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Constsruction sans bois : L’autre façon de sauver le Sahel

Publié le lundi 11 février 2008 à 10h32min

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Djibo, capitale de la région du Sahel est également celle de la Construction sans bois (CSB), une technique de construction introduite en 1995 dans le nord du pays par l’ONG Developement Workshop (DW). Le 5 février dernier, les promoteurs de ce nouveau type d’habitat ont récompensé les deux meilleurs maçons de l’année 2007, après une visite guidée de réalisation de Tongomael et celle de Djibo.

Albeïdou Altini du département de Markoye est un homme heureux. Elu meilleur maçon de l’année 2007, il a reçu le 5 février dernier à Djibo une grosse moto en guise de récompense. Altini est un artisan rompu aux techniques de la construction sans bois : "J’ai appris la technique grâce au projet qui m’a formé en 2004. Depuis cette date, j’ai cessé de travailler. Je suis devenu formateur pour, à mon tour, apprendre aux jeunes comment se servir de cette technique de construction. Le concours visait surtout les constructions dans les lieux publics. J’ai eu à construire plusieurs maisons dans les campements touristiques de la région (Oursi, Yacouta) et chez moi au village. Je crois que c’est cela qui m’a valu le premier prix". John Norton, président de DW France est particulièrement fier des gagnants : "Ces deux maçons ont contribué à l’impact de la CSB et la rendent plus visible. Nous souhaitons qu’ils servent d’exemples pour les autres éditions.

Comme Altini et Youma Karim, lauréats du second prix, ils sont aujourd’hui plus de 280 maçons formés par Development Workshop depuis 2005. Plus de 200 stagiaires maîtrisent désormais l’élaboration des devis estimatifs pour la construction. DW les encourage à se constituer en GIE (Groupement d’intérêt économique) afin de participer aux appels d’offres locaux en matière de construction. John Norton estime que des stratégies possibles existent pour intégrer cette main-d’oeuvre qualifiée dans le cadre du processus de développement local, notamment à travers les projets d’infrastructures et lotissements à visées sociales et économiques.

Le coordonnateur national de DW, Arsène Tuina entend vulgariser cette technique auprès des pouvoirs publics : "nous organisons des ateliers et des rencontres avec les autorités locales pour présenter la CSB et l’intérêt qu’elle revêt. D’autre part, au niveau national, nous proposons des plans types pour les bâtiments publics et des logements parce que nous avons la possibilité de fournir un programme de logements avec cette technique. Nous comptons renforcer le partenariat avec les élus locaux afin qu’ils permettent aux artisans formés de pouvoir offrir aux populations locales un habitat moins cher et respectueux de l’environnement". Pour l’occasion, trois haut-commissaires (Lorum, Oudalan et Seno) ont fait le déplacement de Djibo aux côtés de celui de Djibo, Bazomboué Bazié. Les maires des communes voisines, ainsi que celui de la commune rurale de Dablo dans le Sanmentenga ont pris part aux visites des infrastructures. Ces derniers ont montré leur intérêt pour la CSB. Le haut-commissaire du Soum lui-même s’est offert un salon d’une dizaine de mètres carré pour soutenir son logement fragilisé par l’usure du temps. Le premier responsable de la province donne ainsi l’exemple. Mais il n’est pas le seul. Jean Marie Silga, commerçant de son état, s’est lui aussi payé le luxe d’une villa F5 qui a émerveillé les membres de la délégation dont les représentants de l’Union européenne et de l’ambassade royale du Danemark, les deux principaux partenaires financiers de DW. Ces deux institutions financent un programme de trois ans d’un montant de 262 millions de francs CFA à hauteur respectivement de 75% et de 10%. La région Midi-Pyrenées (France) contribue pour 4% de ce montant dans le financement du projet intitulé "Développement de la capacité endogène pour l’amélioration de la qualité de vie et renforcement de la société civile". Il s’agit, à travers le programme mené, de permettre aux populations à revenus faibles d’avoir accès à des logements de qualité à un coût modéré grâce à "des techniques innovatrices et respectueuses de l’environnement", selon la représentante de l’Union européenne, Alessandra Cuchi. L’innovation ici, c’est la construction sans bois et son intérêt dans la région du nord et du Sahel est l’économie en matière de déboisement. Selon le président de DW France, cette technique a permis d’économiser 7 kilomètres de poutres de bois. La valeur des chantiers entre 2003 et 2006 est estimée à plus de 75 millions de francs CFA.

La coopération danoise est présente dans l’appui à la construction sans bois depuis 1995 à travers le projet "Un espoir dans le Sahel" conduit par la Croix rouge des deux pays. Depuis cinq ans, l’ambassade du Danemark accompagne DW pour un montant de 307 millions de francs CFA avec pour entre autres objectifs le développement d’un plan d’action départementale pour l’amélioration de l’habitat et l’infrastructure décentralisée et pour les protections de l’environnement, l’intégration des femmes dans le programme. Sur ce volet, 135 femmes potières ont été formées et dotées de six fours construits selon le modèle sans bois qui se révèlent plus économique en matière de consommation de combustible. Ces femmes fournissent également les maçons en gouttières céramiques pour la construction sans bois. Toute chose qui leur procure un revenu supplémentaire.

Par Abdoulaye TAO


Arsène Tuina, coordonnateur de Development Worshop

Les avantages de la construction sans bois sont multiples. Le premier est la conservation de l’environnement. On n’a plus besoin de couper du bois pour servir de poutres ou de la paille pour servir de toiture. La plus-value de cette technique au plan social est la création d’emplois en milieu rural à travers la formation des maçons et des personnes qui interviennent dans le processus de construction tels les artisans qui font les briques et les femmes qui fabriquent les gouttières, les charretiers, etc.

L’impact économique est net parce que tout se trouve sur place et les échanges n’appellent pas d’acteurs extérieurs à la communauté. C’est une construction qui est très économique également. La maison sans bois est un produit pour les riches et pour les pauvres. La différence se trouve dans les finitions que chacun souhaite apporter à sa maison.

Nous avons organisé cette cérémonie pour récompenser les meilleurs maçons et montrer que c’est une technique qui rapporte à l’individu et surtout à la vulgariser. C’est pour cette raison que nous avons invité les responsables et les élus locaux.

Le Pays

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