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Jean-Marie Bockel : Le spleen d’un ministre français

Publié le mercredi 23 janvier 2008 à 10h21min

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Jean-Marie Bockel, secrétaire d’Etat français chargé de la Francophonie, vient, à travers une sortie mémorable de demander au président français Nicolas Sarkozy, “l’activation des réformes promises” pour mettre fin à la “Françafrique” : tous ces réseaux multiples de relations personnalisées qui font le lit de l’exploitation du continent et perpétuent son sous-développement.

Une sortie courageuse et digne de ce bretteur d’idées, qui n’est cependant pas loin de ressembler à de l’utopie, tant il apparaît que Bockel veut ainsi lutter contre l’inéluctable, voire la fatalité.

En effet, la “Françafrique” apparaît comme un couple “monstrueux” où les deux conjoints se soucient plus de leurs intérêts cryptopersonnels que de ceux de leurs “enfants” qui sont ici les peuples français et surtout africains. Un deal “mafieux” où blanchiment d’argent, trafic d’armes ou de drogues, meurtres politiques... sont perpétrés au profit des seules élites. Le procès Elf-Gabon a révélé une partie de cet iceberg mis en place par Foccart au lendemain des indépendances et qui a survécu à tous les présidents successifs de la Ve République. Lesquels présidents font leur beurre dans cette “mare aux canards”, notamment lors des campagnes électorales, au cours desquelles l’aide publique au développement détournée de son objectif initial, leur sert de “trésor de guerre”. Bockel ne le sait peut-être pas, ou, à tout le moins, veut jouer à l’enfant de chœur en étalant ainsi publiquement ses états d’âme.

Ce qui n’emeuvra pas outre mesure Nicolas Sarkozy, qui, après son discours “enchanteur” de Cotonou (faut-il rappeler qu’il était seulement candidat à la présidence) et son incartade dakaroise est rentré depuis dans le rang. Omar Bongo Ondimba, chef de file des “Françafricains” a été reçu à l’Elysée et d’autres caciques lui ont depuis, emboîté le pas.

L’ami “Sarko” a compris avec le doyen Omar, que “la France sans l’Afrique est comme une voiture sans carburant, et l’Afrique sans la France une voiture sans chauffeur”. Une vision quelque peu caricaturale mais ô combien réaliste pour le plus grand malheur de nos peuples ! Etat de pauvreté endémique, “mort clinique” de certains pays (Centrafrique), maladies, voilà le lot du continent le plus riche du monde, saigné par ces corsaires des temps modernes. L’âme du preux chevalier Bockel s’en est offusqué, ce qui n’augure rien de bon pour sa future carrière politique. Comme le rappelait Georges Brassens “les bonnes gens n’aiment pas ceux qui suivent un autre chemin qu’eux”. Bockel sera bientôt payé pour le savoir. Garde-à-vous soldat !

Boubacar SY
magnansy@yahoo.fr

Sidwaya


APPEL A LA RUPTURE DANS LA FRANçAFRIQUE

L’UNDD en phase avec le secrétaire d’Etat Jean-Marie Bockel

L’Union nationale pour la démocratie et le développement (UNDD) est totalement en phase avec les récentes déclarations du secrétaire d’Etat français chargé de la Coopération et de la Francophonie, Jean-Marie Bockel. Le parti de Me. Hermann Yaméogo le fait savoir à travers cette lettre ouverte au secrétaire d’Etat français signée par le secrétaire national chargé des Relations extérieures de l’UNDD, Deval Milogo, pour soutenir et encourager l’intéressé dans son rappel au président Sarkozy de rompre avec certaines pratiques de la Françafrique.

Les vœux que vous avez présentés, et qui annoncent l’activation des réformes promises par le président Nicolas Sarkozy à Cotonou (et confirmées au lendemain de son élection) suscitent un émoi bien compréhensible dans nombre de palais africains.

Pour beaucoup de nos dirigeants, l’absence de déclinaison de la nouvelle politique africaine de la France, depuis l’élection de Nicolas Sarkozy, sonnait comme un enterrement en grande pompe de sa volonté de rupture avec les réseaux, les multiples relations personnalisées, qui ont fait le lit de l’exploitation du continent au lieu de sa libération.

En appelant comme vous l’avez fait, avec courage, pertinence, au retour à l’esprit de la rupture, vous avez donc ébranlé dans leur assurance, tous ceux-là qui s’étaient convaincus que le temps des frayeurs passé, ils pourraient - comme au bon vieux temps de la "Françafrique" - continuer à piller les richesses de leurs pays en foulant aux pieds les principes démocratiques pour se construire des richesses protégées notamment dans des paradis fiscaux. L’Union nationale pour la démocratie et le développement (UNDD) comprend donc que bien de morveux en soient réduits à vitupérer et à prodiguer des menaces de toutes sortes.

Ce que vous ne devez pas oublier, c’est que tout homme qui se noie s’accrocherait à un brin de paille ; ce que vous devez accepter, c’est qu’il n’est de meilleur parti à prendre que celui des peuples et de la jeunesse. En l’occurrence, votre volonté de traiter les maux de la mal gouvernance, de la dissipation de l’aide - qui causent au continent un mal structurel- est souhaitée par les Africains. Elle est particulièrement souhaitée par ces jeunes, atteints comme vous l’avez souligné, de ce mal absolu de la désespérance en leur continent et qui les pousse à braver déserts, mers, humiliations, mort, pour gagner les berges de l’Europe dans laquelle ils voient le paradis. C’est à ce niveau qu’il faut agir au plus vite puisque le temps est compté, et vous l’avez bien senti. C’est à ce niveau qu’il faut intervenir en faisant toutefois une lecture encore plus fine des causes de ces dérèglements qui comportent des responsabilités plus lourdes que relevées à l’endroit des gouvernements français passés.

Soutien dans la croisade

Mais sachez surtout, monsieur le Ministre, qu’en la circonstance, vous ne manquerez pas de soutien dans votre croisade car, depuis longtemps, des voix comme celle de l’UNDD se perdaient dans le désert des égoïsmes et des soutiens internationaux dont les gouvernants africains s’étaient assurés, pour brader les intérêts de leurs peuples.

Nous souhaitons que cette nouvelle remontée au filet de votre part soit la bonne, que dans le train de réformes proposé au gouvernement et au président Sarkozy, vous continuiez de tenir compte de ce que la mise en œuvre des conditionnalités dans l’aide, l’assurance d’une gouvernance durable au continent n’est pas seulement un devoir de solidarité mais un intérêt pour la propre sécurité de la France, de l’Europe et du monde.

Continuez de ne plus faire de différence - pour plaire aux dictateurs - entre la gouvernance économique et la gouvernance politique : les deux sont liées, et restez toujours ferme, droit dans vos bottes pour dire que ceux que la nature a pourvus en matières premières (dont les prix montent) et qui n’arrivent pas à développer leurs pays, ne pratiquent pas la bonne gouvernance mais aussi à dire que ceux qui clament avoir réussi la prouesse, sans matières premières, d’ouvrir la porte de la croissance à leurs pays et qui s’enrichissent au lieu d’enrayer la pauvreté, ne pratiquent pas davantage la bonne gouvernance. Ne perdez surtout pas de vue aussi ce fléau en voie d’être endémique sur le continent qu’est celui de la pratique du mercenariat d’Etat par des dirigeants africains et européens, avec la connivence de certaines firmes et entreprises du Nord qui, pour piller allègrement les ressources minières, agricoles..., de pays tiers, déclenchent des conflits armés avec comme corollaire de nombreuses pertes en vies humaines, des déplacements massifs de populations, des épidémies, etc...

Trafic des Constitutions, fraudes électorales... à dénoncer

Prenez soin à ce que votre sortie ne retombe pas, tel un soufflé, comme on dit.

Pour ce faire, monsieur le ministre, osez dénoncer ceux qui trafiquent les Constitutions pour perdurer au pouvoir, ceux qui font de la fraude électorale un sport d’Etat, ceux qui construisent des républiques monarchiques et qui sont passibles de crimes de compétence universelle, comme ceux qui, arrivés pauvres comme Job au pouvoir, se retrouvent riches comme Crésus quelques années après leur accession au pouvoir ! Apprenez à comparer les gouvernances africaines au meilleur et non au pire, comme on le fait généralement pour donner bonne conscience aux dictateurs africains. En démocratie, le Cameroun, le Burkina Faso, ne sont ni la RDC, ni le Darfour, mais ils pourraient être comme le Ghana, l’Afrique du Sud et pourquoi pas l’Allemagne ?

Demandez, s’il vous plaît, cette même clairvoyance à vos ambassadeurs afin qu’ils sachent se préserver des roueries et des opérations de charme diverses dans lesquelles sont maintenant passés maîtres bien de dictateurs africains, pour orienter leurs rapports et fausser les décisions du gouvernement français.

Vous servirez ainsi, à travers moult difficultés certes, la cause de l’Afrique mais aussi la cause de la France, celle de l’Afrique et surtout de sa jeunesse.

Veuillez agréer, monsieur le ministre, l’expression de ma très haute considération.

Ouagadougou, le 19 janvier 2008

Deval MILOGO

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