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Succession de Blaise Compaoré à la tête de l’Etat : Au nom de la Constitution et de la volonté des électeurs

Publié le mardi 22 avril 2008 à 12h11min

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Blaise et François Compaoré

Selon les dispositions actuelles de la Constitution en son article 37, Blaise Compaoré devrait se retirer du pouvoir au plus tard en fin 2015 s’il n’y pas de modification. C’est encore loin mais l’opposition toutes tendances confondues piaffe d’impatience parce que cette échéance pour elle représente la plus grande opportunité de réaliser l’alternance.

On imagine que pour les partisans du président Compaoré, la question se poserait en terme de savoir qui, dans son entourage représenterait la meilleure chance de lui succéder à la tête de l’état ?

Pour répondre à ces hypothèses, il faut partir d’un postulat, celui d’une succession organisée dans le cadre de la République avec tous ses attributs. C’est-à-dire avec une constitution en vigueur qui règle le fonctionnement démocratique des institutions. Dans un tel contexte, une succession en fin de mandat suppose une élection présidentielle à 1 ou 2 tours selon les termes de l’article 39 de la Constitution. Si la succession devrait intervenir avant la fin du mandat présidentiel, elle est réglée suivant les dispositions de l’article 43 de la Constitution alinéas 1, 2, 3 et 4. Pour l’essentiel, on rappellera que cet article dispose qu’« en cas de vacance de la présidence du Faso pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement absolu ou définitif constaté par la Cour suprême saisie par le gouvernement, les fonctions du président du Faso sont exercées par le président de l’Assemblée nationale ».

Les craintes non justifiées

Vu l’esprit et la lettre des dispositions pertinentes de la constitution burkinabè, les craintes d’une succession dynastique au sommet de l’Etat sont arbitrairement suscitées pour des raisons différentes selon les bords politiques où l’on se situe. Pour l’opposition, Blaise Compaoré est un politique aguerri et son départ de ses fonctions, lui donnerait enfin plus de chances de réaliser l’alternance. C’est du moins ce à quoi elle croit dur comme fer. Au sein de la mouvance présidentielle, un retrait de Blaise Compaoré de la scène politique ne manquera pas de mettre en lumière les ambitions fratricides de certains de ses lieutenants qui ont ou pensent avoir le profil de l’emploi.

Mais plus que toutes ses ambitions, le parrainage de Blaise Compaoré est capital pour réussir. Pour la simple raison que cette marque de confiance présidentielle suppose un transfert sur l’heureux élu, de réseaux relationnels aussi bien en interne qu’en externe, toute chose qui devrait s’avérer décisive dans la conquête de l’électorat, la gestion et la conservation du pouvoir. Qui dans l’entourage présidentiel va emporter cette marque de sa confiance au moment décisif ? Les paris sont ouverts, les pronostics aussi. Plusieurs scénarios restent possibles. Mais les adeptes de l’intrigue politicienne ont souvent plus de génie que de popularité (heureusement !). Ils s’imaginent déjà des rivaux potentiels à abattre avant compétition par tous les moyens !

Dans leur réseau médiatique instrumentalisé à souhait, ces pêcheurs en eaux troubles de tous bords politiques ont visiblement entrepris la stratégie de l’anticipation par l’imaginaire dans l’espoir d’obliger Blaise Compaoré à révéler dès maintenant ses intentions ou à décréter des inéligibilités qui les arrangeraient. Cet imaginaire nourri s’est surtout focalisé sur François Compaoré. Il est vrai que l’adversité des coups et attaques multiformes récurrents a certainement façonné le caractère de ce dernier et lui a donné la carapace d’un dauphin redouté. Par anticipation il faudrait donc tout faire pour éliminer cet « obstacle » potentiel par la magie des « fatwa » ou interdits antidémocratiques.

Le plus important est dans la manière de passer la main

Sans présager des intentions de François Compaoré, on fera remarquer que s’il ambitionne de succéder à son frère, il n’est, jusqu’à preuve du contraire, frappé par aucune illégitimité légale. En effet, il n’y a aucun interdit, d’un point de vue de la loi fondamentale, ni des habitudes républicaines, à ce que François Compaoré ait des ambitions présidentielles.

Au terme des articles 11 et 12 de la Constitution, François Compaoré, comme tous les burkinabè jouissant de tous leurs droits civiques et politiques est électeur et éligible à toutes les fonctions dans la gestion des affaires de l’Etat et de la société burkinabè. C’est un droit constitutionnel garanti comme tel et il n’y a aucune raison que cela change. Si le fait d’être le frère puîné de l’actuel président, présente un quelconque désavantage, c’est strictement d’un point de vue politique.

A savoir que les électeurs vont forcément imputer les insuccès du premier au second et exprimer donc leur vote en fonction de cela. Dans un scénario inverse le second pourrait également récolter les dividendes des réussites de la politique du premier. Dans tous les cas de figure, nous sommes très loin du schéma de la succession dynastique que l’on agite à la manière d’un épouvantail à faire peur. N’est-ce pas qu’aux Etats Unis Georges W. Bush est devenu président après son père ?

Ce pays n’est pas pour autant devenus un royaume. Hillary Clinton rêve du Bureau Oval à la Maison-Blanche après son époux, il n’y a aucun scandale à cela. En Argentine, depuis le 10 décembre 2007, Cristina Fernandez de Kirchner a pris la place de son mari, Nestor Kirchner à la tête du pays, personne n’y voit un scandale encore moins une succession dynastique. L’important nous semble-t-il est dans la manière dont ces successions se sont passées.

Le respect de la loi fondamentale et des aspirations des populations, semble être la meilleure boussole pour ce faire.

Alors gardons-nous de crier au loup quand il n’y pas lieu et surtout de chercher à créer des obstacles artificiels pour exclure certains citoyens de la jouissance de leurs droits politiques. Le cas ivoirien nous enseigne sur les conséquences désastreuses des exclusions politiques intitui personae. En tout état de cause le temps est encore devant nous et tous les scénarios restent possibles.

Djibril TOURE

L’Hebdo

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