LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Pekin- Taïpei : Le temps de la détente

Publié le lundi 2 juin 2008 à 11h54min

PARTAGER :                          

La ligne d’horizon de l’hypothétique indépendance de Taïwan s’éloigne avec l’arrivée du tout nouveau président élu Ma Ying-Jeou. A peine s’est-il revêtu de ses nouveaux habits de chef d’Etat que le nouveau président taïwanais a clairement laissé entendre qu’il ne comptait pas poursuivre les politiques indépendantistes privilégiées par son prédécesseur. Il favorisera, lui, plutôt un rapprochement avec la Chine communiste. Un rapprochement qui n’a pas tardé à entrer dans sa phase active avec la visite historique en Chine - c’est un signe des temps - du président du Kuomintang (KMT), le parti nationaliste taïwanais revenu aux affaires après dix ans d’absence. En clair, le retour au pouvoir du KMT dont est issu le nouveau président a fait place à la détente.

Le peuple taïwanais savait Ma Ying-Jeou favorable à ce rapprochement avec la Chine communiste. Il n’a pas hésité à lui accorder ses suffrages. Ma Ying-Jeou a donc été élu sur la base de ce programme. Au demeurant, l’argument économique aurait porté de nouveau au pouvoir le Kuomintang cette année.

Le nouveau président élu a tout de suite affiché ses ambitions : établir un marché commun avec la Chine qui entretient déjà avec l’île, des échanges commerciaux importants, Taïwan étant aujourd’hui l’un des plus gros investisseurs en Chine. Ma Ying-Jeou prévoit aussi d’établir prochainement des vols directs entre la Chine communiste et l’île nationaliste, et d’autoriser jusqu’à 3000 touristes chinois à se rendre à Taïwan. Mais de là à croire à une proche réunification des deux Chines, il n’y a qu’un pas qu’il serait prématuré de franchir. Au demeurant, cette épineuse question ne devrait pas figurer à l’ordre du jour des prochaines discussions entre Pékin et Taipei.

Est-il encore besoin de le rappeler, la Chine continentale ne cesse de revendiquer Taïwan qu’elle considère comme faisant partie de son territoire. En tout cas, il n’est pas question que l’ancienne Formose obtienne son indépendance, sous peine de s’attirer les foudres de la Chine populaire, au figuré comme au propre. Et tout indique que l’Empire du milieu ne badine pas, elle qui continue notamment de pointer sa centaine de missiles vers l’autre côté du détroit.

Jusque-là, la république de Chine (Taïwan) court toujours après une reconnaissance internationale et doit à présent en être sans doute quelque peu lassée. Rien d’étonnant à cela : elle a eu le malheur de ne pas compter parmi ses alliés tous les puissants de ce monde. Ses quelques rares soutiens proviennent d’Etats qui ne pèsent pas lourd, et qui adhèrent à sa cause indépendantiste moins par conviction que par espoir de récolter quelques largesses de cette île qui connaît un essor économique prodigieux. Certes, les Etats-Unis, qui soutiennent militairement Taïwan, y ont de gros intérêts. Mais Washington ne s’aventurerait pas à froisser le grand partenaire chinois en penchant pour une réintégration de Taïwan au sein des Nations unies. Bref, ils ménagent la chèvre et le chou, font dans la position ambiguë, jouant ainsi sur deux tableaux à la fois.

Taïwan doit aussi son malheur à la puissance économique de la Chine continentale qui met tous les moyens pour éloigner la république de Chine de la reconnaissance internationale, et préparer la réunification. Et il faut dire que l’Empire du milieu s’en sort plutôt bien, l’île de Formose se voyant de plus en plus lâchée par ses soutiens, africains notamment. A ce rythme, on se demande bien si Taïwan tiendra le coup et si la réunification n’est pas finalement une chose inéluctable.

A moins que l’île se résolve à accepter la fameuse recette que lui propose la Chine, à l’image de celle qui a été appliquée à Hongkong et à Macao, à savoir celle du "un pays, deux systèmes". Reste à savoir si les Taïwanais sont eux-mêmes favorables à l’indépendance de l’Etat "du majestueux bambou bleu-turquoise". Une réunification avec le géant communiste ne manquerait pas d’affecter l’économie de Taïwan, de mettre à mal sa spécificité qui est celle d’être attachée à la démocratie, bref, de mettre en danger l’île.

S’ouvrir à la Chine sans se laisser pour autant phagocyter, telle est l’option qui semble le mieux convenir à Taïwan. Mais la météo politique nationale et le contexte international sont à ce point changeants qu’il faudra bien que les Taïwanais se préparent à toute éventualité. Tout peut basculer du jour au lendemain.

"Le Pays"

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique