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Ali Coulibaly, membre du bureau politique national du RDR : "Proclamer que la guerre est finie est une chose, construire la paix en est une autre"

Publié le mercredi 29 août 2007 à 08h06min

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Ali Coulibaly

Le Rassemblement des républicains (RDR) entend participer pleinement aux prochaines échéances électorales en Côte d’Ivoire et y "triompher". C’est la conviction de son porte-parole, Ali Coulibaly, à travers l’interview qu’il nous a accordée au cours de laquelle il relève que son parti ne se départira pas de son rôle de veiller pour des élections "propres, crédibles et transparentes" en Côte d’Ivoire.

Sidwaya (S.) : Lors de la commémoration de la Flamme de la paix à Bouaké, on a noté l’absence du Premier ministre Alassane Dramane Ouattara. Pouvez-vous nous donner les raisons de cette absence ?

Ali Coulibaly (A.C.) : De notre point de vue, c’est un faux débat que l’on tente d’ouvrir. Il n’y a pas lieu à polémique même s’il est vrai que le président du RDR n’était pas présent à Bouaké. Il n’est pas non plus le seul à n’avoir pas participé à ce que l’on a appelé la fête de la réconciliation. Mais, on oublie de relever que le RDR a été bel et bien représenté à cette cérémonie par le ministre Henriette Dagri Diabaté, secrétaire générale de notre parti et qui y a dirigé une très forte délégation du RDR.

Je voudrais en outre faire remarquer que parmi les 20 000 personnes qui étaient au stade de Bouaké, on ne peut pas savoir qui appartenait à tel ou tel parti politique. Mais je puis affirmer avec certitude que nous avions une grande majorité de nos militants et de nos sympathisants qui ont pris part à cette fête. Nous soutenons entièrement l’Accord de paix de Ouagadougou. Il s’est trouvé que monsieur Ouattara n’a pas pu se rendre à Bouaké, mais cela ne prête aucunement à conséquence. Nous saluons l’acte qui a été posé, mais nous estimons qu’il faut aller au-delà du symbole. Proclamer que la guerre est finie est une chose, construire la paix en est une autre. La construction de la paix est une œuvre de longue haleine qui requiert beaucoup de patience. C’est un long chemin, souvent escarpé comme nous avons pu le constater ces dernières années en Côte d’Ivoire . En tout cas, cette absence n’enlève rien à la portée d’un tel événement qui a vu la participation de six (6) chefs d’Etat.

S. : Quel regard critique jetez- vous sur le processus de paix entamé depuis le 4 mars 2007 avec la signature de l’Accord politique de Ouagadougou ?

A.C. : Nous avons estimé que c’était une bonne chose que sous l’égide du président du Faso pour qui nous avons beaucoup de considération qu’un Accord de paix ait été conclu entre les principaux belligérants. Pour nous, ce qui est important c’est de faire en sorte que cet Accord soit appliqué de bonne foi et qu’il nous conduise véritablement à la paix. Comme vous le savez, nous estimons que l’une des conditions essentielles pour amener ce peuple déchiré à se retrouver et à se réconcilier, c’est l’organisation d’élections ouvertes, libres, justes, transparentes qui respectent les standards internationaux. Depuis sa nomination, le Premier ministre Guillaume Soro a bénéficié de notre soutien et il a fait un travail remarquable. Il reste à passer aux actes. Ce qui signifie dans notre entendement, de faire en sorte que les audiences foraines commencent. Le problème des sans-papiers est en effet criant dans notre pays. Il n’est pas normal que des citoyens n’aient pas de documents d’état civil.

Les audiences foraines doivent permettre de résoudre ce problème-là. Après les audiences foraines, il faut passer à l’identification qui doit déboucher sur l’inscription de tous ceux qui sont en âge de voter sur les listes électorales. Après quoi, les élections pourront avoir lieu. Il y a différentes étapes à franchir pour que nous arrivions à des élections susceptibles de permettre aux Ivoiriens de choisir librement leurs dirigeants et de renouveler les institutions ivoiriennes qui sont aujourd’hui, faute d’élections, totalement illégitimes. Il est temps que ce processus sur lequel les Ivoiriens fondent beaucoup d’espoirs, commence réellement et que nous soyons dans le concret.

S. : Au rang des griefs que vous avez émis se trouvent la prise en otage des médias publics par le pouvoir et la suppression du poste du haut-représentant du SG de l’ONU en Côte d’Ivoire, chargé des élections. Pensez-vous que ce sont des empêchements dirimants à la tenue d’une bonne élection ?

A.C. : Evidemment nous avons estimé que la décision du Conseil de sécurité des Nations unies était totalement inopportune et qu’elle ne prenait pas en compte la spécificité de la situation en Côte d’Ivoire. Elle marque un recul totalement inacceptable, puisque la nomination du haut-représentant procède d’une décision qui a été prise à Pretoria et d’un consensus des différents leaders politiques. L’ONU qui nous accompagne dans cette quête difficile de la paix ne peut pas se renier à ce point, alors que l’objectif que nous devrions tous avoir, c’est de créer la confiance et de faire en sorte que tous les Ivoiriens croient au processus électoral. Est-il besoin de rappeler que l’une des causes fondamentales de la crise que nous vivons, ce sont des élections troquées et truquées ?

Le président Laurent Gbagbo n’a eu de cesse, de le répéter en 2000 que nous avons eu des élections calamiteuses. Cela du fait que des leaders importants ont été arbitrairement éliminés de la course à l’élection présidentielle. D’où la nécessité pour nous d’avoir des élections qui ramènent la paix. S’il n’y a pas d’élections transparentes, il est à craindre que nous soyons confrontés à de nouvelles difficultés. Nous disons oui aux élections. Car la situation que nous connaissons est atypique, intolérable, inacceptable.

Il faut y renoncer assez rapidement sans sacrifier le reste du processus. Il faut faire en sorte que ces élections se déroulent normalement en respectant les différentes étapes. L’enjeu essentiel réside dans la transparence des élections. Les Nations unies ont pris une mauvaise décision, malencontreuse, en abandonnant l’option de départ qui consistait à faire en sorte qu’il y ait une instance neutre qui certifie les différentes étapes du processus électoral et qui rend les arbitrages en cas de contentieux. Sur le second point, vous savez que la démocratie dépend du bon fonctionnement des médias. Ce que nous réclamons est tout à fait normal dans les médias de service public puisqu’ils appartiennent à la collectivité nationale et non à un camp quel qu’il soit.

Il faut qu’il y ait plus d’équité à ce niveau. C’est tellement facile de dire que l’on veut que les élections soient propres et incontestables sans donner la possibilité aux formations politiques de l’opposition significative de faire connaître les projets dont ils sont porteurs au peuple ivoirien. Les élections c’est ce qui se passe en amont, pendant et après le scrutin. Nous sommes dans une période extrêmement sensible et si on est résolu à aller à des élections, il ne faut pas avoir peur de la contradiction. On ne peut pas encourager la promotion de la pensée unique. Il est essentiel que tous les Ivoiriens aient accès à ces médias.

S. : Comment avez-vous vécu la saignée que votre parti a connue avec le départ de certains camarades.

A.C. : Parler de saignée est totalement impropre. Il y a quelques camarades avec qui nous avons mené notre lutte pendant un certain moment qui ont estimé pour des raisons qui leur appartiennent qu’ils pouvaient partir. Mais fondamentalement, cela ne change rien du tout à ce que nous représentons dans l’imagerie populaire en Côte d’Ivoire. Il ne faut pas oublier, ces milliers d’Ivoiriens de toutes conditions, de toutes origines, de toutes ethnies qui, chaque jour, se rallient à notre parti politique. Tous les jours nous avons de nouveaux adhérents. Nous ne faisons pas un problème de ceux qui sont partis.

Je sais qu’il y a une campagne de presse qui avait tendance à faire croire que le RDR était en train de se désagréger, comme s’il suffisait qu’un ou deux cadres prennent le large pour qu’un idéal cesse d’exister. Notre parti est très fort et on l’a démontré il y a quelques semaines lors de la réunion de notre bureau politique avec le président Alassane Dramane Ouattara. J’estime qu’autant on adhère à un parti, autant on peut en sortir librement. Nous avons des hommes et des femmes de conviction à même de nous conduire à la victoire pour la prochaine élection présidentielle.

Une interview de Jean-Philippe TOUGOUMA
et Boubacar SY,
(Envoyés spéciaux
à Abidjan)

Sidwaya

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