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Réduction des tarifs du permis de conduire : Un geste plusieurs fois salvateur, mais…

Publié le mercredi 20 août 2008 à 10h57min

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A l’occasion de la Journée internationale de la jeunesse, célébrée cette année, le gouvernement burkinabè a fait cadeau à la jeunesse burkinabè d’une réduction substantielle des tarifs d’acquisition du permis de conduire dans le but de satisfaire une demande insistante des jeunes et d’améliorer l’employabilité de ces derniers. Pour une initiative salutaire voire salvatrice, c’en est une.

20 000 F CFA au lieu de 80 000 pour le poids léger et 27 500 F CFA au lieu de 100 000 pour le poids lourd, tels sont les tarifs dont bénéficieront 4 000 jeunes. Le moins que l’on puisse dire est qu’à travers les ministères en charge de la Jeunesse et des Transports, le gouvernement matérialise, une fois de plus, sa volonté de rechercher des solutions aux problèmes d’emploi qui se posent avec acuité au Burkina.

Si ce geste permet aux bénéficiaires de disposer d’un document rendant un peu moins difficile la recherche d’un emploi, il permet, par ailleurs, aux jeunes d’acquérir davantage de connaissances sur le code de la route. Cela est d’autant plus à propos que nombre d’accidents (en milieu urbain) sont dus à l’ignorance criarde des usagers de la route en matière de signalisation et de circulation. On le sait, l’ignorance dans ce domaine peut conduire à des homicides involontaires.

Combien de fois des usagers en infraction au code de la route se sont crus prioritaires et se sont retrouvés mis en bière, envoyés ad patres par d’autres usagers ? L’ignorance et (surtout) l’ignorance de son état d’ignorant peuvent être absolument destructrices. A contrario, le savoir bien utilisé élève non seulement celui qui le possède mais aussi autrui en ce sens que la vie de chacun s’en trouve sauvegardée.

En outre, l’intériorisation du code de la route est en même temps l’occasion d’en savoir davantage sur des valeurs sociales tels le civisme, la tolérance, le respect de son prochain : en effet, céder la priorité à quelqu’un sans être tenu de le faire est la manifestation d’une grandeur d’âme ; et pour construire une nation ou simplement la paix sociale, on en a vraiment besoin. Jusque-là, nos routes (urbaines en particulier) sont plutôt le lieu d’invectives, de menaces, d’injures et parfois d’accrochages physiques entre usagers estimant avoir été lésés.

Les limites de l’opération 4 000 permis de conduire

En ce sens, le gouvernement fait bien d’imaginer et de mettre en œuvre ce dont il vient de faire l’annonce. Cependant, ce geste peut ressembler à une goutte d’eau dans la mer. Ils sont certainement des millions et des millions de jeunes qui auraient souhaité bénéficier d’une telle opération ; or, ils ne sont que 4 000. Quel impact ce nombre peut-il avoir sur le terrain en termes de « civilisation » des pratiques sur nos routes et en termes de lutte contre le chômage et la pauvreté ? On ne peut pas rêver qu’il constitue une masse critique suffisante pour faire changer les choses.

Certes, il faut un début à tout et il faut avoir à l’esprit que les moyens dont dispose le gouvernement ne sont pas extensibles à souhait. Certes, il n’est pas sûr que si le gouvernement ouvrait l’initiative à tous les jeunes, les auto-écoles et le ministère des Transports pourraient faire face au flux de candidats. Mais peut-être que l’on aurait aussi pu, par exemple :

- instituer la détention obligatoire du document relatif au code de route pour tout usager motorisé au lieu de continuer à penser coûte que coûte à la mise en application de l’arrêté portant port obligatoire du casque par les motocylistes sur toute l’étendue du territoire national ;

- mettre effectivement en œuvre l’augmentation du nombre d’autobus et de lignes de desserte dans une ville comme Ouagadougou. Cela a d’ailleurs l’avantage de réduire le nombre d’accidents, le niveau de pollution et les conséquences du renchérissement galopant du coût de la vie. Bien entendu, ces deux pistes de réflexion ne sont pas exclusives, mais plutôt complémentaires de toutes les recherches de solutions aux problèmes des Burkinabè.

Des critères fiables et pertinents

Comme nous l’avons déjà dit, le nombre de 4 000 jeunes n’est rien à côté des millions de jeunes que compte le Burkina Faso. Mais, c’est déjà ça de gagné. Seulement, un autre défi est à relever par les ministères chargés de la Jeunesse et des Transports : il s’agit des critères de sélection des (déjà heureux) candidats pour faire partie des 4 000 jeunes.

A moins d’avoir été distrait dans la lecture des journaux qui ont relayé l’événement, nous n’en avons vu nulle part les critères. Si c’est par omission qu’il n’en a pas été question, les ministères concernés ont tout intérêt à les rendre publics pour deux raisons au moins : premièrement, la noblesse de l’initiative est telle qu’il n’est pas souhaitable qu’elle soit entachée par des suspicions et des interprétations malveillantes et tendancieuses ; deuxièmement, tout détenteur d’une parcelle du pouvoir public doit rendre compte, d’une manière ou d’une autre, de ce qu’il fait au nom et au bénéfice du peuple, de qui il détient, en dernière instance, sa légitimité.

La nécessité des bilans périodiques

A l’instar de nombre de ministères, celui de Justin Koutaba est sur plusieurs fronts, preuve de son dynamisme. Cependant, comme d’autres départements, il se dégage l’impression selon laquelle, il n’y a pas de comptes rendus périodiques faits à l’opinion publique. Certes, de temps en temps, des points sont faits sur tel ou tel projet ou sur tel ou tel grand dossier. Mais il aurait été plus intéressant de présenter les choses de sorte que le lecteur ou l’auditeur entrevoient un liant non seulement entre les différents projets mais aussi entre les différents points ou bilans qui sont faits. Le mieux est l’ennemi du bien, mais sans la recherche permanente du mieux, le souci de la satisfaction continue de nos besoins ne saurait être comblé.

Z.K.

L’Observateur

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