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CDP : liberté d’expression ou “laisse-guidon”

Publié le mardi 3 juin 2008 à 12h51min

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Le dernier congrès du CDP avait pris la résolution de réanimer la flamme du militantisme. L’objectif était clair, inculquer une culture de militantisme aux adhérents et récompenser ceux qui se battent sur le terrain, pour le triomphe des idéaux du parti. La cooptation et le parachutage de personnes sans passé militant ayant frustré de nombreux militants à la base et risquant d’éroder la capacité de mobilisation du parti. A l’occasion de ce congrès, certains militants avaient écopé de blâmes tandis que d’autres avaient reçu des lettres de félicitation de la direction du parti de l’épi et de la daba.

Avant ce congrès, il y a eu l’expérience des primaires vite étouffée par le poids du centralisme démocratique.
Mais beaucoup de choses se sont passées depuis ce congrès. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Il y a eu la tenue des législatives, la nomination d’un nouveau premier ministre du nom de Tertius Zongo, un remaniement ministériel,…la naissance de la FEDAP-BC. Il ne faut pas oublier ni sous-estimer le non lieu intervenu entre temps dans l’affaire Norbert Zongo. Ce non lieu a compté beaucoup dans l’agenda et l’ambition de certains.

Depuis quelques temps, disons depuis le remaniement ministériel et la naissance de la FEDAP-BC, un courant issu de l’ex CNPP/PSD et compagnie s’est créé au sein du parti. Au nom de sa liberté d’expression, il revendique une meilleure gestion du parti, dans la transparence, l’équité et la démocratie. Ce courant s’étale dans la presse en explication des problèmes du parti, exposant en public le linge sale de la famille. Ceux qui animent ce courant, même s’ils ne font pas partie des militants de la première heure, on ne peut pas les classer parmi les ouvriers de la 25e heure. Ce sont des « poids lourds » du méga parti. Ils sont donc au fait des affaires et des objectifs du parti, s’ils n’en sont pas simplement les initiateurs. Alors pourquoi, en viennent-ils à exposer leurs griefs sur la place publique ?

Le CDP n’aurait-il pas en interne un cadre de débat ? Ces éminentes personnalités ne pouvaient-elles pas provoquer une réunion extraordinaire des instances du parti pour exposer leurs préoccupations ? Surtout que dans leur rang, on trouve des passionnés de Blaise Compaoré, dont on ne peut douter de leur intimité pardon de leur proximité avec le Président du Faso.

Ces sorties médiatiques traduisent certainement un malaise lié au déficit d’expression au CDP. On peut penser qu’un verrou a sauté, libérant les uns et les autres de leur torpeur et déliant ainsi les langues. Les partisans de la liberté d’expression jubilent de ce vent nouveau qui souffle sur le « parti-Etat », qui ressemblait à une caserne où c’était la loi de l’omerta qui y régnait. Ce vent nouveau, pensent-ils va désormais nourrir le débat démocratique. Mais n’est-il pas trop tôt pour en jubiler ?Il se peut que cette situation traduise autre chose. Le parti de l’épi et de la daba, ressemble à l’analyse, à un bateau sans capitaine. Les uns ayant rejoint avec la direction du vent, le navire battant pavillon FEDAP-BC, se souciant plus de leur nouvelle destination que de là d’où ils viennent. Les autres, même restant dans le navire CDP, observent un horizon brumeux, se soucillant de trouver un refuge, vu que le paquebot délaissé commence à couler.

Il faut ajouter à tout cela les effets du dernier remaniement ministériel dont a été victime Salif Diallo, le premier vice-président du parti chargé de l’orientation politique. Le fait que le parti ait félicité le camarade pour sa contribution au gouvernement n’est pas un fait anodin et ordinaire. Cela démontre la poigne qu’il avait sur le parti lié à sa proximité avec le chef de l’Etat. Il était en quelque sorte le bras ou la bouche du parti auprès de la plus haute autorité du pays. Et sa position dans le gouvernement lui permettait de mettre de l’ordre dans le parti. Malheureusement depuis son départ du gouvernement, qui traduit une certaine rupture avec le big boss, il n’a plus cette capacité de se faire craindre.

Ces différents facteurs font qu’aujourd’hui, le CDP semble être devenu « laisse guidon », pour reprendre l’expression d’un opposant d’obédience sankariste qui justifiait son entrée au gouvernement protocolaire Yonli I par le fait que le pays était « laisse guidon ». Actuellement le parti est sans âme, un géant aux pieds d’argile.
La direction statutaire du CDP semble ne plus maîtriser les événements, elle navigue à vue. Si on était dans un système démocratique normal, on pourrait en regardant ce parti aller à la dérive et échouer sur un écueil. Malheureusement, ce parti a tellement ratissé large que lorsqu’il sera enrhumé, c’est toute la nation qui éternuera.

N.A

Bendré

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