"Je suis presque systématiquement surpris", a confié vendredi à l’Associated Press un observateur clé du dispositif des prix Nobel, Stein Toennesson, directeur de l’Institut international de recherche sur la paix, basé à Oslo.

Les choix de M. Toennesson rencontrent pourtant beaucoup d’écho dans les médias et influencent largement les cotes établies par les bookmakers, malgré son absence d’information à la source. Du coup, chaque année, ses pronostics pour le Nobel de la Paix sont largement cités, bien documentés et, l’admet-il volontiers, le plus souvent erronés.

En cette année de préoccupation mondiale pour le réchauffement climatique, Stein Toennesson a suggéré que le comité pourrait attribuer un Prix commun à l’ancien vice-président des Etats-Unis Al Gore et à la militante inuite de l’environnement, la Canadienne Sheila Watt-Cloutier.

"Ca concernerait le changement climatique et ça respecterait la parité homme-femme", a-t-il argué.

Parmi les autres personnalités mentionnées, figurent le médiateur finlandais pour la paix Martti Ahtisaari, ou des militants des droits de l’Homme tels que la Russe Lida Yusupova, la Chinoise Rebiya Kadeer ou encore le moine vietnamien Thich Quang Do.

Parfois les trois femmes et les deux hommes qui composent le comité du Prix Nobel de la Paix choisissent un parfait inconnu comme l’an dernier, avec l’économiste bangladais Muhammad Yunus et sa Grameen Bank, organisme de microcrédit.

"Quelquefois, nous distinguons une personne connue, parfois nous essayons d’utiliser ce moyen pour placer quelqu’un sous la lumière des projecteurs", a expliqué Geir Lundestad, le secrétaire du comité du prix Nobel de la Paix.

Selon lui, les prix Nobel sont de plus en plus usités pour souligner que de nombreux paramètres sont nécessaires à la consolidation de la paix : la protection de l’environnement, le partage des ressources, l’élimination de la pauvreté sont aussi importants à cet égard que les accords de paix ou de désarmement.

Les événements monopolisant l’attention du monde juste avant l’annonce des lauréats - comme par exemple les récentes manifestations démocratiques en Birmanie- sont rarement pris en compte car le comité respecte scrupuleusement une date-limite de nomination fixée au 1er février.

Pour ce qui est de M. Gore, son profil est sans doute son plus grand handicap pour remporter le prix Nobel de la paix dans la mesure où il jouit déjà de l’attention du monde sur le changement climatique.

A propos du prix Nobel de Littérature, le bookmaker britannique Ladbrokes a parié sur une victoire de l’écrivain italien Claudio Magris, devant le poète australien Les Murray. Le romancier américain Philip Roth -dont le nom circule régulièrement pour le prix littéraire- était classé troisième.

"J’aimerais que le prix soit attribué à un Américain cette année. Il y en a au moins deux qui le méritent vraiment : Cormac McCarthy, qui a obtenu le Prix Pulitzer pour son dernier roman ’La Route’ et Philip Roth", a déclaré Jonas Axelsson, de la maison d’édition Bonnier à Stockholm.

Le suspense ne sera plus très long. Lundi, la médecine ouvre le bal à Stockholm, suivie toute la semaine par les autres disciplines -physique, chimie, littérature, économie. Seul le prix Nobel de la Paix sera attribué à Oslo le 12 octobre. D’ici là, pas la peine d’essayer de percer le secret : les comités suédois et norvégien travaillent séparément et dans le plus grand secret, refusant même de dévoiler les personnalités nommées et prenant leur décision au dernier moment.

Rendez-vous le 10 décembre, jour anniversaire de la mort de l’industriel suédois Alfred Nobel, créateur en 1901 des prix éponymes pour la cérémonie de remise des prix, dotés chacun de 10 millions de couronnes suédoises (1,09 million d’euros).

AP