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Hausse du prix de l’essence : 3 jours de sursis et pan !

Publié le mercredi 16 juillet 2008 à 11h19min

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Tout a commencé il y a quelques jours lors d’un point de presse du gouvernement : "Les prix des produits pétroliers pourraient connaître une hausse", avait dit, en substance, le ministre de l’Economie et des Finances, Jean-Baptiste Compaoré. Et le vendredi 11 juillet 2008, le secrétaire général du ministère du Commerce, de la Promotion de l’entreprise et de l’Artisanat, Jean-Claude Bicaba, annonce la nouvelle : le super coûtera désormais 720 francs, le gasoil 695.

Le constat rapide que l’on peut faire de ces augmentations est que le prix du gasoil a plus augmenté que celui de l’essence super : en valeur absolue et surtout en valeur relative : 92 francs, soit plus de 15% pour le premier, et 50 francs, soit 8% pour le second. L’analyse qu’on est tenté d’en faire, c’est que de tels chiffres font penser que le gasoil subventionne l’essence super. Autrement, le prix du premier aurait été moins élevé si celui de la seconde devait refléter davantage la réalité du marché.

Du coup, le double avantage dont les clients bénéficiaient en achetant le gasoil tend à disparaître pour ne faire place qu’à un seul : c’est connu que ce produit coûte vraiment moins cher que l’essence super, c’est connu aussi que les moteurs Diesel consomment moins de carburant que ceux à essence. Aujourd’hui, il ne reste que ce dernier avantage, car, à 695 francs le litre, son prix est quasi-égal à celui de l’essence super : à moins d’acheter de grandes quantités de gasoil, il est difficile de sentir que celui-ci est moins cher que l’autre.

Avec 25 francs de différence, c’est, comme disent les Mossé : "50 francs ne valent pas mieux que 25", pour dire que "c’est même chose, pareil". Avec cette situation, la plupart d’entre nous sont tentés par les plaintes, les complaintes et les jérémiades ou par la courte échelle, la fin qui justifie les moyens, ou encore par les deux types de comportement à la fois. Ce sont là des tentations "normales", auxquelles tout individu en situation de précarité est d’emblée soumis.

Pénurie et raréfaction sont sources de progrès

La différence entre les humains, c’est la capacité ou au moins la volonté de chacun de surmonter ses tentations, soit en redimensionnant son train de vie, soit en se trouvant d’autres sources de revenus de façon un tant soit peu honnête.

La seconde solution nous semble bien meilleure, car elle est source de création de richesse et de promotion des valeurs tels le travail, le bien et le juste. Elle ne cause pas de tort à autrui (individu ou collectivité). Mieux, elle matérialise cette pensée du philosophe : "Donner aux humains une cité à construire, vous en ferez des frères".
Cela étant, l’histoire de l’humanité nous apprend que les périodes d’abondance sont la résultante d’épisodes difficiles, marqués ou par des catastrophes naturelles ou par des dysfonctionnements internes des sociétés (guerres, inadéquation entre poids démographique et ressources disponibles, etc.).

Pour que l’abondance survienne, les humains sont contraints de chercher et de trouver l’avantage de l’inconvénient que constitue la catastrophe ou la pression démographique. C’est pourquoi, pour les sciences sociales, dire que c’est en période de crise que germe et pousse l’arbre du progrès est une évidence, même si celle-ci n’est pas toujours critère de vérité et preuve de véracité.

En effet, pour ces sciences, le progrès est lié, soit à des facteurs exogènes (catastrophes naturelles), soit à des facteurs endogènes (crises politiques), soit un à un peu des deux. C’est dans leur lutte pour la survie que les humains (individuellement ou collectivement) font des bonds qualitatifs. L’agriculture, par exemple, a été rendue nécessaire à cause de la raréfaction des céréales ou des tubercules, qui poussaient à l’état sauvage.

Dieu ou la nature (c’est selon) nous a dotés de facultés à même de nous aider à nous tirer d’affaire dans n’importe quelle situation pour peu que nous y croyions et que nous fassions preuve de détermination. Ces qualités s’expriment peu ou pas du tout quand nous n’avons pas le dos au mur.

Aujourd’hui, étant dans le pétrin, il est certain que nous ne nous laisserons pas mourir. Mieux, dans la réaction de chacun et de tous, nous nous donnerons les moyens de réussir. De la prophétie, ça y ressemble, mais réaliser le progrès, c’est d’abord croire en une sorte de prophétie.

Une première de la part des gouvernants

Après trois jours de sursis (du 12 au 14 juillet) depuis l’annonce de l’augmentation des prix des hydrocarbures, les étiquettes ont valsé à la pompe hier 15 juillet. Trois jours, ce n’est pas assez, et il faut comprendre que les consommateurs râlent ou raillent. Pour la majorité des Burkinabè, qui sont dans l’incapacité de faire le plein de leurs moyens de déplacement, les trois jours n’ont point de signification. Et le gouvernement aurait dû faire plus d’effort.

Cependant, sauf oubli ou erreur de notre part, c’est la première fois que s’écoule du temps entre l’annonce de l’augmentation des prix du carburant et leur entrée en vigueur effective. C’est également la première fois qu’un ministre annonce une probable hausse des prix des hydrocarbures et que passent des jours et des jours avant qu’on n’annonce les prix qui entreront en vigueur plus tard. De cette attitude de l’exécutif transparaissent :
- la volonté de compréhension à l’endroit du consommateur final pour qui la vie est vraiment dure ;
- le souci de permettre à ce dernier d’intérioriser et d’"accepter" la hausse ;
- la préoccupation qui est de donner l’occasion à qui de faire des provisions, à qui de profiter, ne serait-ce que momentanément, du maintien des anciens prix ;
- un changement de la communication gouvernementale dans l’annonce de la hausse de certains prix. C’est tout à son honneur et un acte qu’il faut apprécier positivement. Quand on est apte à dénoncer la moindre erreur des gouvernants, on doit être tout aussi prompt à reconnaître leur moindre décision salutaire.

Cependant, il y a lieu de leur rappeler que le geste salutaire qui a été posé doit être concomitant avec une réflexion de fond visant à apporter des solutions structurelles à la situation : ainsi, par exemple, l’augmentation du parc de la SOTRACO, du nombre des lignes et de la fréquence des autobus, dont il avait été question, gagnerait à être réalisée. Les solutions ponctuelle ne sont intéressantes que si elles permettent de créer les conditions pour rechercher les solutions structurelles. Espérons que c’est le cas.

Zoodnoma Kafando

L’Observateur

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