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Flambée des prix : Entêtement des commerçants, impuissance du gouvernement

Publié le vendredi 9 mai 2008 à 12h10min

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Cela fait bientôt plus de trois mois que le gouvernement du Burkina Faso, en réponse aux émeutes qui ont eu lieu à Bobo Dioulaso, à Banfora, à Ouahigouya le 20 février, et à Ouagadougou le 28 février, a pris un certain nombre de mesures pour, dit-il, juguler la crise provoquée par la vie chère et pour protéger le pouvoir d’achat des consommateurs.

Aujourd’hui, force est de constater que les étiquettes n’ont pratiquement pas varié. Les commerçants répondent aux consommateurs qui évoquent ces mesures devant les prix exorbitants, qu’ils peuvent aller faire leurs achats dans les boutiques du gouvernement.

D’autres rétorquent sèchement qu’ils n’ont que faire des décisions gouvernementales. Certains vont jusqu’à affirmer qu’ils n’en ont jamais entendu parler. Une telle attitude, un tel entêtement des commerçants à fouler au pied les décisions du gouvernement ne peut s’expliquer que par : l’interpénétration des intérêts entre les milieux politiques et les milieux d’affaires. Selon l’époque et les pays, on désigne cette interpénétration d’intérêts par le mot collusion. "Moi aussi, j’ai voté Blaise Compaoré et pour le CDP", ne se gênent pas de crier des commerçants. Donc, pour eux, voter le président Blaise Compaoré, voter pour le CDP, est une licence pour l’incivisme.

Dans ce pays, on remarque que les commerçants et l’ensemble des milieux d’affaires ont décidé de laisser les autorités gouvernementales dire tout ce qu’elles veulent concernant la vie chère ; eux ne disent rien mais ne font que ce qui leur plaît. Le gouvernement propose, les commerçants disposent, serait-on tenté de dire. Tous et chacun ont la preuve de l’impuissance du gouvernement devant les milieux d’affaires. Face à la crise que les populations vivent en ce moment, l’Etat ne procède pas à un contrôle des prix en prétextant un libéralisme économique qui, en réalité, se révèle être une coquille vide dans un pays où des clubs et des clans se sont vu attribuer des monopoles.

Des responsables de ce pays ont sans doute déjà oublié qu’ils sont des sociaux-démocrates, et qu’ils doivent par conséquent, mener une politique sociale conséquente. Dans un tel contexte, remettre au travail les anciennes brigades des prix est inutile. Mais qui vont-elles sanctionner en cas de découvertes d’irrégularités ? Tout le monde se dit CDP, et l’on sait à quel point la loi de la solidarité est appliquée ici quand il est question de certaines choses. Les règles du libéralisme économique ont été tronquées au Burkina par des monopoles que détiennent moins d’une dizaines d’individus pour faire entrer des denrées de grande consommation. La grande majorité des vendeurs de produits de grande consommation se ravitaillent auprès de ces magnats locaux qui font la pluie et le beau temps, allant jusqu’à défier le gouvernement en ignorant royalement ses lois.

Beaucoup de commerçants de céréales par exemple ne traversent pas les frontières pour aller acheter ces denrées. Les consommateurs comprennent difficilement la montée quotidienne des prix de ces produits, même s’ils admettent que le prix du carburant pour le transport jusqu’au lieu d’écoulement a connu une hausse. Que fait le gouvernement dans ce cas de figure ? Les commerçants pratiquent des prix prohibitifs pour augmenter leurs marges. Les pouvoirs publics le savent, mais ils sont impuissants. Comme dirait l’autre, ça les dépasse. En outre, les stocks de céréales destinés à être vendus aux populations à des prix sociaux se retrouvent curieusement dans les magasins des commerçants.

Pendant combien de temps une telle situation va-t-elle durer ? De la même manière que les milieux des affaires se moquent des décisions gouvernementales et font leurs lois, il arrivera un moment où les populations ne supporteront plus la pression de l’inflation. Le président Abdoulaye Wade du Sénégal a prédit que la crise alimentaire allait fragiliser des régimes, voire les déstabiliser. On ne le croit pas. Comme toujours, ils sont nombreux les pouvoirs en Afrique qui pensent qu’une telle situation ne peut pas leur arriver. Ils se réveilleront au milieu de la nuit ou à l’aube pour se trouver en face de la cruelle réalité.

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