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Relecture du Code électoral : Elle est loin d’être la panacée annoncée

Publié le mercredi 6 février 2008 à 11h22min

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Le Code électoral revient au centre des débats politiques. Mais l’a-t-il seulement un jour quitté depuis l’adoption de la loi fondamentale ? Comme une sorte de boomerang, il s’invite de façon régulière au cœur de l’actualité. On reparle de sa relecture, une idée non nouvelle, mais à la différence que celle à venir fait consensus. Faut-il seulement savoir si elle est prioritaire à une refonte totale du paysage politique ?

Le prochain épisode de cette relecture, pour autant qu’il est admis par tous, reste encore trop flou quant aux contours que les scénaristes attitrés veulent lui donner. Une relecture du Code électoral quelle qu’en fut l’orientation n’est ni anodine ni futile.

Ce bréviaire régissant avant tout la vie publique dans son aspect important, la dévolution du pouvoir, il en demeure probablement pour les principaux acteurs son alpha et son oméga. Sans être grand clerc ou devin de la chose juridique d’une part et des aspects du texte à « améliorer » d’autre part, on subodore que la principale donne visée s’appelle le mode de scrutin. Avant tout et en premier lieu c’est certain. Vieille habitude n’est-ce pas ? Les réformes législatives et réglementaires appartiennent à la classe politique. La sclérose et le surplace ne sont pas conseillés, même si en ce domaine, les progrès à faire, concernant le brouillement des idées novatrices et qui font gagner en avancées, restent considérables.

Trop de monologues et pas assez d’affrontements des conceptions et des visions. Paradoxalement, lorsqu’il s’agit du Code électoral, l’intérêt monte d’un cran et les avis entendus déjà sur le sujet donnent le ton du débat. On espère que ce serait une vraie relecture entend-on, toute chose laissant à penser qu’on anticipe sur les regrets présupposés. Cette sorte de tare chez les politiques, faisant qu’ils fassent fi de l’intérêt général, pour ne voir chacun que midi à sa porte. Nul ne sait si cette révision annoncée pour l’année en cours sera un coup pour rien. Encore qu’il faille définir clairement pour chacun les aspects incriminés et pour l’heure, rien de bien limpide à ce propos. Mais il y a une autre réforme qui vaille vraiment la peine et qu’il faut mener de pair avec celle du Code, sinon, il y aura comme une sorte de prêche dans le désert. Ramener le nombre de partis à une proportion acceptable.

Cette pléthore ridicule

L’homme doit relever les lacunes marquant son action et se donner les moyens de les combler. Si le code en a, c’est la normalité même que d’apporter des correctifs. A ce sujet, il revient facilement que chacun se plait à vanter les mérites du Code électoral consensuel de 2002, celui ayant consacré le mode de scrutin au plus fort reste ramené au découpage électoral de la région. Il avait en effet permis à plusieurs partis d’accéder à l’Assemblée avec un émiettement dangereux de par un quotient électoral non qualifié encore moins représentatif. Or, le représentant doit s’exprimer au nom d’une population qualifiée et fort justement représentative. C’est pourquoi, l’enracinement de la démocratie ne saurait passer par le mode de scrutin, mais par la solidité des partis et leur ancrage véritable.

On connaît les ravages que peuvent avoir des partis claniques, sinon centrés autour d’un individu et de ses parents. Des députés ont fait partie de la dernière législature avec uniquement les voix de leur patelin, c’est un danger. Le tableau tel qu’il se présente avec plus de cent partis politiques doit davantage préoccuper la classe politique que la relecture du Code électoral. Ce nombre-là, certes l’apanage des pays africains, entraîne une cacophonie et pis, rend totalement inaudible leur message. Faire des reproches au Code électoral, selon lesquels, il faut un scrutin à fortes doses de proportionnelle, c’est refuser d’inscrire le processus dans la quête de qualité. Une Assemblée multicolore avec trois à cinq partis solides et jouissant de la légitimité de votes qualifiés ne peut que poser les bases d’une alternance certaine. Il en va du futur de la démocratie.

Trop tendre pour…

La démocratie selon les spécialistes est un système immuable dans ses fondements, mais que chaque pays doit s’efforcer d’adapter à son contexte. Sur la représentativité des sensibilités, pour l’instant elle n’a pas trouvé mieux que la proportionnelle. Encore que la définition de sensibilité en présence se confond hélas d’avec le nombre de partis en Afrique. Là, il est difficile de penser que plus de cent partis signifient autant d’expressions et de projets sociétaux.

Dans une élection où le bulletin offre le choix de cinquante partis, il y a un manque de prise de conscience des acteurs sur le peu de sérieux perçu par l’observateur extérieur devant un « parchemin » kilométrique. La démocratie prend alors un coup de farce, la noblesse supposée de la politique souffrant du côté alimentaire pris par une telle bousculade pour accéder à l’hémicycle. La proportionnelle dans ce cafouillage n’a plus son sens, l’impression étant que toutes sortes d’individus s’invitent dans une arène où la qualité et le talent doivent être les maîtres étalons. Mais, le problème fondamental avec un mode de scrutin favorisant la multitude des partis concerne l’instabilité de la vie publique et par ricochet celle des institutions.Nos pays aux économies fragiles peuvent-ils supporter le jeu de chaînes musicales qu’engendrera un mode qui ne serait pas majoritaire ?

L’exemple d’Israël où le jeu politique est en perpétuelle recomposition et celui de l’Italie, la récente démission de Prodi est encore toute fraîche, finissent de prouver que les recommencements à tout-va, entraînent un arrêt de la nation, se chiffrant en termes de milliards. Du reste le cas d’Israël, avec l’incapacité de trouter une solution judiciaire équitable à la situation de son Premier ministre, accusé de harcèlement et de corruptions multiples, achève de convaincre de la nuisance des petits partis ayant pouvoir de peser sur le destin des pouvoirs. Il est temps peut-être de toiletter encore le Code électoral, mais encore faut-il que ce ne soit pas dans le but, même inconscient de servir la foultitude de partis, dont le nombre ne donne pas envie de se rendre aux urnes. On se met à croire que les Sankaristes iront vraiment à l’union. Ce serait déjà ça de gagné. Attendons cependant de voir, rien n’est moins sûr.

Souleymane KONE

L’Hebdo

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