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Contre la pauvreté dans les médias burkinabè : Une carte de presse et une convention collective en chantier

Publié le mardi 31 juillet 2007 à 07h34min

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Afin de mettre les hommes des médias burkinabè dans de meilleures conditions de travail et de vie, le Conseil supérieur de la communication (CSC) et ses partenaires tiennent un séminaire sur la convention collective et la carte de presse, les 30 et 31 juillet 2007 à Ouagadougou.

Mettre les journalistes burkinabè à l’abri de la précarité en adoptant une convention collective et une carte de presse. Telles sont les préoccupations qui ont regroupé à Ouagadougou, le 30 juillet et cela, jusqu’au 31 juillet 2007, le Conseil supérieur de la communication, le ministère de la Culture, du Tourisme et de la Communication, des associations des médias et des journalistes.

Le président du CSC, Luc Adolphe Tiao est convaincu de l’importance de la convention collective car, « ce texte aura pour avantage, d’assurer aux employés des entreprises de presse, des conditions minimales de travail. Cela contribuera à donner un meilleur rendement dans le travail et partant une meilleure image de cette presse qui n’a que trop pâti des conditions de travail peu enviables ». Et Luc Adolphe Tiao de s’inspirer de Saint Augustin pour souligner qu’il « faut un minimum de bien-être pour cultiver la vertu ».

M. Tiao a mentionné qu’il sait que ce ne sera pas facile pour tout le monde d’adhérer à la convention collective. « Mais, il faut un début à tout. J’invite les entreprises de presse à ne plus renvoyer ce débat aux calendes grecques », a-t-il souhaité. Pour ce qui concerne les journalistes de la presse publique M. Tiao a recommandé qu’à défaut d’un statut particulier, ils adhèrent aussi à la convention collective. Il a également appelé à l’instauration d’une carte de presse car « pour exercer son métier, le journaliste a besoin d’être facilement identifiable et accéder facilement à l’information. En plus, la carte de presse devrait offrir des avantages à ses détenteurs », a-t-il indiqué.

Un avantage pour les patrons de presse

« L’adoption d’une convention collective n’est pas au seul avantage des employés, mais des employeurs », a affirmé Luc Adolphe Tiao. Le représentant de l’Organisation internationale de la Francophonie, Emmanuel V. Adjovi, s’est aligné sur cette vision en soutenant que « cet accord sera également bénéfique aux entreprises de presse en ce sens qu’il leur donnera l’opportunité de s’attacher les services des acteurs les plus professionnels et de les responsabiliser ». Selon M. Adjovi, « moins soumis à la pratique du « gombo » ou du « communiqué final », les journalistes conventionnés livreront certainement des produits médiatiques de meilleure qualité ».

Il a salué le courage et la lucidité des patrons de presse burkinabè qui, selon lui, ont compris à l’image de l’OIF, « que l’adoption d’une convention collective des médias et d’une carte d’identité professionnelle peut contribuer à l’organisation et à la structuration du paysage médiatique de votre pays ». Le représentant de l’OIF espère que l’Etat burkinabè pourra également prendre sa part de responsabilité dans ce processus qui participe à l’affermissement de la liberté de la presse.

Mais, il a attiré l’attention sur le fait que toutes les solutions ne peuvent pas venir de l’Etat. « L’adoption d’une fiscalité spécifique aux entreprises de presse n’est pas une panacée, encore moins l’augmentation de l’aide publique à la presse », a déclaré M. Adjovi. Par contre, de l’avis du représentant de l’OIF, « pour assurer leur développement, les entreprises de presse et les organisations patronales doivent s’attaquer à la question cruciale de l’organisation, la structuration et la régulation du marché de la publicité ».

M. Adjovi a encouragé le CSC à aller plus loin en mettant en œuvre les résolutions de la rencontre, mais aussi en approfondissant la réflexion sur les outils à mettre en place pour faciliter l’accès du secteur privé des médias au marché de la publicité. Le président du comité thème, en même temps président de l’Association des journalistes burkinabè, Jean Claude Méda, a fait observer que les sujets en discussion ne sont pas nouveaux dans le milieu des médias.

Il a tout simplement, souhaité que les échanges soient francs et fructueux et que la rencontre serve de tremplin décisif à la mise en œuvre des résultats des réflexions afin que l’environnement institutionnel des médias au Burkina soit assaini. Le ministre de la Culture, du Tourisme et de la Communication, Filippe Savadogo a exprimé toute sa joie de voir cette réflexion engagée pour l’excellence dans le milieu des médias au Burkina. Il a dit sa détermination à accompagner le processus afin que l’adoption de la convention collective et l’élaboration d’une carte de presse soit une réalité au pays des hommes intègres.

Ali TRAORE


Convention collective, le début a trop duré

« Il faut un début à tout », soutient le président du Conseil supérieur de la communication à propos de la convention collective et de la carte de presse au Burkina Faso. Mais l’on a envie de contredire le président du CSC que le début a, cette fois-ci, trop duré !

Lui-même l’a d’ailleurs subtilement souligné en invitant les entreprises de presse à ne plus renvoyer ce débat aux calendes grecques. Mais de fait, le problème ne se trouve-t-il pas ailleurs ? Les patrons de presse et autres, de même que l’Etat sont-ils disposés à l’avènement de ces mécanismes dans le secteur des médias ? L’on sait que l’adoption d’une convention collective et d’une carte de presse entraîne de facto des exigences. Il va falloir, si cela se concrétise, augmenter le salaire des journalistes, améliorer leurs conditions de travail afin que les hommes de médias arrêtent de se bagarrer autour de 5 000 F CFA, voire 2 500 F CFA et même piller de la nourriture lors des cérémonies.

Mais l’on a l’impression que le chemin est encore long. Malgré la bonne volonté des patrons de presse, il faut reconnaître que, tant que leurs entreprises vivront dans la léthargie, dans des difficultés économiques, la convention collective et autres mécanismes relèveront du leurre. N’est-ce pas mieux de rémunérer un animateur et/ou un journaliste à 15 000 F CFA voire 10 000 F CFA que de s’engager dans des conventions aux contours contraignants et peu maîtrisables ?

A dire vrai , l’on a l’impression que certains patrons de presse préfèrent cette situation. Et puis, ce n’est pas de leur faute, si l’Etat ne prend pas des mesures d’accompagnement consécutives à la convention collective et à l’élaboration d’une carte de presse. L’on a donc peur que cette bonne volonté du CSC ne trouve pas de répondant et que cette rencontre soit une de plus. Il faut de ce fait, que les différents acteurs prenant part à ces réflexions aient un langage franc pour que nous soyons enfin, à la fin du processus. Le milieu des médias burkinabè a vraiment besoin d’être assaini, car ça fait pitié !

Ali TRAORE


Des acteurs du séminaire sur la convention collective des travailleurs des médias expriment leurs attentes

Filippe Savadogo, ministre de la Culture, du Tourisme et de la Communication : « Il faut saluer l’évolution de la communication. Il faut aller par étape, faute de ne pouvoir sauter deux haies à la fois. C’est pour cette raison que l’évolution et l’assainissement du paysage médiatique de notre pays répond à une démarche professionnelle que nous pouvons constater dans tous les pays qui nous entourent. Si la convention aboutit rapidement, elle sera inscrite comme une vision pragmatique de l’organisation du monde de la presse. Luc Adolphe Tiao a affirmé tout à l’heure qu’ils font des suggestions et le gouvernement défend le dossier pour qu’il puisse entrer en application. Vouloir le bonheur de la presse, c’est vouloir que la communication ait une meilleure reconnaissance. Tout début est difficile. Pour l’occasion, je salue l’initiative prise par le président du CSC et président du Réseau francophone des médias afin que nous puissions aller de l’avant ».

Jean-Claude Méda, président de l’Association des journalistes du Burkina (AJB) : Nous avons organisé des ateliers autour de la question de la carte de presse et de la convention collective. Des pas ont été faits, des propositions de documents relatives à la convention collective et à la carte de presse. A mon avis, on a suffisamment épilogué sur ces sujets et il faut passer à une autre phase, c’est-à-dire la phase pratique qui consiste à la négociation.

A l’issue de cet atelier, il faut que nous ayons un échéancier, que nous sachions à quelle date nous allons terminer la négociation, que cet atelier donne l’occasion pour lever toutes les sources de blocages ou obstacles pour qu’en définitive, nous puissions nous engager dans la négociation. Les différentes associations ont été associées et ont le même niveau d’information sur les dossiers, beaucoup de responsables de presse se sont publiquement prononcés sur la question et se sont déclarés favorables. Sur cette base, je fonde ma confiance pour que cette atelier débouche sur des résultats concluants ».

Shériff Sy, président de la SEP : Je n’ai pas une appréciation particulière, nous discuterons, chacun avancera ses idées et ses propositions et l’essentiel, c’est de parvenir à un consensus qui peut mettre véritablement le processus en marche, ce sera une bonne chose. Si nous savons qu’une convention collective peut permettre de structurer mieux le monde des médias, de rétribuer mieux les journalistes et si nous sommes tous d’accord, il faut que les entreprises de presse soient viables et elles ne peuvent être viables que si certaines conditions économiques et financières sont réunies, ce qui n’est pas le cas.

C’est donc dire que dans ce domaine, l’Etat devrait accompagner ces entreprises pour que la convention puisse voir le jour. Si les entreprises de presse ont les moyens, je pense que les journalistes y gagneront et le monde des médias y gagnera.

Justin Coulibaly, président du SYNNATIC : Nous attendons du séminaire que nous puissions évoluer de façon positive, vers l’adoption d’une convention collective de trait des médias au Burkina. Il nous a été demandé de faire une convention collective dans la mesure où les presses d’Etat ont évolué vers une semi-privatisation.

C’est ainsi que nous avons élaboré notre document et c’est sur ce document que le ministère de l’Information a convoqué une réunion interministérielle qui a sorti un document consensuel, et ce document a fait l’objet d’un atelier en accord avec le ministère du Travail qui a apporté ses amendements. Ces amendements ont été intégrés au document consensuel et c’est ce document qui sert de base au plaidoyer pour adopter une convention collective. Ce qui restait, c’était de pouvoir intégrer les amendements du ministère du Travail.

Ce n’est pas uniquement une convention collective pour la presse privée, mais pour l’ensemble du corps de maintien de la presse. Mais à l’intérieur, il n’est pas exclu qu’il y ait des conventions sectorielles. Il faut que le minimum de salaire puisse atteindre les salaires de la Fonction publique, c’est ce que nous souhaitons à l’issue de ce séminaire.

Propos recueillis par Véronique NIKIEMA
(Stagiaire)

Sidwaya

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