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Cameroun : Biya aurait mieux fait de rester dans son trou

Publié le vendredi 29 février 2008 à 10h33min

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En 25 ans de présidence, Paul Biya, aujourd’hui âgé de 75 ans, n’a pas fini d’étancher sa soif du pouvoir. Pire, il ne s’assagit pas avec le temps passé à la tête de l’Etat. Le trop discret président de la République du Cameroun à la voix fluette, qui parle très peu et sort très rarement, si ce n’est pour aller se prélasser dans des stations balnéaires suisses, a fait une sortie médiatique avec ce ton musclé et mal à propos pour ceux qui ne sont pas habitués à la com.publique.

Dans son intervention télévisée, il s’en est pris à ceux qui protestent contre la modification de la loi fondamentale, qui lui permettra de représenter sa candidature à la présidence, et vitupère du même coup contre le pauvre citoyen qui manifeste son ras-le-bol face à la flambée des prix. Dans le décompte macabre, il y a déjà 17 macchabées sur le bitume.

Mais le locataire du palais d’Etoudi, qui préside un gouvernement tenant son Conseil des ministres une fois tous les six mois, et qui selon certaines mauvaises langues ne connaît pas tous ses ministres prie de « laisser parler les urnes ». On se demande de quelles urnes parle ce Biya. S’il ne s’agit que de ces boîtes qui ne sont transparentes que par le plexiglas utilisé pour les confectionner, il y a bien de quoi douter de la pertinence de son conseil.

Dans ce pays, où la classe politique est moribonde, au grand bonheur de l’époux de la première dame à la coiffure flamboyante, il arrive souvent que la société civile rue dans les brancards et que l’armée tire sur elle sans sommation. Un adage en mooré (langue de l’ethnie majoritaire au Burkina Faso) fait remarquer que tant que le buisson ne prend pas feu, le lièvre n’en sort pas.

Cependant, ce discours du chef de l’Etat, baptisé pompeusement « Message à la Nation », n’en était pas du tout un. Dommage ! Mille fois dommage ! Quand on sort de son cocon, il faut tout de même marquer les esprits par un discours d’apaisement, plutôt que de mettre de l’huile sur le feu. Mais le natif du village de Mvomeka’a dans le sud du pays est prêt à marcher sur des cadavres pour rempiler en 2011, au grand silence de Paris (Biya n’est-il pas l’un des derniers piliers de la Françafrique ?). Seule l’ambassadrice des Etats-Unis a eu le toupet de lui faire connaître son opposition à son projet de ce représenter en 2011.

Bon Dieu ! S’il y avait un vaccin pour prévenir cet éternel appétit de nos dirigeants pour le pouvoir, beaucoup d’Africains en seraient preneurs. Pourtant, l’histoire suivante avait suscité bien des espoirs : au début des années 90, un beau soir, Paul Biya décide qu’il ne veut plus jamais voir son image sur la chaîne nationale. Le patron de CRTV, Gervais Mendo Ze, déboule à la rédaction et passe l’information au présentateur du jour.

En effet, dans l’édition déjà prête, le chef de l’Etat devait apparaître 33 fois. Pour beaucoup, cette anecdote serait un signe qu’il avait aussi marre du pouvoir et qu’il allait bientôt passer le relais. Malheureusement, une bonne quinzaine d’années plus tard, celui qui a été plusieurs fois traité de mort par les journaux de son pays est toujours là et bien vivant.

Issa K. Barry

L’Observateur

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