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Fiscalité : La neutralité de la TVA

Publié le jeudi 27 septembre 2007 à 07h25min

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Depuis quelques semaines, une campagne de publicité lancée par la Direction générale des Impôts tend á sensibiliser les opérateurs économiques quant à leur devoir de s’acquitter de leurs obligations fiscales. Parmi les impôts concernés, il y a la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Parmi les arguments qui sont avancés comme avantage, il y a sa neutralité. C’est le lieu d’expliquer la neutralité de la TVA et ses conséquences sur les prix des produits. Nous nous sommes adressé à notre collaborateur en matière fiscale.

La taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a été introduite au Burkina Faso il y a déjà plus de dix ans (elle a été mise en application par une la loi 4/92/ADP du 3 décembre 1992 et applicable le 1er janvier 1993). Parmi les raisons qui ont fortement milité en sa faveur, il y a sa neutralité supposée dans le domaine commercial ou marchand, toute chose en principe qui devrait réjouir les opérateurs économiques, du fait que c’est l’un des rares impôts qui ne devrait pas influer sur leurs opérations quand elles se déroulent entre eux, c’est-à-dire tant qu’ils ne sont pas des consommateurs finaux. Mais pour mieux comprendre ce phénomène, il convient aussi de faire une comparaison avec l’impôt qu’elle (le TVA) est censée remplacer, en l’occurrence la Taxe sur le Chiffre d’Affaires (TCA).

1 - Les éléments de comparaison

Pour être simple, supposons une chaîne de trois opérateurs (A, B et C) et un consommateur final (D). L’opération consiste en un acte d’achat-vente, c’est-à-dire sans transformation. Gardons un taux de 18% et une même marge bénéficiaire à chaque étape et un prix de départ de 100 F.

1-1- Si nous sommes en TCA (taxe sur le chiffre d’affaires)

A vend à B : on aura 100 + 18% de 100= 118 F (dont 100 HTCA et 18 de TCA)

B vend (le même produit) à C, et il ajoute sa marge bénéficiaire de 10 F, on aura : 118 F + 10 +18% de 128= 151,04 (arrondissons à 151 dont 128 HTC et 23 de TCA)

C vend (le même produit) á D, et il ajoute sa marge bénéficiaire de 10 F, on aura : 151 F + 10 + 18% de 161= 189,98 (arrondissons á 190)

Si nous considérons que D est le dernier consommateur, il paiera le produit à 190 F, soit quasiment le double de son prix.

1-1- Si nous sommes en TVA (taxe sur la valeur ajoutée), A vend á B : on aura 100 + 18% de 100= 118 dont 100 HT et 18 de TVA)

B vend (le même produit) á C, et il ajoute sa marge bénéficiaire de 10 F, on aura : 100 F + 10 + 18% de 110= 129,8 (arrondissons á 130 dont 110 HT et 20 de TVA)

C vend (le même produit) á D, et il ajoute sa marge bénéficiaire de 10 F, on aura : 110 + 10 + 18% de 120= 141,6 (arrondissons à 142 dont 120 HT et 22 de TVA).

D étant le dernier consommateur, il paiera le produit á 142 F

2 - Observations et commentaires

2-1- Les prix sont plus élevés lorsque l’on utilise la TCA (190 F contre 141 F en TVA). Les raisons sont multiples, mais la plus importante est que la TCA est un impôt cumulatif, non remboursable. Dans ce cas, il est tout à fait normal que l’opérateur économique l’impute dans ses prix quand il vend. A l’opposé, la TVA étant remboursable (sous certaines conditions bien évidemment), l’opérateur économique ne le répercutera pas sur son produit lors de la vente.

2-2- Il apparaît que la TVA ne joue pas sur les prix qui sont pratiqués entre les opérateurs économiques. Quel que soit son taux, chaque opérateur fera sa déclaration fiscale, par la formule TVA collectée, TVA déductible (c’est-à-dire remboursable) et TVA nette ou à payer. On aura ceci :

Pour A : TVA collectée : 18 F TVA déductible : 0 F TVA nette : 18 F

Pour B : TVA collectée : 20 F

TVA déductible : 18 F

TVA nette : 2 F

Pour C : TVA collectée : 22 F TVA déductible : 20 F

TVA nette : 2 F

D - étant le dernier consommateur, il n’est pas nécessaire pour lui de faire toute cette opération.

2-3- la neutralité de la TVA apparaît dans le fait que le taux de TVA n’est pas important pour l’opérateur économique. Nous sommes alors dans une situation parfaite. Par contre, c’est le consommateur final, en l’occurrence D qui va prendre toute la charge. Ainsi les TVA nettes constatées et reversées à l’État (18 F + 2+ 2, soit 22 F) ont été payées par D (le produit a coûté au départ 100 F auquel il faut ajouter les marges bénéficiaires respectives de B et C, soit 20 F). On a donc 100 F comme prix de départ + 20 F de marges bénéficiaires + 22 F de TVA nette.

Cette analyse ne vaut que dans le cas où la TVA est déduite intégralement, c’est-à-dire que tout le monde joue le jeu. Dans la réalité, il y a d’une part le secteur informel et d’autre part que le taux de déduction n’est pas toujours à 100% (lorsque par exemple l’opérateur économique vend des marchandises taxables et des marchandises non taxables à la TVA).

Amadou N. YARO
Directeur général du Centre d’Enseignement à Distance de Ouagadougou

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Vos commentaires

  • Le 27 septembre 2007 à 18:25, par Malick En réponse à : > Fiscalité : La neutralité de la TVA

    Bonjour,

    Je voudrai apporter ma modeste contribution à cette problématique de la fiscalité au Burkina Faso. Je demande l’indulgence de Cyriaque car mon message est un peu long.

    Je suis un transporteur routier dont les camions semi remorques effectuent des déplacements sur les différents ports de la sous région.
    Mon intervention porte sur la fiscalité dans ce domaine qui, à mon avis est complètement irréaliste. Pour m’expliquer, je vous relate la situation actuelle au Burkina Faso à travers un exemple personnel concret.

    Lorsque un de mes camions quitte Ouagadougou pour Lomé, je le fais partir vide, en ce sens qu’il ne transporte rien sur l’axe Ouagadougou- Lomé. Arrivée à Lomé, le véhicule charge 40 tonnes de marchandises à destination de Ouagadougou à raison de 28 000 FCFA la tonne pour un total de 1 120 000 FCFA. Ci-dessous, les dépenses issues de ce montant :
    -  Frais de route Aller vide Ouaga-Lomé : 225 000 FCFA
    -  Frais de chargement de marchandise à Lomé : 50 000 FCFA
    -  Frais de route Retour chargé de 40 Tonnes Lomé-Ouaga : 450 000 FCFA
    TOTAL : 725 000 FCFA
    Résultat d’exploitation : 1 120 000 FCFA - 725 000 FCFA = 395 000 FCFA.

    Le déplacement du camion me rapporte ainsi théoriquement 395 000 FCFA par voyage.

    Là où le bas blesse, c’est lorsque l’administration fiscale entre en jeu. En effet, je suis tenu de payer les frais supplémentaires suivants sur les 1 120 000 F :
    -  18% de TVA sur le chiffre d’affaire soit 1 120 000 F x 18% = 201 600 FCFA
    -  35% d’impôt BIC sur le résultat d’exploitation du voyage soit 395 000 F x 35% = 138 250 FCFA
    -  11 610 FCFA à la CNSS par mois
    -  7 120 FCFA d’Iuts/TPA par mois
    TOTAL : 358 580 FCFA

    En résumé, sur un voyage avec un chiffre d’affaire de 1 120 000 F, j’ai des dépenses dues au trajet de 725 000 F + 358 580 F de dépense fiscale pour un total de 1 083 580 FCFA.

    Théoriquement donc, en déclarant honnêtement mes activités auprès de la direction des impôts, un camion en 1 voyage me rapporterait 1 120 000 F - 1 083 580 F = 36 420 FCFA.

    Ainsi donc avec une moyenne de 2 voyages dans le mois, si choisis de déclarer honnêtement mes résultats, je me retrouverais mensuellement avec 36 420 F x 2 voyages soit 72 840 FCFA par camion par mois.

    Par contre si choisis de ne pas déclarer, avec une moyenne de 2 voyages dans le mois, je me retrouverais mensuellement avec 395 000 F x 2 voyages soit 790 000 FCFA par camion par mois.

    Quant on sait qu’un bon camion coûte près d’une vingtaine de millions de FCFA et quant on connaît l’énorme risque qu’il y a dans ce métier (il peut avoir un accident ou une panne majeur à tout moment !), pourrait-on le rentabiliser avec des recettes de 72 840 F par mois, quant on sait en plus qu’il y a en sus les assurances, les visites techniques, les salaires des chauffeurs, etc.?

    Peux t on être surpris qu’avec une fiscalité aussi inappropriée, une part importante des transporteurs ne déclarent pas leurs résultats ou les tronquent ? Quelle est l’idée de nous demander de payer la TVA sur notre chiffre d’affaire comme si nous la percevions de nos clients ?? Les camions immatriculés au Togo ou au Ghana qui transportent des marchandises vers le Burkina paient-ils 18% de TVA sur leur chiffre d’affaire ?? Les camions maliens ou nigériens qui traversent le territoire burkinabé paient ils 18% de TVA ??

    Respectueusement,
    Malick Tankoano.

    • Le 1er octobre 2007 à 14:23, par Alexis, Contrôleur des Services Financiers En réponse à : > Fiscalité : La neutralité de la TVA

      Merci bien pour votre apport.
      En effet, vous rendez un service de port des marchandises. A cet effet, il convient de constater que cela contribue à ajouter de la valeur à celles-ci une fois importées ! De ce fait, la valeur additionnelle qu’acquiert la marchandise suite à son transport mérite que celui qui bénéficie de ce port puisse verser la TVA à l’Etat.
      Il faut en réalité que vous collectez la TVA chez vos clients qui sont les consommateurs finaux du service de port d’autant plus que dans le calcul de leurs coûts de revient ces derniers incorporent les frais de port.
      Ce qui réduit vos marges bénéficiaires réside simplement au fait que vous supportez anormalement cette taxe à la place de vos clients.
      A supposé que ceux-ci achètent la marchandise à l’Etranger à 1 000 000 la Tonne et que vous la transportez à 28 000 *(1+18%)= 33 040 fcfa, vous aurez ainsi vos 28 000F et vous pourez reverser la part de l’Etat que vous avez ainsi collecté.
      Par ailleurs, dans vos calculs vous avez mentionné l’IUTS et la TPA ; en effet, ces impôts sont mensuels et les soustraire des charges d’un voyage pourrait prêter à confusion au regard des lecteurs.
      Merci de bien vouloir continuer à contribuer au développement de notre cher Faso.

  • Le 27 juillet 2018 à 09:10, par DIANE OUEDRAOGO En réponse à : Fiscalité : La neutralité de la TVA

    juste une petite contribution au cas ou vos préoccupations sont toujours d’actualité. la TVA est facturée sur le trajet national. le trajet internationale n’est pas soumise à la TVA. l idéal est de déterminer la distance soumise et déterminer le montant du trajet national.

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