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Adama Pamtaba, artiste comédien : Le Burkinabè a envie de voir ce qui l’intéresse

Publié le lundi 20 août 2007 à 07h15min

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Adama Pamtaba

Adama Pamtaba est un artiste comédien qui a fait ses armes sur les planches. Fonctionnaire de police, voulant allier ses premiers amours et sa fonction de flic, il opte pour le cinéma. Un challenge qui lui a valu une trentaine de films. C’est lors du lancement télé de la « série noire à Koulbi » de Boubacar DIALLO qu’il a bien voulu nous ouvrir son cœur et ses ambitions. Lisez plutôt.

On vous voit de plus en plus sur les écrans, vous avez combien de films à votre actif en tant qu’acteur ?

Adama PAMTABA (AP) : Il y a une trentaine de films où j’ai joué le rôle d’acteur.

Cela veut dire que c’est de l’expérience accumulée. Comment êtes-vous venu dans ce métier ?

AP : 30 films ce n’est pas peu. D’abord, j’ai commencé par les planches avant de venir au cinéma. Cela s’explique par le fait que je suis fonctionnaire de police et mon temps ne me permettait pas de me consacrer au théâtre. Donc, j’ai préféré raccrocher pour le cinéma qui est quelque chose de ponctuel et c’est comme ça que je suis venu dans le cinéma par hasard. J’ai commencé un premier casting dans le film de Maurice KABORE qui se nommait « Sonja ». Après cela, j’ai joué avec SANOU Kollo et Pierre ROUAMBA dans leurs séries « Taxi-Brousse ».

Ce film intitulé « Série Noire à Koulbi » répond à quelle philosophie ?

AP : Comme dans les habitudes de Boubacar DIALLO, c’est toujours un thème d’actualité. Le thème abordé est la grande délinquance en quelque sorte. L’histoire même vous aurez le temps de la déguster à la diffusion. Je pense seulement vous dire que c’est une histoire qui se passe dans un village où tout le monde se connaît et se côtoie, en fait, où tout le monde croit se connaître. Mais il se trouve que parmi les villageois, il y a une personne insoupçonnée qui se permet de commettre certains crimes en assassinant dans le village ceux qui sont un peu aisés. C’est un film dramatique traité sur un ton d’humour pour faire passer facilement le message, c’est tout simplement du Boubacar DIALLO.

Quel est votre rôle véritable dans ce film ?

AP : Dans ce film, j’ai joué le rôle de colporteur. Comme dans les villages, c’est difficile de trouver une boutique, il y a des gens qui font office de boutique ambulante. Et, dans ce film, je passe de village en village sur mon vélo pour vendre de la camelote. Vous savez que ces genres de personnes sont des sources d’information parce que le fait de passer de village en village, ils apprennent beaucoup et informent beaucoup. C’est pour dire que c’est celui-là qui est le vecteur de l’information.

Dites-nous quelque chose sur le FESPACO, qui vient de boucler sa 20e édition ?

AP : Le FESPACO est à sa vitesse de croisière. 38 ans ce n’est pas 38 jours ni 38 mois. Je peux dire qu’on sent une certaine maturité. Cependant, particulièrement nous les comédiens et techniciens de cinéma, j’avoue que nous pourrons nous estimer orphelins du FESPACO. A notre avis, cette fête du cinéma même si elle fait quelque chose pour nous la balance pèse plutôt pour les réalisateurs. Parce que pour un comédien au FESPACO, c’est comme une poule qu’on jette sur le marché. On dit contact, mais quel contact ?

Pour moi il faut que le contact soit créé par une institution. Tu es comédien, tu ne connais personne. Tout ce que tu sais c’est que tout ce beau monde est festivalier ; mais comment faire pour créer le contact. A mon humble avis, je pense que les autorités en charge du FESPACO doivent revoir leur copie et essayer de créer l’opportunité qui va faciliter l’intégration culturelle des artistes.

Nous allons parler de l’actorat au Burkina Faso. Est-ce que la formation est une réalité ?

AP : Je peux vous assurer qu’en matière de cinéma, le Burkina Faso a le capital humain le plus compétent. Aussi beaucoup de réalisateurs viennent tourner ici. Et parmi eux des célébrités comme SEMBENE Ousmane (ndlr : interview réalisée avant le décès de l’illustre cinéaste SEMBENE Ousmane). Au Burkina Faso on a les meilleurs techniciens, on a les meilleurs comédiens. Le problème du Burkinabè c’est son complexe. Il ne revalorise pas ce qu’il a de riche. On pense toujours que c’est ce qui vient de l’extérieur qui est mieux. Un exemple, vous prenez une chaîne de télévision comme TV5, presque toutes les séries qui passent sur cette chaîne sont burkinabè.

Quelqu’un qui est intéressé par le métier d’acteur où peut-il s’inscrire ?

AP : C’est vraiment un grand problème. C’est ce que nous-mêmes comédiens, cherchons. Il n’y a pas un cadre comme un conservatoire à Abidjan, au Mali ou en France où on forme les comédiens. Ici tous les comédiens se forment sur le tas dans les compagnies théâtrales comme le CITO (Carrefour International de Théâtre de Ouagadougou).
On peut dire que le CITO s’apparente un peu à cela mais jusque-là l’Etat burkinabè n’a pas encore fait quelque chose en matière de formation pour les comédiens et les acteurs de cinéma.

Le FESPACO, si on vous demandait d’apporter votre touche. Où allez-vous intervenir ?

AP : Je parlerai à mon actif dans le domaine où j’exerce qui est le jeu de scène. J’aimerais que le FESPACO à l’avenir essaie d’organiser quelque chose pour les comédiens, c’est-à-dire un cadre où le comédien pourra s’épanouir afin de créer des rencontres avec d’autres artistes et des réalisateurs. Vous savez les deux vont de paires. Sans comédiens, il n’y a pas de réalisateurs et vice-versa. Autant les réalisateurs et les producteurs ont besoin des contacts, autant les comédiens aspirent aussi à des contacts.

Le problème de salles se pose, on a assisté paradoxalement à la fermeture de certaines d’entre elles, qu’en pensez-vous ?

AP : Vous savez, il y a quelque temps de cela pour suivre un film, il faut la télévision ou le cinéma. Il se trouve aujourd’hui qu’il y a une prolifération des vidéo-clubs dans les quartiers et encore très moins chers. Une anecdote très simple. Vous prenez l’un des films de Boubacar DIALLO, dénommé « Safia ». Un jour je l’ai vu projeter dans un quartier de Ouagadougou à 50F CFA la séance. Un film dont le réalisateur n’a pas encore recouvert son investissement, on l’utilise par voie de piraterie. C’est dommage pour le Burkina Faso, que ce pays soit le leitmotiv du cinéma africain et les salles se ferment.

Je prends un exemple comme l’Egypte, rien que la seule ville de Caire a au moins près de 300 salles de ciné, il n’y a pas à comparer avec le Burkina Faso. Il faut booster une nouvelle politique pour intéresser davantage le public à son cinéma.

Je pense que la nouvelle donne contribuera à cela. Je vous dis si vous assistez à la projection d’un film burkinabè dans une salle à Ouaga, c’est édifiant. Cela veut dire tout simplement que le public est en train de reconsidérer le cinéma burkinabè. Et c’est aux acteurs de travailler pour fournir le marché pour que le cinéphile puisse avoir son film au temps voulu et au temps opportun.

Est-ce que le manque d’engouement du public n’est pas dû à la matière qu’on lui proposait avant ? C’est-à-dire des films exportés qui n’ont rien à voir avec sa réalité quotidienne ?

AP : Il y a un promoteur de salle de ciné qui m’a fait une confidence un jour. Il m’a dit ceci : « Si un film est produit à plusieurs coûts de millions de dollars aux Etats-Unis vient au Burkina Faso, nous aurons la peine de remplir la salle par rapport à un film burkinabè ».
C’est pour vous dire qu’actuellement le Burkinabè a envie de voir ce qui l’intéresse. L’Occident nous a assez fait rêvé. Maintenant les Africains sont conscients de leurs problèmes et ils veulent s’en imprégner.

Si vous prenez les séries burkinabè qui remplissent les salles, ce sont des films qui parlent des réalités quotidiennes du Burkinabè. Je pense que les réalisateurs et les producteurs devraient mettre l’accent sur cet aspect sociologique et psychologique de leur public, surtout avec le numérique qui amoindrit le coût de réalisation. Et je pense que cela aussi contribuera à l’éclosion des comédiens et des techniciens aussi.

Par Issoufou MAIGA

L’Opinion

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