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Guerre du coton subventionné : Les Etats-Unis perdent une bataille

Publié le vendredi 15 février 2008 à 09h39min

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Non. Le monde ne peut être juste et équitable. Le combat des Altermondialistes, aussi noble soit-il, entretient un rêve de justice et de partage que le libéralisme et la mondialisation des économies ne peuvent offrir. La crise du coton est là pour témoigner de l’iniquité du système commercial mondial qui fait la part belle aux plus forts.

La plainte du Brésil contre les subventions américaines à leurs cotonculteurs, introduite depuis 2001, vient d’être vidée par l’OMC (Organisation mondiale du commerce). Si elle donne raison au Brésil et aux pays africains dont le Burkina qui l’ont soutenu, la victoire n’aura été que de courte durée. Les USA ont fait appel. Ils ne démordent donc pas de leur politique de subventions, qui provoque des distorsions graves dans le commerce mondial et dont les petits producteurs du Sud sont les principales victimes.

Il faut espérer que cet appel échoue et que les Etats-Unis s’imposent le respect des règles commerciales librement acceptées qui sont le moteur de cette mondialisation qui fait peur, justement du fait que ces règles ne sont pas appliquées par tous les pays membres et de la même façon. Mis en minorité sur le dossier coton, on se demande quelle sera la réaction du géant américain. Ne va-t-il pas créer d’autres formes d’aides en faveur de ses producteurs ? En la matière, il ne faut préjuger de rien tant les grands de la planète et surtout les Etats-Unis ont habitué leurs partenaires à une sorte d’unilatéralisme qui frôle l’égoïsme avec pour leitmotiv : leurs intérêts, rien que leurs intérêts.

Sur le dossier des subventions, l’OMC joue sa crédibilité. Si elle se montre incapable de faire respecter ses règles à ses membres, l’on file tout droit vers un désordre commercial au plan mondial. Les pays africains et sud-américains, parce que trop faibles économiquement, ne peuvent pas prendre des mesures de rétorsion contre les grands pays qui subventionnent leur agriculture. Ils sont trop dépendants de leurs aides budgétaires et autres financements extérieurs pour oser une telle résistance. Restent donc la loi et les règles de l’OMC où chaque pays, quel que soit son poids politique et économique, n’a qu’une seule voix pour négocier et voter s’il y a lieu. Le verdict favorable au Brésil et à ses soutiens est la preuve que la lutte contre les injustices et les iniquités peuvent aboutir pour peu que l’on soit tenace. C’est une victoire à l’issue d’un long processus doublé d’une campagne médiatique

Les subventions font mal et les Etats-Unis et tous les pays qui les accordent le savent. De là à penser qu’elles sont un instrument aux mains des pays du Nord pour faire disparaître la filière coton africaine, il y a un pas que beaucoup franchissent allègrement aujourd’hui. La réalité sur le terrain ce sont les effets des subventions du Nord sur la commercialisation de la production du tiers- monde. Le prix du kilogramme de coton est en nette baisse ces dernières années, une baisse accentuée, il est vrai, par la tendance haussière de l’Euro face au dollar et à la flambée du prix du baril de pétrole. C’est donc une situation difficile pour les économies africaines basées sur cette production. Ces devises permettent d’alimenter les budgets des pays et de créer des sources de revenus à des millions de petits producteurs.

Le combat à l’OMC pour la fin des subventions n’est pas encore gagné. Il appartient aux Africains qui sont restés depuis plus de quarante ans dans les schémas tracés par les colons (produire pour l’extérieur) de réorganiser toute la filière cotonnière. En effet, la production, la commercialisation et l’approvisionnement dépendent de l’extérieur. C’est dire donc que nous sommes pieds et poings liés aux aléas du marché international. Pour des pays qui aspirent au développement, la première des choses est de maîtriser son destin. Réduire la dépendance du coton africain à l’égard du marché international passe par la transformation sur place d’une bonne partie de la production. Cela passe aussi par des investissements sur des unités de transformation mutualisées. C’est seulement après cela que les Africains pourront parler de protection et de préférences régionales pour les produits dérivés issus du coton.

En attendant, les Américains n’ont pas encore dit leur dernier mot. Sur le volet agricole des accords de l’OMC, ils sont toujours à couteaux tirés avec les Européens ?

"Le Pays"

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