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SN-CITEC : Des revendeurs émoussés par la pénurie de savon

Publié le mardi 11 mars 2008 à 11h32min

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Cela fait environ trois mois déjà que les consommateurs avisés de produits locaux burkinabé ne retrouvent plus sur le marché le savon SN-CITEC. A l’origine, un arrêt de la production à l’usine, qui a entraîné la rareté, voire même la disparition totale du produit chez l’épicier du quartier et dans les rayons des supermarchés.

Une situation qui n’est certainement pas pour plaire aux consommateurs, mais aussi et surtout à ces commerçants qui sont depuis plusieurs semaines dans l’expectative. Nous en avons rencontrés pour vous non sans avoir effectué une incursion dans les locaux de la SN-CITEC pour mieux comprendre les raisons de cette pénurie.

Avec la flambée vertigineuse des prix des produits d’importation de première nécessité au Burkina, de nombreux consommateurs ont résolument choisi de se rabattre sur les productions locales dans l’espoir de satisfaire leurs besoins à moindre coût.

Si certains produits, notamment ceux de fabrication artisanale, ont désormais pignon sur rue, il reste néanmoins entendu que d’autres, industriels, et made in Burkina n’ont pas échappé aux fluctuations du marché international, contraignant ainsi des unités de production à un renchérissement des prix des produits si ce n’est tout simplement à l’arrêt des activités.

Du coup, on assiste aujourd’hui à une pénurie de certains biens de consommation comme le savon SN-CITEC, qui est pratiquement inexistant sur le marché national.

En tout cas, dans la capitale économique, Bobo-Dioulasso, qui est aussi la principale ville industrielle du Burkina et qui rassemble en elle l’essentiel des unités de production, dont la SN-CITEC, pas de savon sur le marché en provenance de la zone industrielle. Ce constat peut être vérifié auprès de ces revendeurs grossistes ou demi-grossistes ou encore chez des détaillants, qui affirment être en rupture de stock depuis plusieurs semaines.

Pour Boukary Ouédraogo, commerçant au grand marché de Bobo-Dioulasso, c’est un peu la déception, car, dit-il, « cela fait plus de deux mois que je cours après la SN-CITEC et on me dit qu’elle a pour le moment cessé la production du savon et que ça va reprendre bientôt. Mais toujours rien ».

L’arrêt des activités à la savonnerie à de la SN-CITEC semble bien réel, comme nous le confirme cet autre grossiste, du nom de Sessouma Karim, qui dit avoir personnellement fait le déplacement à l’usine pour s’assurer de l’effectivité de la cessation de la production du savon.

Et ajoute que : « La direction commerciale de la société nous a donné l’assurance que la reprise des travaux est imminente parce que les difficultés sont en passe d’être résolues ». Mais pour l’heure, c’est toujours l’impatience et même l’angoisse chez de nombreux commerçants et fournisseurs, qui déclarent être sous la pression quotidienne de leurs dépositaires en ville comme en campagne. Des clients qui, disent-ils, ne cessent de les harceler pour leur approvisionnement.

C’est le cas de Séraphin Sawadogo, installé au grand marché de Bobo pour qui cette pénurie a été fortement préjudiciable du fait du ralentissement de ses affaires, mais aussi de ces nombreux appels téléphoniques qu’il dit recevoir de ses partenaires commerciaux provinciaux. Toujours est-il que les conséquences de cette inactivité à la savonnerie de la SN-CITEC sont perceptibles chez les commerçants mais aussi et surtout chez des consommateurs, qui ont opté pour d’autres produits du genre.

Kabakourou en attendant SN-CITEC

A défaut du savon SN-CITEC, de nombreux ménages à Bobo- Dioulasso utilisent désormais ces boules de savon de fabrication artisanale communément appelées « kabakourou », qui signifie en dioula "cailloux" du fait de la dureté du produit. Au marché central de Bobo, de nombreuses femmes en raffolent, nous dit-on, et la demande va crescendo depuis la pénurie du savon SN-CITEC. C’est du moins l’avis de Ganamé Amadé, ce commerçant installé à l’entrée ouest du marché de Bobo qui dit avoir réalisé de bonnes affaires au cours de ces derniers mois.

« Moi, je suis un revendeur du savon SN-CITEC. Mais depuis que je n’arrive plus à m’en approvisionner, j’ai décidé de consacrer mon énergie au savon kabakourou, qui est moins cher et que je vendais bien avant. Maintenant, la demande est forte et j’épuise facilement mes stocks ».

Vendu en effet à 350 F la grosse boule et à 100 F la petite, kabakourou est depuis bien longtemps prisé par de nombreux ménages, notamment ceux à revenus modestes. Mais tout cela est bien loin de faire oublier le produit SN- CITEC qui, bien qu’ayant connu ces derniers temps une hausse de ses prix de vente sur le marché national, demeure toujours recherché aussi bien par les consommateurs que par les commerçants.

Une circulaire adressée en effet aux grossistes et demi-grossistes par la SN-CITEC institue désormais les nouveaux prix de vente des produits SN-CITEC et ce, à compter du 26 décembre 2007. Mais encore faut-il que le savon soit disponible sur le marché. Toujours est-il qu’à la SN CITEC, la sérénité est affichée en attendant la reprise des activités de la savonnerie.

Ce qui ne devrait pas tarder, car, a dit sa responsable commerciale et marketing, madame Diane Sanou, « nous étions en rupture de matière première et depuis janvier nos machines ont cessé de tourner. Mais très bientôt tout rentrera dans l’ordre », nous a-t-elle confié avec un sourire qui laisse apparaître un réel espoir de reprise effective des activités de la savonnerie dans les tout prochains jours.

Trouver une solution définitive à l’irrégularité de la production

La matière première, à savoir l’acide gras de palm, qui faisait défaut, est maintenant disponible, mais en quantité insuffisante. « Nous avons commandé d’Asie 5000t d’acide gras de palm, qui correspondent à un mois et demi de production et nous allons démarrer avec les 500 tonnes déjà disponibles en attendant les prochaines livraisons », a encore laissé entendre la responsable commerciale et marketing de la société.

Mais au niveau de la SN-CITEC, on déplore surtout la forte demande de l’acide gras de palm sur le marché international. Ce qui n’est pas sans conséquence pour la disponibilité de cette matière première, qui intervient à près de 90% dans la fabrication du savon. Une situation qui n’est pas pour arranger les affaires de Dame Diane Sanou, laquelle a dû revoir cette année ses ambitions à la baisse : « Avant 2005, nos commandes étaient chiffrées à 14 000 tonnes par an.

Mais cette année par exemple, nous n’avons demandé que 5000 tonnes sans être sûrs d’être livré en totalité. A cela il faut ajouter le prix du kilo, qui est passé de 478 F, rien qu’en 2007, à 650 F cette année. Cette flambée des prix des matières premières a fait perdre à la société 600 millions de francs en 2007, c’est pourquoi nous restons très prudente cette année pour nos commandes ».

Pour un besoin annuel estimé à 3400 tonnes d’acide gras de palm pour une production de 5000 tonnes de savon, la SN-CITEC semble être de nos jours dans l’impossibilité de satisfaire totalement la demande de ses clients. Ce qui a du reste amené les responsables de la société à envisager d’autres solutions pour se soustraire ne serait ce que partiellement à cette extrême dépendance extérieure.

« Le beurre de karité, que nous produisons sur place, pouvait être une solution à notre problème. Mais il se trouve que ce produit aussi est beaucoup convoité sur le marché extérieur et est vendu à 1000 F/kg », dira Diane Sanou, dont l’espoir repose aujourd’hui sur l’étude commanditée par la direction de la société et qui devra permettre à terme de déterminer une autre alternative à cette récurrente pénurie de l’acide gras de palm afin d’assurer une régularité de la production.

Jonas Apollinaire Kaboré

L’Observateur

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