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UNDD : "La vermine s’est attaquée au Conseil constitutionnel"

Publié le lundi 3 septembre 2007 à 08h52min

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Hermann Yaméogo

L’Union nationale pour la démocratie et le développement (UNDD) a tenu le 31 août dernier une session de son Bureau exécutif national. Le communiqué de presse ci-dessous rend compte des travaux de ce BEN.

Sur convocation de son président, Me Hermann Yaméogo, le Bureau exécutif national (BEN) s’est retrouvé à son lieu habituel de réunion, à Ouagadougou, le 31 août 2007 à partir de 18 H 00. Ordre du jour :
- Vie du parti ;
- Vie nationale ;
- Vie internationale.

Premier point : vie du parti

Le parti s’est félicité de la tenue, le 16 juin dernier à Boulmiougou, de son 6e Forum de communication alternative sur le thème "Procès de Charles Taylor : Déni de justice programmé de la communauté internationale ?" et de la projection du film documentaire "L’UNDD, ce symbole de résistance que l’on veut liquider".

Le bureau a dénoncé le fait que la Télévision nationale du Burkina (TNB), présente, n’ait pas diffusé la manifestation, et remercié les médias qui en ont fait état.

Il a informé de la ventilation du film aux structures du parti, aux médias nationaux et internationaux, aux représentations diplomatiques et à différentes personnalités à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.

Les nombreuses et convergentes prises de position au sujet du dérapage de la démocratie en général - et au Burkina Faso en particulier - ont conforté le bureau dans sa juste position attachée à la refondation de la démocratie. Ainsi, a-t-il approuvé, la remarque (qu’il espère sincère) du président Sarkozy faite lors de son adresse au corps diplomatique sur les menaces que font peser des "acteurs économiques, des médias, ou pire, des réseaux criminels et terroristes" sur "les progrès des droits de l’homme et de la démocratie".

Le BEN a aussi félicité Alpha Oumar Konaré qui, sur RFI le jeudi 30/08/07, a lié les déviances démocratiques en Afrique à d’autres facteurs qu’à ceux habituellement imputés à la seule classe politique, et spécifiquement aux oppositions. A. O. Konaré, en soulignant spécialement que la disparition des oppositions dans bien de pays africains est imputable à des pouvoirs maffieux qui financent les élections pour se livrer notamment à des opérations de blanchiment d’argent, a rétabli une vérité que le parti n’a de cesse de marteler.

Pour les mêmes raisons, le BEN s’est réjoui des interventions des professeurs Luc Ibriga et Augustin Loada lors du séminaire-atelier de restitution d’une étude sur le fonctionnement du système des partis politiques au Burkina, organisé par l’institut des affaires africaines de la "Germen institute of global and area studies" (GIGA) - auquel a participé le conciliateur Noël Yaméogo - et dont la presse a largement fait la relation. Ils ont, sans fioritures, en intellectuels conséquents, dressé un constat circonstancié des ratés, pour ne pas dire de la panne de notre démocratie, amenant le professeur Loada à prévenir qu’on peut tout faire avec la démocratie, sauf s’asseoir dessus.

Le BEN a ensuite donné l’information sur la participation de femmes du parti à une formation initiée par le National democratic institute (NDI), et échangé autour de questionnaires de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) des Nations unies sur le sujet suivant : "Partis politiques et la bonne gouvernance : les leçons apprises et perspectives d’avenir", et des réponses à y apporter. Enfin, en prévision de la tenue les 24, 25 et 26 octobre 2007 à Ouagadougou du 7e forum africain sur la gouvernance, la réunion a préconisé que le parti tienne un Forum de communication alternative (FOCAL) pour discuter de la question.

Deuxième point : vie nationale

Abordant l’Affaire des réfections de la mairie de Ouagadougou, le BEN a noté qu’au-delà de ce frémissement de la Cour des comptes qui a permis d’assurer un contrôle objectif des comptes de certaines institutions, il importait de revoir dans son fonctionnement et ses attributions, cette structure, pour lui permettre, par des contrôles plus élargis sur la qualité de la gestion, d’endiguer les orientations partisanes des dépenses publiques qui découlent de l’exploitation, du rôle économique joué par les finances publiques.

Il a souhaité l’extension des compétences juridictionnelles de la Cour des comptes, voire la création d’un Conseil de discipline budgétaire et financière à saisine automatique et largement ouverte.

Si de telles dispositions et mécanismes existaient, on ne serait pas dans cette espèce d’impasse consécutive aux dénonciations de la Cour des comptes avec un Simon Compaoré menaçant de saisir la Justice sans le faire, une Cour des comptes incapable d’aller au-delà de son enquête pour instruire au fond et sanctionner, et un chef d’Etat à qui revient la possibilité de mouvementer la Justice ou de la réformer, et qui reste silencieux comme une tombe.

Concernant l’Affaire Idrissa Traoré, président du Conseil constitutionnel, mêlé à un scandale portant sur des travaux pour le compte de cette institution, le BEN n’a pas exprimé d’étonnement sur ce qui arrive. Sa conviction est, depuis longtemps, faite que cette structure ne pouvait que se corrompre -comme le poisson par sa tête- puisque sa composition est décidée par le seul pouvoir, dominé par le CDP, et que son président, sans mandat déterminé, est discrétionnairement nommé par le chef de l’Etat qui peut le faire partir quand il veut, pour les raisons qu’il veut. Il ne peut donc, dans ces conditions, que filer doux.

Le parti n’a jamais cessé de stigmatiser l’incapacité du Conseil constitutionnel à protéger la loi fondamentale : couverture de la forfaiture de la troisième candidature de Blaise Compaoré contrairement à l’article 37, cautions toujours données aux violations du suffrage populaire et du droit des partis politiques en particulier par la validation régulière de suffrages frauduleux, déni de justice par rapport à bien des plaintes dont il a été saisi, et spécialement au sujet de ce découpage électoral instituant un scrutin uninominal à un tour de fait, par la création de 15 circonscriptions avec un seul siège à pourvoir alors que le code électoral prescrit le scrutin proportionnel à la plus forte moyenne.

Pour le BEN, c’est à force de faire dans l’illégalité et d’en voir faire ailleurs sans conséquence que la vermine s’est attaquée au Conseil constitutionnel. Au-delà du remplacement sans délai du président sur la seule base des critères de compétence, de probité et d’expérience dans la magistrature, il s’agit surtout de s’attacher à une réforme de fond de la maison dans le cadre général de la réforme de l’Etat pour permettre au Conseil constitutionnel de jouer, enfin véritablement, son rôle dans la perspective d’une gouvernance réellement soumise au principe de la légitimation et du contrôle démocratique.

A cet égard, la direction a renouvelé ses propositions bien connues et qui tiennent, entre autres, à l’élargissement de la saisine du Conseil constitutionnel aux citoyens, à la nomination de ses membres par les magistrats et à l’élection de son président par les membres du Conseil avec un mandat à durée irrévocable.

Le BEN a ensuite déploré le conflit entre éleveurs peulhs et cultivateurs dans la région du Centre Sud ayant entraîné des pertes multiples (en vies humaines, en habitations, en animaux et autres biens). Il a rappelé que par le passé, l’éleveur peulh, en plus de son propre troupeau, avait la garde du gros bétail du cultivateur, et qu’après la récolte, celui-ci laissait les tiges de mil de son champ comme fourrage au bétail de l’éleveur, en contrepartie de quoi, les bouses de vache laissées par les animaux constituaient une excellente fumure organique pour le champ du cultivateur. Par ailleurs, dans les années 70, le gouvernement avait délimité le long des grandes voies de transhumance, des pistes de bétail pour éviter les conflits entre éleveurs et agriculteurs. Aujourd’hui, tout cela a volé en éclats à la faveur notamment de la pression démographique.

Le BEN propose que l’Etat assume ses responsabilités en prospectant des solutions pérennes grâce à l’application urgente des dispositions législatives et réglementaires en matière d’aménagement du domaine foncier national.

Abordant les catastrophes provoquées par la saison des pluies, la réunion a tout d’abord présenté ses condoléances aux familles éplorées. Elle a ensuite dénoncé le saupoudrage auquel se livre le pouvoir. Les ravages causés un peu partout aux champs, aux maisons d’habitation, aux échoppes, aux écoles et autres ouvrages publics... , posent de véritables problèmes qu’il faut prendre à bras le corps. Les pluies étant toujours abondantes, il convient, alors que nombre d’écoles sont occupées par des sans-abri, de procéder à une large information de la situation et de prendre des mesures concrètes pour secourir les victimes, notamment en baissant les prix des matériaux de construction.

Sur la rentrée scolaire, les membres du BEN ont reconnu que si la gratuité des livres au primaire soulageait un tant soit peu les familles, il était tout à fait regrettable qu’il y ait eu un tel tapage médiatique pour s’autoféliciter alors que la mesure s’avère être une demi-mesure puisque ce sont, probablement, uniquement les livres de maths et de français qui seront gratuits. Voilà qui fera des déçus, beaucoup ayant pris les engagements du pouvoir pour argent comptant !

Le BEN a ensuite estimé que la fermeture de l’IDRI, une école de diplomatie à vocation régionale, et l’affectation de 105 agents du ministère des Affaires étrangères dans d’autres ministères et institutions pour avoir seulement marché, étaient des mesures exorbitantes, inopportunes et inadaptées. Il a invité le gouvernement à rapporter ces mesures, comme il l’a fait pour les élèves policiers.

Troisième point : vie internationale

Le BEN a exprimé ses vives inquiétudes par rapport aux troubles que connaissent le Niger et le Mali. Sans méconnaître que, comme beaucoup d’autres pays africains, ils ont hérité de la colonisation d’ espaces étatiques artificiels, véritables patchworks de nationalités (et qu’ils n’ont pas toujours su initier les meilleures politiques d’aménagement du territoire pour y remédier), le BEN a surtout souhaité que l’on aille à l’essentiel : à la décentralisation démocratique avec les découpages administratifs et les transferts indispensables qui en découlent, à l’intégration sous-régionale reposant sur une dynamique de fonds structurels et de gestion optimale des flux migratoires. Mais les craintes unanimement partagées par le BEN résident dans les possibles instrumentalisations de ces rébellions aux fins de contrôle et de domination des économies des Etats sub-sahariens, et plus encore dans la possible formulation d’une revendication - que l’on sent en filigrane - portant sur la création d’un Etat touarègue à cheval entre plusieurs Etats sahéliens.

Il a souhaité que dans cette affaire nigérienne, le gouvernement mette un bémol à son volontarisme gênant pour laisser venir à lui d’éventuelles sollicitations de médiation.

Par ailleurs, considérant avec amertume l’échec de la réunion regroupant les Etats-Unis, le Brésil, l’Inde et l’Union européenne pour sauver le cycle de Doha, et les sombres perspectives qui en découlent, le BEN s’est inquiété du manque de mobilisation sincère et conséquente des gouvernants des pays "Afrique-Caraïbes-Pacifique" (ACP) par rapport aux Accords de partenariat économique (APE) avec l’Union européenne, véritable pacte colonial en préparation. Il a jugé que la sécurité mondiale pourrait être menacée par la mise en œuvre de ce dispositif annoncé qui risque de tuer l’agriculture africaine et qui s’apparente à une autre trahison de l’Afrique par ses dirigeants.

Le BEN a félicité la clairvoyance des organisations de la société civile qui ont dénoncé les APE et souhaité que le débat soit aussi approfondi au niveau des politiques. Il a décidé d’organiser également un Forum de communication alternative (FOCAL) sur les APE.

Enfin, l’UNDD, comme beaucoup, a relevé des incohérences dans les comportements comme dans le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy, par rapport à ses promesses électorales sur la rupture dans la politique africaine de la France. Les participants ont spécialement regretté la méthode choisie par le président français pour, comme il dit, présenter avec « amitié et franchise » son analyse sur l’état de l’Afrique. Non seulement, celle-ci n’a pas toujours été appuyée par la meilleure connaissance qui soit du terrain, mais elle a plutôt eu tendance à blesser inutilement dans leurs sentiments, les Africains. On peut dire la vérité en évitant de meurtrir !

Pour le BEN cependant, tout indique que le président français, par-delà les écrans des laudateurs, semble avoir pris la juste mesure du mécontentement provoqué en Afrique par son message de Dakar. Cela ressort de son discours du 27 août dernier aux ambassadeurs à Paris, au travers duquel il s’est efforcé de rattraper le coup en affirmant être à l’écoute des peuples africains. Il a même esquissé des rectifications possibles en instruisant expressément ses ambassadeurs "d’aller à la rencontre des forces vives du continent, et notamment de sa jeunesse", ceci dans l’optique de lui répercuter, avant son prochain voyage en Afrique, leurs attentes. Il a même souhaité que ces attentes, et notamment celles provenant de la jeunesse, puissent être exprimées, dans ce "même esprit d’amitié et de franchise" qui l’a habité à Dakar.

Cette volonté de contact plus marquée avec le peuple et les contre-pouvoirs africains vient non seulement rectifier le faux pas de Dakar, mais atténuer la pratique de ces tête-à-tête exclusifs entre dirigeants français et africains, dont la réplique prévue en septembre aux Nations unies risque d’accoucher encore d’une souris.

Mais, l’un dans l’autre, la réunion a jugé qu’il fallait prendre au mot Nicolas Sarkozy en acceptant l’offre de dialogue pour voir ce qui en résultera. Le parti pourra, après coup, pièces à l’appui, porter un jugement définitif sur sa volonté de rompre, comme promis, avec les pratiques détestables de la Françafrique.

C’est pourquoi le BEN a décidé d’initier une concertation de la jeunesse résistante burkinabè autour de la proposition de Nicolas Sarkozy afin de transmettre ses attentes au chef de l’Etat français par l’entremise de Son Excellence François Golblatt, ambassadeur de France au Burkina Faso.

Enfin, après avoir abordé diverses questions en divers, la séance a été levée à 20 h.

Ouagadougou, le 31 août 2007

Pour le Bureau exécutif national,
Le Président,
Me Hermann Yaméogo

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 5 septembre 2007 à 18:07, par Yamyélé En réponse à : > UNDD : "La vermine s’est attaquée au Conseil constitutionnel"

    Hé ! Les gars ! On dirait que pour une fois Hermann a eu raison hein ? Ce mercredi, j’ai écouté à la télé un décret présidentiel qui nomme quelqu’un de nouveau à la présidence de cette structure. Donc ce doit être probablement grave.

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