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Jean-Luc Bambara : Ma vie, ma sculpture !

Publié le lundi 13 août 2007 à 07h41min

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Jean-Luc Bambara

Des Etats-Unis à la Hollande, en passant par l’Espagne, la France,... Jean-Luc Bambara émerveille par son art. Ses sculptures, expression d’une conscience de soi et du monde invitent l’esprit à la contemplation. Un hymne à la beauté aristotélicienne !

" La sculpture donne de l’âme au marbre" écrivait Chateaubriand. Pour Jean-Luc Bambara, elle est une voie royale pour connaître le monde et en percer les mystères. Sa magnifique histoire avec cet art plastique commence depuis sa tendre enfance. L’œil alerte, il admire tout ce qui l’entoure. Cette admiration est traduite en de talentueux dessins.

Jean-Luc est content du " feed-back " de son entourage. Il n’est pas pour autant entièrement satisfait. Il manque un "supplément d’âme, un souffle et une vie" à ses dessins. Son dessein désormais est de s’exprimer de façon plus incisive. Il se retrouve alors au Centre voltaïque des Arts (CVA) ; aujourd’hui Centre National de l’Artisanat d’Art (CNAA). Pendant six ans, Jean-Luc Bambara s’initie à la sculpture. C’est passionnant. Ses premières œuvres lui procurent une intense sensation. Témoignage : "Le passage de l’abstraction à ces réalités plus sensibles et matérielles suscitent un sentiment ineffable".

Jean-Luc trouve sa voie. Sa voix, dorénavant, elle portera ! Mais ce n’est que le premier pas d’un long voyage. En effet, pour l’artiste, les oeuvres réalisées, qu’elle qu’en puisse être la valeur, ne sont jamais que la scorie de son immense et insaisissable rêve. Conscient de cette réalité, il va se perfectionner en France et en Allemagne. Son retour au pays coïncide avec le début du montage du Musée de la Termitière de Me Pacéré. Ce dernier lui confie l’ensemble du travail artistique. Une aubaine qu’il saisit avec bonheur. Le résultat est bien apprécié. L’artiste y a mis de la maestria.

Un atelier à 19 ans

Muni des armes nécessaires, il peut alors donner une orientation plus forte à sa jeune carrière. Ainsi, en 1982, soit à 19 ans, il ouvre son atelier. Son style accroche. Les sollicitations sont nombreuses. Jean-Luc Bambara réalise la sculpture du chemin de croix de la Cathédrale de Ouagadougou. Il est également le sculpteur de nombreuses œuvres faites de bas reliefs et rondes bosses (sculptures des saints) dans plusieurs Eglises du Burkina, de la sous région et d’Europe.

En outre, le monument en bronze composé de cultivateurs et d’un batteur de tam-tam qui trône devant le siège de la BACB (en face de la Place des cinéastes), le notable en bronze de plus de deux (02) mètres dans le hall du siège de la BIB, etc. sont à mettre à son actif. Peu à peu, sa réputation transcende nos frontières. En 1994, il expose à Ladenburg en Allemagne. Ses œuvres, une trentaine, sont toutes écoulées. De Ladenburg, direction, Laval en France.

Depuis 1999, l’artiste Jean Luc Bambara expose régulièrement à Castellon en Espagne, au Portugal, à Columbus dans l’Etat d’Ohaio. En février 2005 il expose au conservatoire de Colombus, au New Jersey et à Washington. Il rentre du reste de Castellon où il a exposé sa sculpture monumentale " ambiance facile " le 28 février dernier. Celle-ci orne la place " Maria Augustina ", lieu phare de rencontres au cœur de la ville. C’est une œuvre entièrement réalisée en bronze patiné à partir de la technique de la cire perdue.

La sculpture est symbolisée par quatre musiciens dont un joueur de balafon, un de kora, un troisième de djembé et un dernier de kundé. La taille de ces musiciens varie entre 1,85m et 2 m débout, et 1m assis. Chaque œuvre pèse 600 kg environ, soit un total d’environ 2,5 tonnes. Cette sculpture monumentale est entièrement inspirée des scènes de vie de réjouissance populaire au Burkina Faso.

Un style contrasté

De façon générale, les thèmes abordés par l’artiste vont de la fragilité (une mère qui perd sa grossesse), à la maternité en passant par l’intimité, etc. C’est une façon pour lui d’être témoin de son temps dans une société en pleine transformation. Dans ses sculptures, l’esprit du masque apparaît également. Motif, pour Jean-Luc Bambara, l’oeuvre d’art ne doit pas être appréhendée simplement par la seule raison. L’irrationnel, le supra sensoriel est aussi un critère essentiel de la créativité.

Les caractéristiques stylistiques de ses sculptures sont la prédominance des contours, l’accentuation des traits marquants du visage avec un emploi discret des lignes. Il travaille sur les contrastes. Jean-Luc Bambara sculpte sur la pierre, le bois, le bronze et d’autres matériaux. Selon l’artiste, chaque matériau a ses qualités propres. C’est seulement lorsque le sculpteur travaille de manière directe, quand il existe entre lui et son matériau une relation active, que ce matériau peut jouer son rôle dans la mise en forme d’une idée. L’observation de la nature fait partie de la vie de l’artiste. Elle enrichit sa connaissance de la forme, lui garde sa fraîcheur, lui évite de ne travailler que d’après des formules, et nourrit son inspiration.

L’œuvre " Ambiance facile " a donné suite à la commande d’autres sculptures monumentales que l’artiste s’atèle à réaliser. C’est donc la matérialisation d’un partenariat entre le secteur culturel du Burkina et la ville de Castellon. A la présentation de la sculpture " ambiance facile " le 21 juillet dernier à Ouagadougou, le consul honoraire d’Espagne a loué les mérites de cet artiste qui met son art au service de la coopération internationale.

Une foi en l’art

L’ambition de Jean-Luc Bambara est d’aller toujours plus loin. Il s’investit également dans la formation de nombreux jeunes. Connaissant les exigences du marché international en cette ère de mondialisation, il déplore le manque de formation chez bien d’artistes. Pour lui, c’est ce nœud gordien qui nous bloque sur l’échiquier artistique mondial.

La sculpture est en effet un art qui se conjugue avec équilibre, anatomie, proportions... Comme tout autre art, elle s’accommode donc mal de l’improvisation. Les matériaux utilisés offrent aux oeuvres la faculté de traverser le temps, témoignant de l’époque de leur auteur et provoquant l’émotion chez ceux qui les regardent et les touchent.

Jean-Luc Bambara vient donc contribuer à la reconnaissance de la créativité africaine remarquée depuis au moins le 19è siècle. Le rapport artistique et le dialogue entre l’Occident et l’Afrique ont en effet eu lieu autour de la sculpture. Ce sont les sculptures dan, fon, yoruba et bambara qui ont fasciné les cubistes, les dadaïstes... tous ces courants qui ont animé l’art moderne occidental.

Aucun peuple ne pouvant vivre avec la mémoire d’autrui, c’est faire tâche d’huile que d’extérioriser et de valoriser les facettes culturelles qui font la fierté de toute l’Afrique. La sculpture, et par delà, l’art dans son ensemble, devrait permettre de situer l’homme dans le cosmos, comme un microcosme au sein du macrocosme universel. Jean-Luc en fait un credo !

bationoflavien@yahoo.fr

L’Evénement

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Vos commentaires

  • Le 30 août 2007 à 16:32 En réponse à : > Jean-Luc Bambara : Ma vie, ma sculpture !

    Bonjour à tous. Cet artiste a vraiment du génie. il fait la fierté du Burkina Faso. En Europe et surtout en Allemagne, beaucoup de gens disent du bien de lui. Courage Jean-Luc ! Tu as un bel avenir

    Francis, depuis Bonn

    • Le 12 septembre 2007 à 21:23 En réponse à : > Jean-Luc Bambara : Ma vie, ma sculpture !

      Je trouve que cet artiste mérite d’être d’avantage soutenu. On entend effectivement plus parler de lui à l’extérieur qu’au Burkina Faso. Est-ce la confirmation de l’adage "On n’est jamais prophète chez soi" ? Quoi qu’il en soit, Jean-Luc, je te dois une fière chandelle. A traversla description et le style poignat du journaliste, on prend du plaisir à admirer tes oeuvres. Et comme le journaliste l’a si bien signifié, l’art est éternel. Toi, Jean Luc, tu nous le rappelle de fort belle manière. Longue vie à toi pour que tu continues à nous émerveiller.

      Francis, un admirateur

    • Le 12 septembre 2007 à 21:25 En réponse à : > Jean-Luc Bambara : Ma vie, ma sculpture !

      Moi je trouve l’artiste plein d’ingéniosité et de modestie. c’est la marque des grands esprits. Michel

    • Le 12 septembre 2007 à 21:28 En réponse à : > Jean-Luc Bambara : Ma vie, ma sculpture !

      Je voudrais juste féliciter le journaliste pour cet article remarquable. Il nous permet de découvrir l’artiste sur ses fascettes les plus parlantes. Merci au Faso.net de promouvoir de telles initiatives !

      Angèle

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