LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

UNITA : Dur est le passage des armes aux urnes

Publié le mercredi 10 septembre 2008 à 11h01min

PARTAGER :                          

L’ancien groupe rebelle de l’UNITA (Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola), qui s’est reconverti dans la société civile pour devenir le principal parti d’opposition du pays, a perdu les législatives organisées les 5 et 6 septembre 2008 en Angola. Après le dépouillement de quelque 80% des bulletins, le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA-parti au pouvoir) recueillait plus de 80% des voix ; l’UNITA avait environ 10% des votants et les autres partis d’opposition se partageaient le reste.

Une véritable raclée électorale s’il en est. Comble de l’humiliation, les héritiers de Savimbi ont perdu jusque dans leurs fiefs du Centre du pays que sont Huambo, Bié et Benguela.

Cependant, le plus émouvant dans toute cette affaire, c’est que ce mouvement armé, qui se cherche visiblement une repentance, a accepté la vérité des urnes. Le parti a, en effet, annoncé, tôt mardi, qu’il reconnaissait sa défaite face au MPLA.

Cette attitude fair-play est à saluer, surtout qu’elle n’est pas monnaie courante dans cette faune politique africaine où, à chaque victoire politique d’un camp, les perdants se lancent aussitôt à corps perdu dans une campagne, avec des propos acrimonieux, à travers les ondes, contre les vainqueurs et contre le verdict des urnes.

Depuis la disparition de son fondateur, Jonas Malheiro Savimbi, abattu dans le maquis par l’armée angolaise en 2002, l’UNITA est à la recherche de repères. Aussitôt après la disparition de celui dont le nom se confondait au mouvement, ses héritiers et l’armée angolaise ont signé un accord de cessez-le-feu (respecté jusque-là) qui a mis fin, officiellement et sur le terrain, à 27 ans d’un conflit ayant fait un demi-million de morts et entraîné le déplacement de quatre millions de personnes.

Aujourd’hui, le mouvement semble vouloir tourner résolument cette page triste de l’Histoire du pays d’Agostino Neto. Mais la reconversion est bien difficile pour les anciens maquisards et leur cinglante défaite à ce scrutin législatif est une preuve que le chemin pour aller des armes aux urnes est long et plein d’écueils.

Alors, avec ce score stalinien aux dernières législatives, peut-on parler de vote-sanction ? On peut répondre « oui », même s’il faut un peu nuancer cette affirmation avec ces irrégularités qui ont entaché l’élection, sans oublier le contrôle de la machine électorale et des médias par le MPLA et la campagne déguisée de son candidat qu’est Dos Santos.

Certes, sous nos tropiques, le constat est que celui qui dispose du pouvoir d’Etat a souvent les moyens de sa politique. Néanmoins, reconnaissons que ce n’est pas la seule raison de la défaite de l’UNITA qui a été créée dans les années soixante.

Le désormais parti d’opposition en Angola traîne derrière lui d’autres boulets tout aussi lourds qui entravent son ascension vers les sommets. D’abord, il y a l’absence d’un leader charismatique. Avec la disparition de Savimbi, Isaias Samakuva, son homme de confiance, a pris la tête de l’UNITA.

Mais, au risque de frustrer ce successeur bien pondéré et très intelligent, il faut dire que n’est pas Savimbi, qui veut. L’autre handicap, c’est le manque de moyens. En effet, depuis que le mouvement a quitté le maquis, il a certainement perdu le nerf de la guerre, pardon, le nerf de la paix.

Une évidence quand on se rappelle qu’elle est révolue l’époque où Savimbi et Cie occupaient les zones diamantifères du pays en se servant à volonté de cette pierre précieuse pour l’effort de guerre. Et ce n’est pas tout ! Reste encore qu’il manque à l’UNITA un homme de la trempe de Savimbi et que ce parti n’ait plus les moyens de sa politique.

Ces handicaps ne sont tout de même pas insurmontables. L’ex-mouvement rebelle a une blessure qui prend généralement du temps à cicatriser. Elle est provoquée par la mémoire collective des habitants de cette ancienne colonie portugaise qui associent ce parti repenti aux crimes commis pendant la guerre civile.

Et comme s’ils voulaient compliquer leur situation, les membres actuels de l’UNITA continuent de revendiquer l’héritage de Jonas Savimbi. Pourtant, il est grand temps pour eux de faire une grande mue, en changeant de stratégie politique, et pourquoi pas, de nom, car, pour emprunter un langage marketing, il est maintenant avéré que le concept UNITA « ne fait pas vendre ».

Issa K. Barry

L’Observateur Paalga

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique