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Moussa Kaka : De l’absurdité de l’enfermement d’une voix

Publié le mardi 11 mars 2008 à 11h10min

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Cela fait 173 jours que le correspondant de RFI au Niger croupit dans les geôles du président Mamadou Tandja. 173 jours derrière les barreaux pour avoir tenté de faire correctement son travail. C’est trop, c’est même difficile à supporter. Telle est la situation dans laquelle vit, ou du moins survit Moussa Kaka. C’est dire que les démocrates africains, européens et surtout les hommes de médias et particulièrement nos confrères de RFI sont ulcérés par cette inique mise au cachot de Moussa Kaka.

C’est certainement pour cela que Radio France internationale a consacré une journée de soutien à son correspondant au Niger, Moussa Kaka, derrière les verrous dans la prison civile de Niamey depuis septembre 2007. Elle a d’ailleurs initié par la même occasion une pétition en vue d’obtenir sa libération.

Moussa Kaka, directeur de la radio Saraouniya et correspondant de Reporters sans frontières (RSF), est privé de liberté parce qu’accusé de « complicité de complot contre l’autorité de l’Etat », par le régime de Mamadou Tandja. Le crime de notre confrère, c’est d’avoir voulu exercer son métier de journaliste en toute impartialité dans un contexte de crise.

En effet, le pouvoir de Niamey a maille à partir, depuis février 2007, avec les rebelles touaregs du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ), que le gouvernement qualifie de « bandes armées » et de « coupeurs de routes ».

Dans l’exercice de son travail, qui consiste à rendre compte de la réalité sur le terrain en allant vers toutes les parties prenantes de cette crise qui dure depuis, Moussa Kaka s’est vu reproché d’avoir eu des contacts avec l’un des chefs de la rébellion touareg.

Mais alors, comment voulez-vous qu’en tant que journaliste il ne veuille pas rencontrer toutes les partie prenantes à une situation donnée pour s’en faire une idée précise afin de produire un papier équilibré ? C’est tout simplement ce qu’a voulu faire notre confrère du Niger.

Il n’en fallait pas plus pour que Niamey l’accuse de pactiser avec les rebelles du MNJ dans le but de porter atteinte à la sûreté de l’Etat. Sans vouloir donner au directeur de Saraouiniya le Bon Dieu sans confession, il faut reconnaître que la situation n’a qu’assez duré. Bien sûr, le journaliste n’est aucunement au-dessus de la loi, loin s’en faut. Mais dans cette affaire, Moussa Kaka, à la limite, est devenu un prisonnier politique.

Car cette rébellion, dont on accuse Moussa d’en être complice, est avant tout politique. Ce sont des hommes et des femmes du Niger qui ont pris les armes contre le pouvoir central parce qu’ils estiment que le pays est mal géré et qu’ils souhaitent voir une meilleure redistribution des richesses nationales.

C’est tout ce qu’il y a de politique, et qui peut déclencher un mouvement d’humeur d’une population donnée. Et détenir ainsi Moussa Kaak comme un vulgaire bandit n’a véritablement aucun sens. D’autant plus que Moussa Kaka, qui passe pour être le loup blanc de la scène médiatique nigérienne, est suffisamment responsable pour disparaître du pays sans laisser de traces.

Qu’on le libère alors !

RFI a donc raison d’avoir pris le parti d’initier une journée de soutien en faveur de son correspondant Moussa Kaka. Un site, liberezmoussa, a même été créé afin de mobiliser le plus grand nombre de personnes pour la libération du journaliste nigérien. Ainsi qu’une vaste campagne, comme on n’en jamais vue depuis l’arrestation et l’incarcération de cet homme de média.

De nombreuses personnes, dont des artistes, des sportifs, des personnalités politiques, des journalistes et des intellectuels de tous les continents, se sont déjà manifestées. A l’évidence, cette mobilisation, appelée à se renforcer les prochains jours, sonne comme autant de voix qui retentissent pour réclamer la libération de Moussa Kaka.

Du coup, une telle marque de soutien démontre, s’il en est besoin, l’absurdité d’embastiller une voix. Il reste donc à espérer que le maître de Niamey, le président Tandja pour ne pas le nommer, entendra cet appel et rendra à notre confrère Moussa Kaka sa liberté. 173 jours derrière les barreaux pour avoir voulu tout simplement bien faire son boulot, c’est trop !

Agnan Kayorg

L’Observateur

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