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Le Burkina obtient 491 millions de dollars du MCC : C’est bien mais attention...

Publié le lundi 21 juillet 2008 à 12h52min

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De l’argent frais pour le pays : qui peut être contre ? Personne ! Mais si l’on s’en félicite, on peut faire les deux remarques suivantes.

La première, c’est qu’au niveau des conditions d’octroi, il semble que ce soit plus des calculs politiques qui ont amené le MCC à débloquer l’argent qu’autre chose. Pourquoi ? Parce que les conditions posées par le MCC ne semblent pas remplies par nos autorités. Les voici, reprises d’ailleurs par le Sidwaya du 18 juillet dernier : « Une gouvernance juste et démocratique favorisant le pluralisme politique et l’Etat de droit, le respect des droits humains et des droits civils, la protection de la propriété privée, la transparence et la lutte contre la corruption, voilà le credo du MCC » ! Pour ce qui concerne la gouvernance juste et démocratique qui doit favoriser le pluralisme politique et l’Etat de droit, on peut tout dire sauf qu’elle a avancé chez nous : elle n’a fait que reculer avec ce « Tuk Guili » insupportable suite à tant d’élections bidouillées, de coups d’Etat dans les partis reconnus même par ceux qui nous dirigent : ce n’est pas pour faire honneur à notre pays.

Pour ce qui est du respect des droits humains, si le Burkina Faso a quelque peu changé et que les prisonniers politiques sont quasiment en voie de disparition (exception faite du plus célèbre détenu Naon Babou !), on doit dire que concernant l’impunité des dossiers sensibles, les choses ont plutôt régressé. On avait cru qu’on allait voir le bout du tunnel et on s’est trompé : l’ affaire Thomas Sankara, depuis le passage de Ban Ki Moon, est reléguée aux oubliettes et ne parlons pas de celle de Norbert Zongo : on a carrément bloqué le dossier ! C’est pas joli, joli et notre maison Justice n’est pas comme on le sait, un modèle du genre !

Maintenant, concernant la propriété privée, on peut dire RAS (Rien à signaler) sauf à mettre le doigt sur ce processus pernicieux de récupération des terres rurales, par hectares entiers, par ceux bien placés au détriment des populations du crû, et pas toujours pour des investissements heureux.

Enfin, pour ce qui est de la corruption, qui est aussi une des conditions clef de l’octroi de financements aux pays les sollicitant, le Burkina Faso ne peut que rougir d’être rentré, et solidement hélas, dans la triste liste des pays les plus corrompus ! La transparence est loin d’être une réalité au Faso. Prenons seulement l’exemple des contrats miniers : on peut tout dire sauf que la transparence y règne ! Quant à la libéralisation de l’économie, c’est une libéralisation mais pas du tout saine qui a lieu au pays des hommes intègres : c’est bien connu, les sociétés qui ont été privatisées ont été surtout reprises par les prête-noms de nombre de bonzes du régime…

Alors, peut-être que le Burkina a été retenu parce que la situation chez nous est moins catastrophique qu’ailleurs, que donc au pays des aveugles, les borgnes sont rois. Mais peut-être aussi, comme beaucoup le pensent, que le pays a décroché le gros lot à cause des OGM dans lesquels il s’est lancé à corps perdu et également, à cause de ses positions diplomatiques qui plaisent. A cet égard, il n’a pas hésité à renier ses anciennes amours avec Charles Taylor (ainsi qu’en témoignait encore le Sidwaya du 18 juillet 2008 : « Dès lors que Taylor a commencé à se laisser enivrer par les effluves du trône, le pays des Hommes intègres s’est démarqué de lui, non sans l’avoir condamné »). Toujours sur le même plan, il y a eu ce refroidissement des relations du Burkina Faso avec la Libye de Kadhafi puisque, coup sur coup, Blaise Compaoré, après avoir boudé son projet de gouvernement continental, a (bien que déconseillé par le « Guide ») fait le déplacement en Israël pour le 60 ème anniversaire de cet Etat. Et puis, il y a eu aussi tout dernièrement ce vote du Burkina aux côtés des Américains à l’ONU pour des sanctions contre Mugabe.

Maintenant, l’argent va rentrer : on en connaît grosso modo la destination, mais seulement grosso modo, et c’est ce qui est dommage. Il faudrait maintenant assurer la traçabilité de cette aide pour ne pas qu’une fois de plus, elle serve en grande partie à d’autres qu’aux destinataires véritables.

C.Y

San Finna

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