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Téléphonie au Burkina : Quand la concurrence assassine le consommateur

Publié le mardi 15 juin 2004 à 10h11min

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Dans un système d’économie libérale, on dit généralement de la concurrence qu’elle bénéficie au consommateur. Cette assertion se vérifie généralement peut-être, mais pas pour les consommateurs de la téléphonie au Burkina. Une concurrence mal comprise maintient des tarifs d’appel exorbitants d’une téléphonie à une autre. Ni la Ligue des consommateurs, ni les pouvoirs publics ne semblent se soucier d’un tel état de faits.

Les trois compagnies de téléphonie mobile, afin d’aguicher le client, lui font à intervalles réguliers, des offres de tarifs mirobolants. Mais ces différentes baisses restent en quelque sorte en interne. CELTEL, par exemple, pratique des prix d’appel compris entre 136 et 170 francs la minute. Quant à TELMOB, elle réussit des baisses allant jusqu’à 70 francs la minute. Mais elle entres, les prix sont pratiqués au plus fort. Un appel d’un portable CELTEL à un TELMOB vous coûtera parfois plus de 300 Francs la minute. Un tarif visiblement hors normes par rapport au pouvoir d’achat du commun des Burkinabé.

Un autre effet de cette concurrence mal comprise est la non autorisation des services publics de pouvoir émettre des appels vers des portables CELTEL et TELECEL. Pour des motifs mal éclaircis parles pouvoirs publics, les règles de la libre concurrence sont ainsi violées au profit d’une compagnie de téléphonie concurrente. Là encore, la Ligue des consommateurs reste muette sur la question, de sorte qu’au bout du compte, ce sont les consommateurs qui trinquent.

Récemment, l’ONATEL, la nationale du téléphone fixe a engagé une politique de baisse généralisée de ses tarifs d’appels. Le coût d’un appel inter-urbain est par exemple à 100 francs la minute. Dans les limites d’une même zone, cet appel est de 75 francs. Mieux, les tarifs internationaux connaissent une baisse très significative, puisqu’il est désormais possible de faire un appel en France par exemple à 200 francs la minute. Cette politique attractive profite évidemment au consommateur. Mais ce faisant, elle met justement à nu le ridicule de la situation suivante : au Burkina, un appel à des milliers de kilomètres coûte moins cher qu’un appel sur cellulaire adressé à un individu se trouvant à quelques mètres de vous !

Qu’est-ce qui motive cette cacophonie tarifaire ? A notre sens, elle n’est que le reflet d’une mauvaise acceptation du jeu de la concurrence. Au départ, lorsque les compagnies de téléphonie privée CELTEL et TELECEL s’installaient au Burkina Faso, leur présence fut mal acceptée par l’ONATEL, jusque là seule opératrice de communication dans le pays. Installée dans le confort du monopole, elle a considéré comme une offense l’agressivité commerciale des autres compagnies. La création et l’arbitrage de l’ARTEL, l’autorité de régulation de la téléphonie, n’ a apporté que peu d’amélioration à ces relations exécrables.

Depuis lors, c’est à qui nuira le plus à l’autre. C’est ainsi que les tarifs maintenus à des niveaux très élevés entre les trois compagnies sont perçus comme une marque de défiance les unes envers les autres. Une façon de dire : " Nous, nous ne soignons que nos clients. Tant pis pour ceux qui vont se fourvoyer auprès de la concurrence ; ils en payeront le prix fort ". Ces compagnies ne semblent même pas se rendre compte que ce faisant, elles limitent d’elles-mêmes les possibilités d’appel de leurs clients et par conséquent, leurs propres chiffres d’affaires.

Il est grand temps que la Ligue des consommateurs sorte de sa léthargie et prenne à bras le corps la question et que les clients montrent leur ras-le-bol. A bon entendeur, salut…

Lamine Koné
San Finna

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