Je voudrais m’excuser d’une réaction aussi tardive, mais se justifiant par le fait que :
1. j’ai été momentanément absente ce qui ne m’a guère permis de prendre à temps connaissance de sa réponse
2. le CDP, militants de base et dirigeants compris n’ayant pas habitué l’opinion publique burkinabé à se « mouiller » dans des débats du genre, je ne m’attendais donc guère à voir l’un d’entre eux se jeter à l’eau. Mais il y a un début à tout.

Cependant, est-ce par manque d’une argumentation pertinente opposable au sujet ? Est-ce simplement par l’inhabitude du débat ? Toujours est-il qu’en parcourant l’écrit de monsieur le militant du CDP, j’ai eu la nette impression qu’il s’est ingénié à fuir le vaste champs des propositions concrètes qu’il n’a pas manqué de lire, pour s’ébaubir dans des considérations vaseuses et valant leur pesant de langue de bois.

Tandis que la réflexion porte sur la reprise contradictoire du fichier électoral, la pièce d’identification sécurisée, le vote des burkinabé de l’extérieur, l’opérationnalisation du site Internet de la CENI, l’adoption d’une nouvelle formule de contrôle dans les bureaux de vote, etc., monsieur le militant CDP répond par des litanies éculées du genre : « la démocratie s’enracine au Faso », « Elle se construit petit à petit et s’ancre dans le combat de ces fils et filles qui luttent pour réaliser leur ambition de vivre dans un Burkina de paix sociale, de stabilité,
de démocratie et de progrès continu » En somme, monsieur le militant CDP, à vous lire, le Burkina Faso n’est pas loin de figurer au panthéon de l’excellence démocratique.

Vous affirmez aussi que la démocratie est un processus dynamique, c’est-à-dire qu’elle est une construction permanente qui se doit d’échapper à toute situation statique. Vous confirmez par là que les propositions faites par l’UNDD sont fondées et vous confirmez que le Burkina Faso ne devrait pas craindre de s’inscrire dans des expériences de renouvellement et d’approfondissement de sa démocratie en appliquant comme tout dernièrement au Togo la carte biométrique infalsifiable avec photo d’identité. Mais monsieur le militant CDP vous souvient-il seulement que l’application d’une telle mesure est issue de l’accord de paix signé à Ouagadougou par les protagonistes de la scène politique togolaise et sous la paternelle supervision d’un Blaise COMPAORE érigé en médiateur éclairé ?

Ne vous paraît-il pas alors contradictoire qu’au pays de l’excellence démocratique l’on fuie comme la peste, les bienfaisantes thérapies si « sagement » conseillées aux autres ?

Dans l’espoir de la
vision partagée d’une démocratie dynamique au Burkina Faso, j’avais escompté en vous lisant, des contre-propositions toutes aussi concrètes au lieu de cet étalage peu flatteur seulement d’un thuriféraire en quête de la moindre attention de son seigneur et maître. Monsieur le militant du CDP, si le Burkina Faso se dépêtre aussi difficilement de son rang de quasiment dernier pays du monde la cause en est imputable en partie à ceux qui, au lieu d’éclairer le peuple sur sa véritable situation, l’endorment malheureusement par l’opium de leurs incantations laudatives.

S’agissant de vos propos sur l’opposition burkinabé, ils trahissent à son endroit votre suffisance de pharisien et surtout, votre compréhension plus qu’approximative de son rôle indispensable dans une démocratie digne de ce nom.

Monsieur le militant CDP, lorsqu’on possède le sens de la république l’on ne se réjouit pas d’avoir une opposition réduite à sa portion la plus congrue au sein de l’hémicycle ; l’on s’inquiète, même quand on est du parti au pouvoir, que les institutions dont vous vantez tout le fonctionnement, ne servent que de trompe-l’œil et de décor ; l’on se préoccupe du fait que la fraude la plus innommable soit cautionnée par l’organisme censé garantir la transparence électorale ; lorsqu’un parti au pouvoir, s’appuyant largement sur les moyens de l’Etat, fait de la destruction systématique des partis d’opposition son sport favori, l’on devrait sentir sa conscience démocratique en berne.

Monsieur, tant que le processus démocratique au Faso négligera la recherche de l’équilibre représentatif et la prise en compte des avis de tous les partenaires en présence-opposition et société- il ne sera, comme je l’avais écrit, que bricolage et petits coups fourrés entre amis et sur le dos du peuple.

Intervenant sur la question, l’ambassadrice des Etats-Unis au Burkina Faso n’a-t-elle pas dit : « il n’y a pas de démocratie sans opposition forte ? » L’Ambassadeur de France de son côté n’a-t-il pas recommandé au pouvoir de travailler à son image. Trouvez-y aussi matière à réflexion sinon à réponse, car ces réactions d’une certaine façon participent aussi de la déconstruction de la démocratie que je dénonce.

Ouagadougou, le 28 juillet 2007

Mariam OUEDRAOGO
Secrétaire nationale chargée de la promotion
de la Femme de l’UNDD