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Jardinage aux abords du barrage : Une activité lucrative menacée

Publié le mercredi 23 juillet 2008 à 09h00min

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Le secteur de la pépinière semble méconnu ou négligé, en tous cas peu développé au Burkina. Pourtant, ceux qui y travaillent ne se plaignent pas. Discrètement, les pépiniéristes contribuent grandement au projet "Ouaga la verte". Nous nous sommes intéressés à cette activité qui, pour certains, mérite d’être développée.

Longez les abords du barrage de Tanghin, vous les trouverez là, du matin au soir, ces pépiniéristes qui ont fait de ces lieux leurs "bureaux". D’autres se retrouvent ailleurs dans la ville, le long de la clôture de l’aéroport de Ouagadougou, allant vers le rond-point de la Patte-d’Oie. Mais ils s’installent de préférence aux abords des points d’eau de la ville. C’est aux environs de 11h 15, ce matin du 15 juillet, que nous avons rencontré Raogo Didier Bonkoungou au niveau du barrage de Tanghin. Nous prenant pour des clients, il s’empresse de nous accueillir avec amabilité dès notre arrivée. Lorsque nous lui apprenons l’objet de notre visite, il ne paraît pas déçu, et nous lance chaleureusement : "Venez donc découvrir nos plantes !". A première vue, on aurait pensé être en face d’un bosquet tant les plus grandes plantes sont touffues : une véritable verdure qui ne laisse pas indifférents les écocitoyens.

L’air très plaisant, le sourire au coin des lèvres, il nous promène à travers son jardin et nous présente une diversité de plantes de plus d’une soixantaine de variétés. D’abord, les plantes d’embellissement : des rosiers, des calicots, une centaine de palmiers, des gacanieas, des cyprès, des arocarias... Ensuite, les plantes de reboisement : des acacias, des eucalyptus, ... Les agrumes : des manguiers, des citronniers hybrides, des orangers, des tangelots... Selon M. Bonkoungou, les prix de ces plantes varient selon les espèces et la taille, et vont de 100 F CFA à plus de 100 000 F CFA. Il nous montre de tous petits zacanias de 1000 F CFA et des grands de 100 000 F CFA, des palmiers d’ornement de 25 000 F CFA, des ravenalas de 15 000 F CFA, des cyprès de 25 000 F CFA ... Ces plantes sont regroupées par espèces et par famille.

Pour notre pépiniériste, l’entretien de ces plantes ne pose aucun problème en saison pluvieuse. "C’est en saison sèche que le vrai travail commence", avoue-t-il. Mais il reconnaît que ces dernières années l’eau du barrage ne tarit plus complètement. "En plus, ajoute-t-il, nous avons creusé sur place des puits et l’eau du canal coule en permanence". C’est pourquoi M. Bonkoungou ne choisit pas ses employés au hasard :" J’ai 3 frères et 4 autres qui travaillent avec moi. Je préfère les prendre en saison sèche. Si tu les prends en saison pluvieuse, ils te fuient en saison sèche car ils trouvent que c’est trop dur..."

Une activité passionnante

M. Bonkoungou affirme faire son travail beaucoup plus par amour. "C’est en commençant par la maraîcherculture depuis mon CE1 que je me suis intéressé au jardinage". Comme tant d’autres, il dit n’avoir pas reçu de formation particulière dans ce secteur d’activités, mais aujourd’hui, il peut donner des cours en maraîcherculture. Sa chance, c’est qu’il a été en contact avec un Italien qui était venu à l’EIER pour des recherches dans ce domaine. Les recherches de ce dernier étaient infructueuses jusqu’au jour où un de ses amis les a mis en contact. Le fumier de la porcherie, riche en azote, qu’il conseilla à l’Italien se révéla efficace. "Depuis lors, il ne m’a plus lâché et durant un an, nous avons échangé de riches expériences", ajoute-t-il.

Didier Bonkoungou dit vivre de ce métier. Avec fierté, il confie : "Je paie la scolarité de mes 3 enfants et viens en aide à mes frères". Cependant, il reste hésitant sur ce qu’il peut gagner annuellement. Exaspéré par notre insistance, il sourit, remue la tête et affirme qu’il peut avoir 1 à 2 millions de F CFA par an. Sur la ligne où se trouve Bonkoungou, on peut dénombrer une soixantaine d’autres pépiniéristes. Jusqu’à présent , ils sont tous exempts des taxes de l’Etat. Organisés en association (il en existe deux d’après M. Bonkoungou), ils entretiennent de très bonnes relations avec le ministère de l’Environnement et du Cadre de vie avec qui ils initient même des rencontres. A chaque saison des pluies, chaque pépiniériste offre volontiers des pieds de plantes à ce ministère, en vue de contribuer au reboisement du pays. Pour ces jardiniers, l’hivernage est la période de forte rentabilité et les plantes d’embellissement sont les plus prisées.

Les semences introuvables sur place

Cependant, les difficultés ne manquent pas, selon Didier Bonkoungou. Quand il en parle, il prend un air sérieux. Ces difficultés se situent au niveau de l’impossibilité d’obtenir sur place les semences. Il faut les importer des pays voisins avec des correspondants qui détiennent le réseau de commercialisation des graines. Ensuite, le visage soudain rembruni au milieu de ses plantes, la colère lui montant quelquefois à la gorge, il s’en prend à l’ONEA et à la mairie de Nongremassom. Ces derniers, selon Bonkoungou, ont signé un accord de 5 milliards de F CFA avec des partenaires européens pour traiter les eaux du barrage de Nongremassom afin de les y installer.

Chose qui n’a jamais été faite alors que ces services exigent leur déménagement dans ce nouveau site. Et il ajoute que ceux qui s’y sont rendus sont revenus parce que l’eau de ce barrage n’a pas été traitée et a brûlé leurs plantes. Les pépiniéristes ajoute-t-il, ont dû recourir au maire de Baskuy avec qui ils entretiennent de très bonnes relations pour se faire entendre et provisoirement résoudre ce problème, car les menaces de déguerpissement planent toujours sur les pépiniéristes du barrage de Tanghin.

Par Albert ZONGO (Stagiaire)

Le Pays

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