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Tertius Zongo, un an après : “La solution à la vie chère, c’est de produire plus”

Publié le mercredi 11 juin 2008 à 11h57min

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Hier 10 juin 2008, le gouvernement du Premier ministre Tertius Zongo a bouclé sa première année d’exercice. Pour faire le point des actions menées, M. Zongo, accompagné d’une vingtaine de membres du gouvernement, a animé une conférence de presse. Après 12 mois de gestion de l’Exécutif, le locataire de la primature affirme que d’énormes efforts ont été fournis, mais il reconnaît humblement que “tout n’a pas été parfait au Burkina Faso”.

“Je voudrais, avec grande humilité, me réjouir des résultats auxquels le gouvernement est parvenu dans un environnement économique international particulièrement très hostile”. C’est en ces termes que le Premier ministre, Tertius Zongo a planté le décor de la conférence de presse, marquant le bilan d’un an de fonctionnement de son gouvernement, le 10 juin 2008 à Ouagadougou. Selon Tertius Zongo, la bonne tenue des fondamentaux de l’économie burkinabè autorise de nourrir l’ambition de réaliser, à terme, une croissance économique forte et de qualité. “C’est vrai, en 2007, des facteurs exogènes et des contraintes naturelles ont imposé un rythme de croissance de 4% à notre économie. Les prévisions 2008 sont à une légère accélération de cette croissance à 5%.

La poussée inflationniste (6,9%) observée en 2008 du fait de la surchauffe des prix internationaux devrait s’atténuer pour s’établir à 2,9% en fin de période”, rassure Tertius Zongo. A cette conférence de presse marquant l’an I du gouvernement Zongo, les questions d’ordre économique, politique, de la gouvernance, etc, ont été abordées. A entendre le Premier ministre, si le ciel est clément, les Burkinabè devraient manger et boire à leur faim.

Il soutient que “les objectifs en matière de production au cours de la campagne de 2008-2009 sont de réaliser, entre autres, plus de 4 millions de tonnes de céréales dont 260 000 tonnes de riz couvrant 60% des besoins nationaux de consommation et 600 000 tonnes de coton graine pour prétendre à notre position de 2005”. “Près de 16 milliards de F CFA seront mobilisés par l’Etat pour soutenir les producteurs de céréales dans l’acquisition des semences améliorées, des engrais et pesticides, de même que dans l’appui-conseil”, a-t-il poursuivi. Toujours à propos du secteur agricole, le Premier ministre a annoncé que la subvention de 6,5 milliards accordée aux producteurs de coton portera à 22,5 milliards de F CFA les appuis à l’accroissement de la production pour la campagne 2008-2009 au Burkina Faso.

Tertius Zongo veut être honnête avec les Burkinabè

A propos de la vie chère, le Premier ministre a indiqué qu’il va être honnête avec tout le monde afin que l’on avance. “Les seules solutions qui étaient viables pour lutter contre la vie chère, c’est celles que nous avons prises et que les autres ont suivies. Des gens ont fait autre chose, mais ils sont revenus là-dessus”, a-t-il répondu. En somme, le Premier ministre a relevé qu’il ne sert à rien d’être démagogue car “les conditions objectives d’évolution du marché étaient telles qu’on ne pouvait pas ne pas avoir une hausse des prix des produits sur le marché”. Et de souligner qu’en 2007, les stocks mondiaux de produits alimentaires ont baissé de 6,5% alors que la demande mondiale a augmenté de 3,5%. “On n’a pas besoin d’aller dans une grande école pour comprendre qu’il y a un problème et qu’il s’agit d’un problème d’offre”, a martelé M. Zongo.

Face à l’insistance des hommes de médias sur la question de la vie chère, Tertius Zongo a fini par dire : “Je veux être sincère. C’est vrai que ce que nous avons fait n’a pas été à la hauteur des attentes, ou peut-être que notre manière de communiquer sur ce qu’on a fait n’a pas été claire parce que les gens ont cru que les prix à la première fixation devraient être maintenus indéfiniment”. Au-delà de toute polémique,
M. Zongo invite les Burkinabè à regarder devant eux, car la solution se trouve dans ce que nous ferons demain. Et la solution, a-t-il relevé, c’est de produire plus. En cela, le Premier ministre a affirmé que les semences améliorées seront distribuées à tous les producteurs agricoles et que 700 tracteurs sont déjà là et attendent d’être mis à la disposition des agriculteurs contre paiement.

Mais Tertius Zongo a prévenu qu’il faut que l’indiscipline des producteurs dans les plaines aménagées cesse. Il a appelé le ministère en charge de l’Agriculture à jouer son rôle, à être aux côtés des producteurs et à les encadrer. Le Premier ministre a également laissé entendre que le secteur privé a été invité à s’impliquer dans l’agriculture pour en faire un “business”. “1 600 hectares sont déjà disponibles à cet effet à Bagré”, a confié M. Zongo.

“Il y a un problème de suivi dans le gouvernement”

Tertius Zongo dit avoir félicité les membres du gouvernement pour le travail abattu. “Chacun de nous à des limites. Dire qu’on est satisfait d’un travail ne veut pas dire de façon linéaire que tout a été bon. L’équipe gouvernementale a fait de son mieux”, a mentionné le Premier ministre. Mais il reconnaît que naturellement, il y a eu des points de faiblesse qu’il faut travailler à corriger. Et M. Zongo de révéler qu’il y a eu quelquefois des faiblesses dans l’organisation et la conduite des hommes dans les ministères. Comme évaluation de son gouvernement, Tertius Zongo dit : “La grosse insuffisance à corriger dans le gouvernement, c’est le problème de suivi”. Selon lui, il y a de très bonnes idées qui sont émises, de très bons débuts d’actions qu’on voit, mais très peu de gens continuent de suivre. “On ne peut pas avoir de bons résultats quand il n’y a pas de bon suivi”, a noté M. Zongo.

A propos de l’autorité de l’Etat, le Premier ministre a souligné qu’il n’y a pas un seul pays au monde qui s’est développé sans un Etat capable d’organiser le développement. En cela, il a noté que l’Etat ne donne pas les bons d’essence aux gens pour qu’ils aillent apaiser des tensions. “En ne distribuant pas les bons d’essence, cela permettra à l’Etat d’investir pour apaiser durablement les tensions sociales”. Pour ceux qui disent attendre les sanctions à l’attention des fraudeurs et des corrupteurs, le Premier ministre a indiqué : “Tous ceux qui ont des comportements déviants seront sanctionnés. Les vendeurs de sacs de riz de 50 kg réduits à 40 kg sont en prison”. Et d’ajouter que le dossier du directeur général de la Douane suit son cours avec un juge d’instruction qui poursuit les investigations. Tertius Zongo qui dit être détenteur de certaines informations avertit que même COTECNA pourrait être contrôlé car “il semble qu’il y a des brebis galeuses”.

En ce qui concerne la cité universitaire de Kossodo, le Premier ministre a rassuré que les travaux aboutiront. Selon lui, le chantier a connu des difficultés liées à la baisse du dollar et à l’approvisionnement en matériaux de construction. En définitive, le chef du gouvernement retient que tout n’a pas été rose, mais beaucoup a été entrepris. En tous les cas, il a indiqué que : “Le gouvernement continuera de tenir ferme le gouvernail, mais tous les Burkinabè devront se mobiliser davantage pour donner tout le sens au plébiscite accordé au président du Faso en novembre 2005 (...)”.

Ali TRAORE (traore_ali2005@yahoo.fr)
Boubakar SY


La méthode Zongo à l’épreuve

Lors de sa conférence-bilan d’un an d’exercice à la tête de l’Exécutif, Tertius Zongo a laissé entendre au détour d’une question qu’il y avait “un problème de suivi au niveau du gouvernement”. Un petit bout de phrase qui n’en traduit pas moins toute la difficulté que même les premiers responsables ont à adopter la méthode Zongo qui veut cultiver l’excellence et la performance. Comment mettre en œuvre une méthode quand il n’y a pas de suivi des décisions prises et que les uns et les autres se complaisent dans le train-train. Une routine sclérosante et “in fine” “assassine” de tous les efforts entrepris pour sortir du sous-développement. Si d’aucuns ont l’impression que rien ne bouge, la raison se trouve là et, cette déficience dans l’action a été renforcée toujours, selon Tertius Zongo, par une déficience dans la communication gouvernementale. Et, Zongo a illustré son propos par la gestion de la crise sociale consécutive à la vie chère, où, le gouvernement n’a pas su ou pu expliquer aux populations pourquoi les prix des produits exonérés des droits douaniers ont continué à croître. Il eut fallu expliquer que malgré cette détaxe, le Burkina Faso, important l’inflation des autres avec leurs produits, le prix du riz par exemple ne pouvait être contenu à 15 000 F CFA.
Le prix de la tonne de riz a , en effet, connu une augmentation substantielle entre fin 2007 et aujourd’hui, ce qui explique son prix de vente détaillant actuel. Un prix de vente qui aurait du reste été supérieur, si le gouvernement n’avait pas adopté cette batterie de mesures. Pour un Etat qui veut “organiser le développement”, cela fait un peu désordre. En indiquant qu’il faut “un changement global au niveau de la méthode de gestion”, Zongo laisse implicitement entendre qu’il faut un remaniement ministériel. On ne peut pas par exemple promettre “urbi et orbi” des amphithéâtres aux étudiants dans un délai donné pour ensuite constater que rien n’est fait à l’issue de ce délai. C’est vrai que le ridicule ne tue pas, mais il décrédibilise pour longtemps. A l’échelle d’un gouvernement, il “tue” plus que l’inaction, surtout en Afrique avec la valeur que l’on accorde à la parole. A l’allure où vont les choses, Zongo apparaîtra comme un adepte des effets d’annonce, surtout qu’une certaine opinion l’accuse de trop parler.
L’an II devra donc être celui des actions suivies, appliquées et expliquées aux populations pour faire de ce concept de gouvernance partagée et assumée par tous, une réalité. Sans être un devin, cela passe par un “réformage” du gouvernement. La question reste de savoir quand, même si l’urgence des dossiers commande que cela soit fait diligemment. Faut-il le rappeler, le programme quinquennal du président du Faso est déjà à mi-parcours. Il y a donc urgence.

Boubakar SY
Ali TRAORE

Vu et entendu

* A hue et à dia

Une conférence de presse qui tire dans tous les sens, c’est l’impression qu’a laissée la dernière rencontre du Premier ministre avec les hommes de médias. Plutôt que de compartimenter cette conférence de presse en divers volets (politique, économique, social, culturel), les organisateurs ont préféré laisser l’initiative aux journalistes, contraignant les uns et les autres à suivre le premier intervenant de chaque série de questions. Si fait que l’on est “sorti” de la crise alimentaire pour “rentrer” dans les cités universitaires et les routes, pour ensuite revenir dans la crise alimentaire. Il n’ y avait donc pas de fil conducteur, et, n’eut été la verve et l’humour du Premier ministre, on se serait ennuyé lors de ces deux heures d’horloge qu’a duré la conférence.

* Pertinentes oui, mais...,

Les mesures fiscales et budgétaires adoptées par le gouvernement pour lutter contre la vie chère ont été qualifiées de “pertinentes” par le Premier ministre. On veut bien le croire, même si certains observateurs se demandent si lesdites mesures, combinées à la structure de notre économie qui fait que nous exportons l’inflation des autres, ne vont pas entraîner une déflation brutale de nos économies avec un risque de dévaluation à la clé. Une question qu’on aurait aimé poser au Premier ministre, ce que la structuration du point de presse n’a pas permis

* “Conseil des ministres” délocalisé

Le ban et l’arrière-ban du gouvernement sont venus prêter main forte au patron lors de sa rencontre avec la presse. Du coup, ladite rencontre avait des allures de conseil des ministres même si aucun des “gourous” présents n’avaient droit à la parole. Pour autant, ils n’ont pas perdu leur temps, car le “boss” a donné des “cours” pour les rendre plus efficaces dans l’action. Reste à espérer que les uns et les autres sauront mettre ces “leçons” à profit pour une action gouvernementale plus performante.

Recueillis par B. SY et A. TRAORE

Sidwaya

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