s’enrichir. Mais le retour à une vie constitutonnelle normale obtenue grâce aux accords de Sun City, a dû contraindre les envahisseurs à se replier chez eux . Mais ils n’ont pas pour autant lâché leur proie congolaise. Ils ont pris le soin de laisser sur place des supplétifs acquis à leur cause et chargés de préserver leurs intérêts. Ils sont donc partis sans être vraiment partis. Et en bon représentant de ce conglomérat, le général Nkunda s’évertue à bien assumer sa mission. Il tue, viole et terrorise, pour asseoir son pouvoir sur une région qu’il occupe illégalement. Cependant, la mainmise de pays comme le Rwanda sur la RDC, à travers leur pantin Nkunda, n’est pas qu’économique.

Elle est aussi politique et géostratégique. Au nom d’une prétendue protection de la population tutsi du Nord-Kivu, la rébellion de Laurent Nkunda pourrait avoir aussi reçu mandat de traquer et de persécuter les Hutus rwandais, dont on sait qu’ils sont nombreux à s’être réfugiés dans cette région après le génocide de 1994. On peut donc comprendre que ces importants enjeux empêchent le général de s’inscrire dans le mouvement de réconciliation nationale engagé en RDC. Il a trop d’intérêts à défendre par procuration. Et tant pis s’il doit pour cela, renier les accords qu’il a lui-même signés, en trouvant de nouveaux motifs de diversion comme cette proposition de négociations directes faite au président congolais Joseph Kabila. On peut tout aussi bien comprendre le refus de ce dernier d’accéder à la requête d’un individu sans légitimité et de surcroit, apatride.

Le président Kabila est dans son bon droit de chercher par tous les moyens à restaurer l’intégrité territoriale d’un pays qui en a vraiment besoin. La MONUC (Mission des Nations unies en RD Congo) affiche également cette position de fermeté quand son représentant affirme que des accords existent déjà, qui doivent être respectés. Kabila ne veut pas transiger sur la souveraineté du pays et c’est à son mérite. Du reste, il n’est pas certain qu’un nouveau round de discussions aboutira à des résultats concluants, si le mentor de Nkunda, le Rwanda, ne veut pas d’une paix dans la région.

Mais la réalité du terrain peut aussi amener Kinshasa à reconsidérer ses positions de principe. La rébellion de Laurent Nkunda résiste très bien aux assauts de l’armée régulière. Elle semble disposer de moyens militaires capables de lui permettre d’occuper encore longtemps sa zone d’influence. La MONUC observe une neutralité militaire sur le terrain et ne semble d’aucun secours pour les forces gouvernementales obligées de compter sur elles-mêmes.

Entre la volonté de faire respecter la légalité constitutionnelle et l’incapacité de l’armée à assurer ce devoir régalien, Joseph Kabila doit certainement se faire une raison. En dépit de tous les défauts de Nkunda et de l’absurdité de sa lutte, l’usage de la force peut-il, à lui seul, régler le problème ? Les chances de succès de l’option militaire semblent minces face à une rébellion déterminée, bénéficiant d’appuis qui lui procurent des armes et certainement des renseignements. Sans un solide réseau relationnel, une rébellion est vouée à l’échec. Si donc celle du Nord-Kivu continue à résister, c’est qu’elle bénéficie de complicités au sein des populations et peut-être aussi, des institutions. En tout état de cause, une solution doit être trouvée, pour mettre fin au dernier bastion d’insécurité et d’instabilité de la RDC, en éradiquant le syndrome Nkunda. Et pour y parvenir, l’art de la guerre ne suffira pas à Joseph Kabila. Il devra aussi faire appel à son sens de la négociation.

"Le Pays"

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