LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Assèchement du barrage de Mogtédo : 91 millions de F CFA de pertes

Publié le mercredi 14 mai 2008 à 12h36min

PARTAGER :                          

<img12297|leftLe barrage de Mogtédo, dans la province du Ganzourgou, offre depuis la mi-mars un spectacle désolant. Source d’eau pour les cultures et les plantes, il est en effet à sec depuis cette date, occasionnant ainsi d’énormes pertes pour les populations

Le barrage de Mogtédo, construit en 1963, mis en valeur en 1967 et qui renfermait une capacité de 6 560 000 m3 est aujourd’hui à sec. A l’aval du côté de Mogtédo, la plaine qui s’étend sur près de 94,6 ha, selon les services techniques, est couverte de riz à majorité irrécupérable. Le même constat a été fait du côté de Zam où plus de 18 ha de cultures maraîchères étaient exploités pour la présente campagne. L’ouvrage principal offre un air désolant à perte de vue. Tel est le constat fait le 24 avril 2008. Un drame, dirait-on, au regard de la grande rentabilité des productions chaque année et qui font du barrage de Mogtédo, un grenier sûr de la province du Ganzourgou.

Le barrage est pour beaucoup dans l’essor économique que connaissent les exploitants des plaines de Zam et de Mogtédo qu’il irrigue. En amont, la plaine de Zam est consacrée à la culture maraîchère tandis qu’en aval, dans celle de Mogtédo est pratiquée la riziculture. Le marché de Mogtédo est donc le lieu d’exposition et de vente des produits du labeur des exploitants de l’ouvrage. On retrouve dans cet endroit de change, privilégié par sa position stratégique, toute sorte de produits de contre-saison, du poisson, que proposent des femmes battantes. Seulement, la situation actuelle du barrage risque, si l’on y prend garde, de compromettre l’avenir des populations résolument tournées vers l’exploitation de ces deux plaines.

D’énormes pertes pour les populations

De mémoire des populations des deux communes, le barrage de Mogtédo connaît pour la première fois de son histoire un assèchement total de son plan d’eau d’irrigation. Toutefois, certains relèvent qu’en 1985 est survenu un tarissement partiel. Qu’à cela ne tienne, la situation actuelle est plus que préoccupante et les données chiffrées des services techniques parlent d’elles-mêmes.

Selon les services de la Direction provinciale de l’agriculture de l’hydraulique et des ressources halieutiques (DPAHRH), les pertes encourues sont énormes. Sur la plaine rizicole de Mogtédo où étaient attendues près de 331,10 tonnes de production, il a été enregistré 85% de pertes soit un montant estimé à 49 250 425 FCFA. Pour la plaine de Zam, la perte est totale pour les maraîchers. Sur les 246,87 tonnes attendues, aucune production n’a pu être récupérée et les techniciens évaluent les dégâts à plus de 42 738 450 FCFA. Pour cette deuxième production de l’année, l’ensemble des dommages s’élèvent donc à plus de 91 millions de francs CFA pour les habitants des deux communes.

Les causes éventuelles de l’assèchement

Les techniciens de la DPAHRH du Ganzourgou évoquent plusieurs causes pour expliquer l’assèchement du barrage. Tout d’abord, ils mentionnent l’arrêt précoce des pluies qui n’a pas permis à l’ouvrage d’atteindre un bon niveau de remplissage à même de supporter les activités agricoles de la campagne sèche. C’est en effet le 09 septembre 2007 que la zone a enregistré sa dernière pluie. Pour couvrir le déficit pluviométrique, il était impératif d’ouvrir de façon anticipée la vanne principale pour arroser les cultures. Un autre cas relevé est l’extension d’année en année des superficies exploitées, surtout celles qui sont hors plaine. Le président de la coopérative et du Comité local de l’eau (CLE) de Mogtédo, M. Moumouni Ouédraogo précise dans ce sens que le barrage irrigue plus de 600 hectares en amont et en aval, au lieu des 110 initialement prévus. A cette cause, les services techniques ajoutent le non respect des dates de repiquage du riz par certains exploitants. Aussi, relèvent-ils, le barrage de Mogtédo est un support pour l’abreuvement du cheptel. 400 à 500 têtes s’y abreuvent par jour.

La situation préoccupante du barrage a fait l’objet de plusieurs concertations. Sur la question de l’ouvrage et des pertes occasionnées, les avis sont unanimes.
Pour Nabyouré Congo Dramane, maire de Zam : « c’est un sentiment de tristesse et de découragement qui nous anime par rapport à ce que vivent nos exploitants qui comptaient beaucoup sur ces cultures de contre-saison pour combler le déficit des récoltes de la saison dernière. C’est autant une catastrophe pour ces producteurs que pour notre commune qui comptait aussi sur quelques recettes liées aux taxes que cela pouvait rapporter ». Ce sentiment général est couplé de requête, et le maire M. Congo le souligne en ces termes : « Nous en appelons à l’action des partenaires ou de l’Etat pour qu’ils aident à refaire ce barrage et permettre ainsi de faire face à toute éventualité. » Ousmane Kaboré, maraîcher à Talembika de renchérir : « Nous demandons aux dirigeants de nous aider à résoudre le problème des prêts contractés auprès des institutions financières par les associations d’exploitants ».

Le haut-commissaire du Ganzourgou, M. Joanny Kaboré, pour sa part, se veut rassurant : « Le barrage date de très longtemps et connaît un phénomène d’ensablement ; pendant ce temps le nombre d’exploitants augmente d’année en année. Cette situation doit nous conduire à une
réflexion en vue de rationaliser l’exploitation. Par ailleurs, nous verrons dans quelle mesure intervenir en temps opportun auprès des structures financières pour qu’elles assouplissent les conditions de remboursement des crédits ». Aussi confus que tous, Moumouni Ouédraogo, président de la coopérative et du Comité local de l’eau (CLE) de Mogtédo souhaite une prompte réaction du gouvernement : « pour que cette situation ne nous tombe plus dessus, il faut augmenter la capacité du barrage. C’est notre cri du cœur à l’endroit du gouvernement que nous invitons à réagir promptement pour soulager la population, » a-t-il dit.

En attendant, il faut tirer les leçons de ce qui s’est passé au cours de cette campagne afin de gérer au mieux les superficies emblavées qui augmentent et de façon incontrôlée au fil des ans. Aussi, si le curage du barrage est nécessaire pour retrouver le volume initial de l’ouvrage qui a sans doute connu en plus de 50 ans le phénomène de l’ensablement, il est d’autant plus important de voir dans quelle mesure accroître sa capacité. Il s’impose donc la nécessité d’une réaction rapide des décideurs afin de redonner de l’espoir aux braves travailleurs qui vivent « accrochés » à ce barrage.

Hahadou Daniel NADINGA
AIB/ZORGHO
Collaboration Adama OUEDRAOGO

Sidwaya

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Burkina : Une économie en hausse en février 2024 (Rapport)